Dès les premières pages, on en prend plein la vue. Les cases en couleur directe sont vraiment belles, les effets de lumière, saisissants.
On oublie que l’on tient entre les mains une BD produite en série pour savourer un album que l’illustrateur a visiblement pris plaisir à faire. Il est à nouveau prouvé que les traits du pinceau traditionnel donnent une chaleur et une beauté particulières aux pages.
Bien sûr, outre l’aspect purement technique, les images ne seraient pas ce qu’elles sont sans le talent de Paolo Grella qui, en plus de cette mise en couleur sublime, a su créer des paysages enchanteurs et des personnages captivants. Le trait est habile et dynamique, les protagonistes bien plantés dans leurs caractères.
Pour ne rien gâter, le récit embarque immédiatement. Une fois commencé, difficile de décrocher. On se prend très vite à l’intrigue, qui, si elle possède quelques côtés attendus, est riche et plaisante. Elle est composée d’un fond de mystique sur lequel se greffe une aventure digne d’Indiana Jones, menée par des personnages hauts en couleur et attachants.
Au niveau du contexte, un petit élément est à noter. La situation dans ce Tibet des années 50 n’est pas sans faire écho à certaines de nos actualités. Si c’était bien là son intention, l’auteur est parvenu à faire passer son message sans trop forcer, ce qui rajoute une dimension supplémentaire à la trame.
En deux albums, l’histoire a si bien avancé qu’on a l’impression qu’elle est presque achevée. Son rythme est bien géré, tant et si bien qu’on a non seulement le temps de suivre une aventure sans temps mort mais aussi celui de s’attacher aux personnages.
Que ce soit dans les luttes mystico-politiques comme dans les relations sociales, le récit sonne juste et chaque partie s’imbrique proprement dans l’ensemble. On passe un très bon moment de divertissement, un temps où l’on peut se permettre de suivre une aventure sans se prendre la tête et où on a qu’à se laisser guider par un scénario intéressant et un dessin superbe.
Vous l’aurez compris, vivement le tome 3 !
Myriam Bouchet
Trouver un manuscrit qui révolutionne les Saintes Écritures et met le feu aux institutions religieuses. Voilà un petit jeu scénaristique auquel s’adonnent depuis quelques années les scénaristes de tout crin, avec pour exemples réussis en bande dessinée « le Triangle secret » ou « le Décalogue ».
Cette fois, c’est au Tibet, à Lhassa, que l’anthropologue américain Egon Bauer découvre un manuscrit qui pourrait tout bonnement remettre en question le principe même de la résurrection du Christ. Et oui, Jésus-Christ aurait vécu au Tibet de l’âge de dix-sept à trente ans, sous le nom de Yus-Asaf !
Vite, le scientifique se retrouve pourchassé par des officiers de l’armée chinoise et les fameux Hommes en noir opposés à toute nouvelle interprétation des Saintes-Écritures. Un cocktail de raisons très opposées qu’il suffit d’agiter un peu pour le rendre explosif !
Pour développer cette histoire qui se joue en pleine guerre froide, durant les années 1950, deux auteurs italiens, Roberto Dal Pra’ et Paolo Grella. Le premier est grand connaisseur des mécanismes narratifs du cinéma et passionné du genre policier. Pour “Le Manuscrit Interdit”, il s’appuie sur une incroyable thèse défendue en 1887 par Nicolas Notovitch, un correspondant de guerre russe qui prétendait avoir découvert à Lhassa des textes anciens en langue pali relatant des épisodes de la vie de Jésus au Tibet. Une thèse encore soutenue aujourd’hui sur laquelle le scénariste construit un thriller entre mythe et histoire.
Pour cette extraordinaire enquête, la bande-image est déclinée par Paolo Grella, un jeune dessinateur dont le talent est tout bonnement ici époustouflant. Une bonne histoire servie par un excellent casting de personnages, un dessinateur qui sait superbement mettre en couleur son très beau dessin, voilà de quoi positionner cette série parmi celles à ne pas louper.
Un plaisir double puisque Delcourt sort en même temps les T1 et T2.
Une bonne raison à cela : le premier était paru sous le titre « L’Ombre du temps » chez Robert Laffont et revient avec une nouvelle couverture, le second est lui inédit. Le changement de titre vise certainement à une efficacité commerciale plus évidente dans les traces du “Da Vinci Code”. Et le poids d’un tel éditeur va permettre à l’œuvre de cette doublette italienne inspirée d’être beaucoup mieux distribuée. “Le Manuscrit Interdit” le mérite amplement.
Fabrice Leduc
Le Manuscrit Interdit Volume 1 et 2
Scénario : Roberto Dal Pra’
Dessin et couleur : Paolo Grella
Éditions : Delcourt
Collection : Machination
Dépôt légal : juin 2009
Format : 16,7 x 25,7 cm
Pagination : 56 pages couleur
ISBN : Tome 1 : 978-2-7560-1885-0 ; Tome 2 : 978-2-7560-1884-3
Prix public : 13,95€
Illustrations © Paolo Grella et Delcourt Productions (2009)