Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Seul sur Mars
Andy Weir
Bragelonne, Thriller, traduit de l’anglais (États-Unis), science-fiction, 403 pages, septembre 2014, 20€

Un ouvrage de genre original ? On n’en avait pas lu depuis longtemps. Si « Seul sur Mars » n’a pas pour vocation de révolutionner le genre ni de créer une étape historique pour les lecteurs, force est d’avouer que ce roman se démarque assez nettement de ce qui s’écrit dans ce domaine depuis de nombreuses années. Un retour en arrière sur la conquête spatiale de Mars qui n’a pas eu lieu, un postulat intéressant – un astronaute laissé pour mort et qui, ayant miraculeusement survécu, s’obstine à survivre, encore et encore – et au final une belle aventure.



«  J’ai bien réfléchi et maintenant j’en suis sûr : je suis foutu.  »

Sur Mars, une tempête de sable d’une violence imprévue menace de détruire l’habitat du site Arès 3, occupé par une petite équipe d’astronautes. Une évacuation d’urgence s’impose à bord du Véhicule d’Ascension Martienne, qui permet de rejoindre le vaisseau Hermès en orbite. Mais tout tourne à la catastrophe et l’un d’entre eux, Mark Watney, considéré comme mort, est laissé en arrière.

Lorsque celui-ci revient à la conscience, il est seul. La station martienne – l’Habitat – n’est pas entièrement détruit. Botaniste, ingénieur, mais aussi, et surtout, ingénieux, Mark Watney a manifestement un mental en titane. Définitivement seul, dépourvu de tout moyen de communication avec la Terre, il ne perd pas un seul instant ses moyens. Son objectif : survivre, et chaque problème en son temps.

Watney s’organise, planifie, bricole, répare, calcule. Oxygène, nourriture, eau. Il gagne du temps. Les problèmes insolubles, ceux qui à long terme entraîneront sa perte, il trouvera bien un moyen pour les résoudre. De toute évidence, la NASA a bien sélectionné ses astronautes : pour empêcher Mark Watney de dormir, il en faut manifestement bien plus que ça.

Une lueur d’espoir : une mission Arès 4 est prévue, le VAM est déjà en place, à quelques milliers de kilomètres de là. Ce Véhicule d’Ascension Martienne, grâce à des réactions chimiques et à l’atmosphère de la planète, fabrique – lentement – son propre carburant. S’il parvenait à gagner ce site, Watney pourrait regagner le vaisseau Hermès lors de son retour. Seul souci, il n’a pas assez de nourriture pour tenir assez longtemps. Mais quand on est botaniste, et qu’on a quelques pommes de terre sous la main… ne reste plus qu’à fabriquer de l’humus et à générer de l’eau en quantités suffisantes.

«  J’ai plein de problèmes à résoudre, mais je bénéficie de l’aide de beaucoup de personnes très intelligentes. En gros, tous les habitants de la planète Terre . »

Watney a une idée de génie : aller chercher la sonde Pathfinder, qui moisit sur Mars depuis des décennies, la ramener à sa base, et bricoler ses composants pour trouver un moyen de communiquer avec la Terre. Il parvient à envoyer un message, à décrypter les réponses que la Nasa ne peut lui envoyer qu’à travers les mouvements d’une caméra. Puis la terre parvient à lui envoyer des lignes de code lui permettant de télécharger un programme dans le rover. Bientôt, il peut communiquer par mail. La Terre entière est derrière lui. À commencer par les ingénieurs de la Nasa, qui lui donnent les consignes pour bricoler son véhicule afin d’atteindre Arès 4.

«  Je ne suis pas dupe : je sais que mes prévisions ne survivront pas à l’épreuve du terrain . »

Des soucis dans l’habitat, une catastrophe à laquelle Watney échappe de justesse, la fin des cultures. Watney sait, cette fois-ci, qu’il va finir par mourir de faim. Ses provisions pourraient lui permettre de tenir jusqu’à l’arrivée d’un container propulsé à l’aide d’une fusée primitive, mais celle-ci, conçue à la hâte, explose peu après son décollage de la terre. Une autre solution ?

De pire en pire : une manipulation malheureuse grille les composants électroniques du rover. Retour à la case départ, et à la solitude, pour Watney. Il en faut plus pour le décourager : il avait l’habitude de se débrouiller seul, il continuera, et, malgré accidents et tempêtes de sable, d’astuce en astuce, au terme d’une véritable odyssée martienne (que le lecteur peut suivre sur une carte placée en début de volume) finira par atteindre le site d’Arès 4.

«  Dans l’espace, personne ne vous entend quand vous criez comme une petite fille . »

Mark Watney débarrasse le VAM de quelques tonnes de métal inutiles. Il finit, tout de même, par afficher quelques signes de fatigue, et pour la première fois s’autorise à penser à sa possible fin. « Aujourd’hui, je quitte Mars d’une manière ou d’une autre. On ne m’a pas donné le pourcentage de risques d’échec, mais je suppose qu’on n’a pas fait pire dans l’histoire des vols habités. » Mais il ne perd pas pour autant son sens de l’à-propos scientifique, et calcule le mélange d’oxygène et d’azote avec lequel il préférerait mourir.

Avec la difficile rencontre avec l’Hermès, à bord d’un VAM bricolé, allégé au mépris de toutes les consignes de sécurité habituelle, et qui ressemble plus à une vieille décapotable qu’à un véhicule spatial, Andy Weir s’y entend pour faire durer le suspens jusqu’à la dernière seconde. On n’imaginait pas que Mark Watney puisse ne pas s’en tirer. Mais s’il parvient à rejoindre l’Hermès, c’est aussi au prix d’une manœuvre impensable de celui-ci, un autre bricolage hasardeux qu’il n’aura pas, pour une fois, inventé lui-même.

Que l’on n’aille pas croire pour autant que cette chronique résume l’ouvrage. Elle n ne fait guère qu’en tracer les grandes lignes. Le lecteur découvrira en cours de route bien d’autres grains de sable, bien d’autres tentatives, bien d’autres péripéties. Et c’est là tout le talent de l’auteur : maintenir sans cesse son héros entre la vie et la mort et faire croire au lecteur que tout peut tourner définitivement à la catastrophe, lui faire oublier la « happy end » que l’on devine dès le début. En accumulant projets, manipulations scientifiques, contretemps, astuces et réussites, il y parvient pratiquement à chaque chapitre. « Seul sur Mars », en définitive, c’est le film « Gravity » d’Alfonso Cuaron, mais en beaucoup plus nourri, en pas plus invraisemblable, et, au final, en beaucoup mieux. L’industrie cinématographique ne s’y est d’ailleurs pas trompée : aux dires des média, Ridley Scott lui-même serait en passe d’adapter ce roman. En attendant, « Seul sur Mars » apparaît comme une belle réussite pour Andy Weir, et une belle trouvaille pour la collection « Thriller » de chez Bragelonne.


Titre : Seul sur Mars (The Martian, 2011-2014)
Auteur : Andy Weir
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Nenad Savic
Couverture : NASA
Éditeur : Bragelonne
Collection : Thriller
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 403
Format (en cm) : 15 x 22,7 x 3
Dépôt légal : septembre 2014
ISBN : 978-2-35294-794-3
Prix : 20 €



Hilaire Alrune
31 octobre 2014


JPEG - 17.3 ko



Chargement...
WebAnalytics