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Porteurs d’âmes
Pierre Bordage
Le Livre de Poche, thriller, roman (France), policier noir d’anticipation, 437 pages, juin 2009, 6,95 €

Et si on pouvait séparer la conscience, l’âme, du corps, et la transplanter dans un autre corps ? Sur cette idée simple, l’auteur va construire un roman noir, très noir, et en profiter pour dénoncer notre société, sans âme, justement.



Pierre Bordage, né en 1955, est un grand bonhomme de la science-fiction française aujourd’hui, et même au-delà. Depuis ses premiers space-operas d’envergure (« Les Guerriers du silence », « Terra Mater », « La Citadelle Hyponeros »), il a écrit plus d’une vingtaine de romans. Là il s’essaye au roman noir façon thriller.

Comme souvent chez Bordage, le lecteur commence par suivre plusieurs lignes narratives en parallèle, avant que celles-ci ne se rejoignent plus ou moins loin dans le livre.
On suit trois héros bien différents : Léonie, une jeune femme nigériane, vendue par ses parents à un couple qui la bat et la prostitue depuis qu’elle a 8 ans, qui s’échappe de son enfer ; Cyrian, un jeune homme riche et blasé à qui tout réussit et qui veut à tout prix intégrer une confrérie secrète, celle des Titans, qui lui promet des expériences ultimes ; et enfin Edmé, un quinquagénaire désabusé, flic sans ambition à la Crim’ mais qui a du flair et découvre un charnier sous-marin dans la Marne aux portes de Paris.
Pour survivre sans argent et sans papiers, Léonie va accepter d’être cobaye d’une expérience, celle d’être le récepteur, le vaisseau, de ces âmes qui peuvent voyager d’un corps à l’autre. Et bien sûr que l’expérience « ultime » des Titans est ce voyage, qui fait l’effet d’une drogue à Cyrian. Pendant ce temps-là, Edmé continue son enquête avec une collègue qui a un faible pour lui.

C’est un thriller, donc je n’en dirai pas plus sur le déroulement des évènements. Sachez que c’est noir, très noir, et que Léonie comme Edmé vont beaucoup souffrir et subir à plusieurs reprises des passages très difficiles. Le moins sympathique des trois, le beau gosse blond et riche, s’en sortira sans une égratignure, mais moralement et humainement modifié donc grandi.

Bordage écrit bien et efficace. Les phrases coulent facilement. Le suspense reste prenant jusqu’aux dernières pages. Et il en profite pour dénoncer les travers de notre société, avec lucidité et pertinence : la recherche du pouvoir, de l’argent, le mépris des faibles pourtant humainement riches, la maltraitance des fragiles, l’arrogance, la bêtise et la cruauté gratuite des flics, le racisme, la corruption jusqu’aux plus hauts rouages de l’état, lui-même en proie aux luttes entre factions. Tout cela est bien vu et bien décrit.

On pourrait reprocher à ce roman sa longueur : au moins une centaine de pages en trop. Mais l’auteur est un professionnel et c’est ce que souhaitent les lecteurs et éditeurs aujourd’hui. Il y a aussi beaucoup de scènes d’horreur et de souffrance. Léonie s’en sort, tombe amoureuse mais..., s’en sort et retombe dans les pattes de ses ex-geôliers. Celle dont la vie n’a été que douleur subira encore et encore son horrible karma. Edmé que la vie n’intéresse plus va tomber amoureux mais… Le seul à ne pas déguster est Cyrian. Il y a aussi quelques facilités dans la façon dont s’en sortent les gentils : des méchants trop bêtes, l’arrivée inopinée d’un allié tombé du ciel, etc.

Ce roman est globalement une réussite. L’idée de départ est bien exploitée et discutée dans ses prolongements, les caractères sont bien trempés et crédibles, le suspense est maintenu, la critique sociale est pertinente.

À lire.


Titre : Porteurs d’àme (première édition : Au diable vauvert, 2007)
Auteur : Pierre Bordage
Couverture : Leptosome
Editeur : Le Livre de Poche
Collection : thriller
Pages : 457
Format (en cm) : 18 x 11
Dépôt légal : juin 2009
ISBN : 978-2-253-12475-7
Prix : 6,95 €



Hervé Thiellement
31 juillet 2009


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