Ce roman est annoncé comme le préquel à « La Cité de l’Ombre » , le livre de Jeanne DuPrau adapté récemment au cinéma et présentant un monde plongé dans les ténèbres sous la terre pour une raison mystérieuse que vont découvrir trois enfants intrépides. D’un point de vue temporel, c’est vrai, « L’oracle de Yonwood » se situe juste avant que les hommes décident de cacher certains d’entre eux afin de les préserver de la destruction ayant eu lieu à la surface. Mais le lien n’apparaît qu’à la fin de l’ouvrage et n’a même pas de rapport avec les personnages de « La Cité de l’Ombre ». « L’Oracle de Yonwood » se lit indépendamment des autres livres sans problème. Cela donne l’impression d’un coup médiatique un peu mesquin. Autant dire que la déception est à la hauteur lorsqu’on atteint les dernières lignes.

Ceci étant dit, passons au roman en tant que tel.
Amateurs d’action, d’adrénaline, de suspense intense, passez votre chemin, le rythme est très lent. Jeanne DuPrau s’est lancée dans une chronique de province. L’avancée d’un petit village au milieu d’une histoire qui lui paraît lointaine et qui pourtant influe sur ses actions. La guerre approche, elle n’existe que par informations interposées mais elle rôde, prête à s’abattre et à modifier la face du monde. A Yonwood, il s’agit de survivre dans le cadre de son propre système de vie. Une vie rythmée par le travail des uns et des autres, les visites chez les commerçants et surtout les prédictions de l’Oracle. Des prédictions interprétées par une femme seule et aigrie qui tombe dans un système coercitif construit sur la peur de l’avenir. Tout cela au travers des yeux d’une jeune fille extérieure et influençable. Evidemment, cela va tourner à l’absurdité des humains dans le désarroi qui aiment suivre aveuglément des directives rassurantes. Mais jusqu’où ?

Comment faire la part entre le bien et le mal ? Ne fait-on pas le mal parfois en pensant faire le bien ? A-t-on le droit de prendre des décisions pour tous de son propre chef ? Quelles sont les responsabilités de chacun ? Doit-on suivre aveuglément un bonimenteur juste parce que la peur nous l’ordonne ? Quid du libre arbitre ?
Autant de questions qui sont amenées tranquillement au fil des pages, sans heurts, par petites touches. On se croirait dans ces chroniques à la Stephen King où l’enfance est au centre de tout et va servir de révélateur à la cruauté du monde car les adultes sont devenus aveugles.
Les personnages se parlent beaucoup, se promènent, découvrent des choses sans en faire trop cas. Il n’y a pas vraiment de rebondissements extraordinaires et pourtant on suit l’histoire. L’écriture fluide de Jeanne DuPrau y est sans doute pour beaucoup. Les chapitres coulent les uns après les autres, les éléments du puzzle se posent et on aboutit, non pas à une révélation fabuleuse, mais juste à un nouveau pas dans le futur pour toute une population.
La vie avance, elle offre ses opportunités ainsi que ses difficultés et les gens réagissent. Chacun à sa manière, selon son ressenti, son caractère, choisissant ainsi son propre destin, parfois malgré soi.

« L’Oracle de Yonwood » est une tranche de la vie de personnages simples dans une histoire mouvementée. Un petit bout de parcours humain.
Sans prétention.

Titre : Oracle de Yonwood (L’)
Auteur : Jeanne DuPrau
Traducteur : Julien Ramel
Éditeur : Gallimard Jeunesse
Collection : Folio Junior
Couverture : Pierre-Marie Valat
Nombre de pages : 308
Dépôt légal : mars 2009
Format : 12,4x17,8 cm
ISBN : 978-2070614530
Prix : 6,50 euros