Robert Borrows est fils d’outilleur, un “petit guildé” qui travaille à l’extraction de l’éther dans une ville triste et froide du Nord de l’Angleterre. Cet éther sert à tout et, moyennant les formules magiques détenues par les différentes guildes, il permet de faire tourner les machines, rouler les trains, construire les ponts et les bâtiments, assurer les communications par télégraphie, etc. Mais c’est un produit dangereux pour l’intégrité physique des humains. Les accidents sont fréquents qui transforment les victimes en “anamorphes” ou “trolls”, rejetés par la société quand ils ne sont pas brûlés. La mère du narrateur finira par mourir d’une ancienne blessure. Le jeune Robert part alors pour Londres où il vivote de menus larcins et de petits boulots, rencontre des miséreux comme lui, mais aussi ces maîtres, grandmaîtres et arrière-grandmaîtres des guildes majeures qui vivent dans un luxe indécent. Il deviendra révolutionnaire et jouera un rôle clé dans l’avènement de cet “âge des lumières”.
C’est aussi une histoire d’amour entre Robert et Anne-Lise, cette fillette qu’il rencontra enfant avec sa mère et qu’il retrouvera à Londres, membre de la haute société, amie des puissants. Tous sont fascinés par sa beauté, sans connaître sa vraie nature d’anamorphe. Elle jouera elle aussi un rôle essentiel dans la “révolution”.
L’écriture est recherchée, la langue riche et poétique, parfois complexe, qui oblige à un rythme de lecture lent. On entre progressivement dans ce monde injuste, froid et triste, totalement dépourvu d’humour et où les moments de joie ou de simple bien-être sont extrêmement rares. Malgré l’éther et sa magie qui régissent cet univers, l’ambiance, entre steampunk et Dickens, fait bien peu de place au merveilleux. Tout juste si les bâtons de commandement des grandmaîtres et les pouvoirs des anamorphes permettent de sauver la vie des héros ou de provoquer la “révolution”.
Malgré ses qualités, cette histoire a du mal à émouvoir. Perdu dans cette écriture, on peine à entrer dans la psychologie des personnages, sauf pour le narrateur Robert. Les comportements des personnages féminins, Anne-Lise et Sadie, ne semblent pas guidés par des motivations précises. On pourra également remarquer des incohérences (le dragon dont on a rogné les ailes s’envole) et s’étonner que la révélation d’un mensonge suffise à faire tomber le pouvoir en place. La fin est à l’image du reste : triste et désabusée.
Ce long roman est de grande qualité au niveau de la langue et a un pouvoir certain de fascination et d’évocation. Pourtant je n’ai pas lu là le chef d’œuvre annoncé.
Titre : L’Âge des Lumières (The Light Ages 2003)
Auteur : Ian R. MacLeod
Traduction de l’anglais (G.B.) : Jean-Pierre Pugi
Couverture (souple) : Guillaume Sorel
Éditeur : Denoël
Collection : Lunes d’Encre
Site Internet : Lunes d’Encre - L’Âge des Lumières
Directeur de collection : Gilles Dumay
Pages : 606
Format (en cm) : 20,5 x 14 x 3,8
Dépôt légal : 18 janvier 2007
EAN : 978-2207255704
ISBN : 2207255700
Prix : 28 €