Un « thriller ésotérique » de plus parmi tous ceux qui encombrent les étagères ?
Oui… et non, car celui-ci est autrement plus soigné que les efforts laborieux des tâcherons de service.

D’abord, au moins, l’écriture claire et limpide est soutenue, avec une compréhension directe des enjeux, et les scènes d’action digne d’un film à gros budget découlent de l’intrigue au lieu de la ralentir ; de même, on nous épargne le « love interest » de rigueur. L’auteur semble avoir une bonne connaissance des pays qu’il décrit et de leur culture : on sent dans certaine pages un vécu de l’intérieur bien loin des tâcherons précités qui semblent se contenter d’un coup de “google map” (voire des légendaires cartes surréalistes de CNN !).
Ensuite, si le savant fou de service est un méchant d’une stature assez imposante pour soutenir le roman (on regrette juste que sa fin relève d’un cliché hollywoodien éculé), les zones d’ombres demeurent : l’agent de la CIA n’est pas un surhomme paré de tous les attributs de la justice la plus expéditive et les motivations sont plus nébuleuses que le manichéisme bas du front.

Alors, est-ce un simple roman populaire opportuniste juste mieux fichu que la moyenne ? Non, car il offre tout de même une valeur ajoutée : des passages historiques démontrent, documentation à l’appui, que les avancées dont notre ère est si fière ont souvent leurs racines dans les découvertes de temps révolus vite taxées d’obscurantistes et, oui, même dans cette fameuse alchimie qui est la tarte à la crème de ce genre de fiction, dont on nous explique l’étymologie. Un rappel bienvenu dans un monde prétendument moderne qui nie sa propre histoire, semble considérer qu’il n’y avait rien avant la télévision et le SMS et qui préfère protéger le pétrole (nouveau veau d’or s’il en est) plutôt que le patrimoine de l’humanité…

Une vision qui tranche sur les discours haineux anti-science, voire anti-culture actuels chers aux bobeaufs, mais au final, si la réflexion sur la fin par rapport aux moyens appliquée à la science est vieille comme le monde, l’apologie en forme de merveilleux scientifique de la lutte à tout prix contre le vieillissement tourne court, puisque l’auteur en élude soigneusement ses conséquences dans un monde soumis à la surpopulation !
Comme quoi, on peut lui retourner son propre argument… Niveau défauts, on reprochera également un développement des personnages plus que sommaire.

Simple scorie pour un roman qui n’a rien d’un essai philosophico-scientifique. On tient donc un solide récit d’aventure mieux écrit que la moyenne (et bien traduit), qui ne se moque pas du lecteur et qui a deux ou trois neurones de plus que la drouille qui encombre les étals.
De nos jours, c’est déjà pas mal…

Titre : Eternalis (The Sanctuary, 2007)
Auteur : Raymond Khoury
Traduction de l’anglais (Etats-Unis) : Jacques-Hubert Martinez
Couverture : Raymond Depardon/Magnum Photos
Éditeur : Pocket
Collection : Thriller
Première édition française : Presses de la Cité (nov. 2008)
Site internet : fiche roman (site éditeur Pocket), fiche roman (site éditeur, Presses de la Cité)
Pages : 568
Format (en cm) : 11 x 17,7 (poche, broché)
Dépôt légal : octobre 2009
ISBN : 978-2-266-19339-9
Prix : 8,10 €