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Derniers Jours d’Edgar Poe (Les)
Richard Comballot (dir.)
Éditions Glyphe, anthologie, 384 pages, octobre 2009, 21€

Au sommaire de cette anthologie-hommage à Edgar Allan Poe (l’un des plus grands ancêtres des mauvais genres...), des grands noms, des pointures ou des “débutants confirmés”...
Au final, une anthologie à deux vitesses, où le moyen (voire le très moyen...) frôle le meilleur.
Récit d’une lecture...



Je dois l’écrire ici tout de suite : je suis entré dans cette anthologie avec beaucoup d’attente.
Edgar Poe est, dans ma carrière de lecteur, un moment plus que très important : celui de la première découverte d’un fantastique vivant en même temps que mythique, d’un style tranchant et précis, d’une littérature qui ose plonger dans le bizarre (celui des mauvais genres, comme celui de la nature humaine...). Je crois que l’un des premiers gros pavés que j’ai avalés, c’est l’intégrale des contes, essais et poèmes d’Edgar Poe en collection Bouquins...
Aussi, c’est vraiment peu dire que j’attendais les auteurs de cette anthologie au tournant !

Passée une préface de quelques pages (et qui déjà partait mal pour moi, engluée qu’elle est dans la légende d’Edgar Poe plus que dans la biographie ou l’analyse : laissons les auteurs jouer avec la légende, pas le préfacier !...), je me jetais sur les nouvelles...
Le recueil s’organise en trois parties, dont je n’ai pas bien saisi les tenants et les aboutissants : Sur Poe / Sur ses œuvres / Sur sa mort ? Mais j’attaquais tout de même.

La première partie comporte 6 nouvelles : celle de Jess Kaan me laissait de marbre, surtout par sa fin peu amène. Celle de Jacques Mucchielli me fit me souvenir d’une discussion que j’ai pu avoir avec un ami écrivain : la forme seule ne fait pas une nouvelle ! Vraiment pas !
Le texte suivant, bien foutu, me réconcilia un peu avec l’anthologie, sans me faire crier au génie. Ce qui est bien avec un bon faiseur comme le trop rare Daniel Walther, c’est que même un petit texte comme le sien reste lisible avec plaisir.
Mais ni la nouvelle de Fabienne Leloup (une métaphore un peu trop lourdingue pour moi) ni celle de Léo Henry (sur une relativement bonne idée, un texte peu intéressant) n’aidèrent à me sentir bien dans ces pages.
Il a fallu un Jean-Pierre Andrevon pour livrer une très bonne nouvelle et me remettre en selle. Ce monde avec/sans Poe est très bien mené, intelligent et agréable à la lecture ! De loin le texte le plus intéressant de cette première partie.

Pour la deuxième partie de l’anthologie, on navigue au milieu de textes moins bons mais lisibles, mais surtout d’autres à mon avis aussi mal foutus qu’inintéressants (la palme revenant à “Les Amours de Ligeia et Morella”, de Tony Mark, où les deux héroïnes emblématiques de Poe s’envoient en l’air avec leur cousin... J’ai lu de mauvais lemon fanfics de meilleur qualité que ce texte ! Et mis à part les noms des deux protagonistes, et un ou deux clins d’œil, qu’est-ce que ce texte fait dans une anthologie célébrant Edgar Poe ?...).
J’étais donc arrivé à la page 230 (sur les 385 de l’antho), et je désespérais... Jusque là, quelques nouvelles surnageaient, oui, mais le niveau général m’enténébrait...
Et là, j’ai lu la nouvelle de Yael Assia : “Maneki-neko”.
Une claque.
Et le point de départ réel de mon intérêt pour l’anthologie !
Pensez donc, Edgar Poe s’est réincarné dans un chat qui “travaille” dans un bar à chat japonais (vous savez, ces bars à la mode où vous louez une demi-heure de ronronnement sur vos genoux en sirotant une quelconque boisson). Il se trouve que les humains viennent de découvrir le pot aux roses, le chat n’ayant pas supporté d’entendre un universitaire massacrer “The Raven”...
C’est drôle, intelligent, bien mené, bien écrit.
Soupir de soulagement.
Et ensuite, coup sur coup, arrivent Jérôme Noirez (Edgar Poe en star du rock, ça déménage, c’est jouissif, maitrisé et à lire de toute urgence), Catherine Dufour (même si l’artifice narratif est pour moi un peu bancal, la nouvelle est tellement superbe qu’on peut (presque) tout pardonner), Jean-Pierre Vernay (un conte magnifique à la Poe, avec des histoires entrelacées, l’un des chefs-d’œuvre de l’anthologie) et Jacques Barbéri (une histoire de réalités emboîtées, pas le meilleur texte que j’ai lu de cet auteur, mais foutrement sympa quand même !). Pour finir, la nouvelle de Christian Vila, éponyme du recueil, très sympa bien qu’un poil en dessous à mon avis (mais que faire après le feu d’artifice des auteurs précédents ?...) L’idée ? Ce qui importe, ce sont les trous de la biographie : c’est là que l’imaginaire puise sa vitalité...

Vous l’aurez compris, je vais avoir toutes les peines du monde à conclure cette chronique.

Je dirais que les deux premiers tiers de l’anthologie, même s’ils possèdent de bons, voire très bons textes (celui d’Andrevon, de Mauméjean, dans une moindre mesure ceux de Walther et de Stolze), n’a rien à voir avec le dernier tiers, dans lequel, littéralement, rien n’est à jeter. Du tout.
Du coup, peut-être que l’anthologie aurait gagné à être un peu plus courte, et plus exigeante envers ses auteurs. Plus drastique dans ses choix.

Mais quelques-uns de ces textes restent quand même parmi les meilleurs que j’ai pu lire cette année, et rien que pour ceux-là, je vous encourage à acheter l’anthologie (et vous êtes autorisés à passer les nouvelles qui vous em**ent...)
Bonne lecture !


Titre : Les Derniers Jours d’Edgar Poe (nouvelles, anthologie)
Direction de l’anthologie : Richard Comballot
Auteurs (par ordre d’apparition) : Jess Kaan, Jacques Mucchielli, Daniel Walther, Fabienne Leloup, Léo Henry, Jean-Pierre Andrevon, Claude Mamier, Tony Mark, Pierre Stolze, Michel Lamart, Xavier Mauméjean, Christian Léourier, Alain Dartevelle, Timothée Rey, Yael Assia, Jérôme Noirez, Catherine Dufour, Jean-Pierre Vernay, Jacques Barbéri, Christian Vilà
Éditeur : Éditions Glyphe
Site internet : fiche du recueil
Illustrateur : Fabien Fernandez
Pages : 384
Format (en cm) : 24 x 16
Dépôt légal : octobre 2009
ISBN : 978-2-35285-066-3
Prix : 21 €



Jérôme Charlet
9 mars 2010


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