La maison de Mme Sabu est le refuge de nombreux orphelins, c’est là que fut recueillie la jeune Myo-un. La petit fille a des difficultés pour marcher et elle est peu appréciée par les autres enfants. Seul Ryusang s’intéresse un tant soit peu à elle. Il est pourtant une véritable peste, toujours à chercher la castagne ou la bêtise à faire. Mais avec la petite fille, malgré des apparences toujours bourrues, il va montrer beaucoup plus d’affection que l’on pouvait attendre d’un tel petit monstre. Mais le destin ne sera pas vraiment rose entre les deux adolescents et la tendresse va vite laisser place à la haine. Mais pourquoi ? Pourquoi Ryusang va soudain rejeter la jeune fille ? Pourquoi feindra-t-il d’ignorer la superbe jeune femme que Myo-un va devenir ? Quel est le secret de cette rupture loin d’être aussi simple à assumer par le jeune homme ?
“Nabi, Prototype” est, comme l’indique son titre, un one-shot qui servira de base à la future série “Nabi” de Kim Teon-joo, éditée par les éditions Kana. Les deux premières histoires nous amènent dans des pays exotiques d’un passé plus ou moins lointain. Deux destinées, une tragique, celle du jeune kidnappeur de la fille d’un seigneur local et celle d’un couple d’amoureux devant subir la tyrannie d’un souverain guerrier. Mais la véritable base de la série sera celle de la maison de Mme Sabu. Seul le lieu est commun aux trois histoires : le royaume de Su. Dans “Prototype”, Kim teon-joo nous raconte l’histoire dramatique de Myo-un et Ryusang. Avec un découpage à la “Pulp Fiction”, le mangaka va nous raconter un amour impossible mais en laissant énormément de zones d’ombre, nous obligeant à deviner par nous-même les raisons du comportement de Ryusang.
C’est une histoire d’amour et de haine mais dans un pays ressemblant à une Chine médiévale. Entre les deux amoureux, divers personnages vont influencer leur vie jusqu’à une fin tragique... qui sera comptée au milieu du manga. Et c’est justement le positionnement atypique de cet événement crucial qui va obliger le lecteur à s’interroger sur les raisons profondes qui ont fait agir Ryusang. Cette interrogation renforce la dramaturgie de l’œuvre. Kim Teon-joo use de la violence avec parcimonie préférant le non dit, les situations et créant une atmosphère à la fois tout en poésie mais aussi avec du suspense et de l’action. La vie des deux jeunes gens n’est pas celle de simples orphelins, la nouvelle sur Han-a démontre que ce sont aussi des guerriers.
Les dessins de “Nabi” sont aussi un atout fort pour rendre toute l’émotion de ces nouvelles. Ils associent un graphisme classique de manga, en y ajoutant une touche d’art coréen, à travers les décors, les costumes. Le mangaka joue énormément sur les gros plans, n’hésitant pas à aligner des planches en trois cases verticales ne représentant que les sentiments de ses personnages par leur visage. Si vous exécrez les grands yeux ronds, passez votre chemin, mais vous passerez aussi à côté d’une très belle œuvre, tout en finesse et en beauté. L’horreur semble absente visuellement même si elle plane comme une ombre au-dessus des différents destins racontés par Kim Teon-joo.
“Nabi, Prototype” mérite mieux que d’être considéré comme l’esquisse de la série “Nabi”, c’est une véritable œuvre à part entière qui peut pousser son lecteur à vouloir découvrir tous les mystères que cache la maison de Mme Sabu.
Nabi, Prototype
Auteur : Kim Teon-joo
Traducteur : Yeong-hee Lim et Françoise Nagel
Éditeur français : Kana
Collection : Made In
Format : 148 x 210, noir et blanc - sens de lecture original
Pagination : 176 pages
Date de parution : 15 janvier 2010
Prix : 8,50 €
Numéro ISBN : 2-5050-0753-1
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