Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Piège de papier (Un)
Eva García Sáenz de Urturi
Fleuve éditions, Fleuve Noir, roman traduit de l’espagnol, policier, 544 pages, février 2024, 23,90€

Le premier cadavre apparaît lors de la présentation publique du roman historique « Les Seigneurs du temps ». Puis deux jeunes filles disparues sont retrouvées, l’une morte, l’autre à l’article de la mort. Dans les deux cas, le mode opératoire ressemble à celui décrit dans le livre.
L’inspecteur et profiler Unai Lòpez de Ayala, dit Kraken, voit rapidement le lien entre l’œuvre et la réalité. Problème : son auteur est inconnu de tout le monde, même de son éditeur. Aidé de sa coéquipière Estìbaliz, dite Esti, et de sa supérieure et compagne Alba, Kraken va suivre cette piste pour découvrir le coupable.



Eva García Sáenz de Urturi est née en 1972 à Vitoria, capitale du Pays basque espagnol, qu’elle met en scène dans sa trilogie de la « Ville blanche » qui trouve ici sa conclusion. « Le silence de la ville blanche » et « Les rites de l’eau », tous deux disponibles en Pocket, ont permis aux lecteurs de se familiariser avec cette cité et ses personnages attachants. Kraken, surnom dû à ses longs bras, est devenu une célébrité pour la résolution des enquêtes relatées dans ces deux précédents tomes. Des tueurs sans pitié, animés par la vengeance, ont laissé de nombreux morts dans leur sillage. Au milieu du chaos avec la perte d’êtres proches et une blessure grave, Kraken a trouvé le bonheur avec Alba qui lui a donné une fille. Il connaît Esti depuis son enfance, sont amis et coéquipiers, peuvent se faire confiance. De plus, son grand-père centenaire est un roc, soignant tous les maux avec des pommes. Il peut aussi compter sur son frère avocat. Tout ce petit monde se serre les coudes, faisant front face à l’adversité qui ne les épargne pas, c’est le cas de le dire. Les retrouver dans « Un piège de papier » est donc un vrai plaisir, car impossible de ne pas s’y attacher.

Ce livre recèle deux trames séparées par le temps. D’un côté, le présent avec Unai et ses collègues ; de l’autre, ce roman historique se déroulant fin du XIIè siècle à Victoria, l’ancienne Vitoria. « Les seigneurs du temps » se révèle très proche de la réalité historique et met en scène Diago Vela rentrant au pays après une longue absence, alors que ses sujets le pensaient mort. Régulièrement des passages de cet ouvrage sont donnés en lecture, créant un contrepoint ou un intermède historique qui ne sont pas sans trouver des échos dans le présent. Indubitablement les deux sont liés à travers le temps, l’assassin s’inspire de ce livre dont l’auteur semble le coupable idéal. Reste à le trouver. Et est-ce aussi simple ?
Même si l’accent est bien sûr mis sur le présent avec l’enquête en cours, « Un piège de papier » recèle presque deux œuvres, les deux se révélant aussi prenantes. De plus, le roman ne se résume de loin pas à l’enquête sur les meurtres, car Unai et ses proches ont une vie, avec des moments de joie et des drames. Tous deux policiers, Unai et Alba sont soumis à une rude pression, côtoient la mort avant de rentrer le soir retrouver leur petite fille. Cette situation est-elle tenable ? D’un côté, Unai endosse un rôle de protecteur de la ville et de ses habitants, un devoir plus fort que lui et de l’autre, il éprouve l’envie d’un quotidien moins stressant, normal où il pourrait s’occuper de sa famille.
Mais avec Eva García Sáenz de Urturi, rien n’est aussi simple qu’il ne le paraît. Il y a toujours une remise en question, une surprise qui change la donne. Deviner le coupable tient à chaque fois de la gageure, tant elle sait brouiller les pistes. Le lecteur ne peut que se laisser emporter par le flot des événements, des intuitions d’Unai, vivre à ses côté un quotidien peuplé d’inquiétude où personne n’est épargné. L’atmosphère se révèle lourde, inquiétante, tant on sent que tout peut basculer, que la vie de chacun est fragile et repose sur peu de choses finalement. Les plus de cinq cents pages se lisent rapidement, même si on saute d’une intrigue à l’autre.
À ce propos, l’auteure s’en explique dans la postface. Elle a voulu concilier deux univers, celui de la « Trilogie de la Ville blanche » avec celui de « La saga de los longevos », cycle historique inédit en français. La fin montre comment certaines choses sont liées.

« Un piège de papier » achève de belle manière une trilogie des plus passionnantes. Les lecteurs garderont en mémoire Unai et ses proches, tous marqués par les événements. Eva García Sáenz de Urturi signe là un cycle policier propre à satisfaire les amateurs de genre pensant déjà avoir tout lu. Et les enquêtes ne sont pas tout, les personnages ont aussi une vie, une famille et c’est ce qui apporte un charme supplémentaire à l’ensemble.
Lire ce cycle vous donnera sûrement envie de découvrir le polar espagnol qui ne manque pas de pépites, alors lancez-vous...


Titre : Un piège de papier (Los señores del tiempo, 2018)
Auteur : Eva García Sáenz de Urturi
Traduction de l’espagnol : Judith Vernant
Couverture : Laurent Besson. Photos : © Unsplash
Éditeur : Fleuve éditions
Collection : Fleuve Noir
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 544
Format (en cm) : 14 x 21
Dépôt légal : février 2024
ISBN : 9782265155428
Prix : 23,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
9 mars 2024


JPEG - 30.4 ko



Chargement...
WebAnalytics