C’est toujours un immense plaisir de plonger et replonger dans les mondes imaginés par Julia Verlanger.
Son écriture précise et enlevée, populaire sans être tarte, avec ce grand sens du détail exotique et de l’action, nous emmène loin, très loin. Et au final, son seul sujet, n’est-ce pas juste nous, les humains ?
Les quatre romans qui sont proposés dans ce troisième tome de l’intégrale en sont la preuve. Excellents space-opera (et même avec une franche tendance planet-opera), ils nous mettent aux prises avec des mondes plus ou moins développés, aux relents médiévaux prégnants. Roland C. Wagner a tout a fait raison, dans sa postface, d’invoquer l’ombre luxuriante du grand Jack Vance à leur sujet : ils pétillent d’imagination et de trouvailles incroyables.

Pourtant, les intrigues n’ont rien de révolutionnaire.
Rejeté par sa société archaïque, Jalen, le héros de « La Croix des Décastés », va découvrir le trafic orchestré sur sa planète par quelque envoyé de la Terre sans scrupule.
Dans « Les Voix d’Almagiel », c’est Jatred qui, en sauvant un homme de la noyade, va être projeté dans une intrigue politique à l’échelle de l’univers, avec son propre monde comme enjeu considérable.
Point de vue inversé avec « L’Ange aux Ailes de Lumière », puisque c’est maintenant un jeune ambassadeur sur une planète primitive qui va découvrir combien la place de l’humain dans l’univers n’est pas si évidente et raffinée qu’il veut bien le croire.
Et dans le joyau du recueil (malgré une fin à la deus ex machina, dictée par le nombre de signes limité des Fleuve Noir Anticipation), « D’Un Lieu Lointain Nommé Soltrois », c’est toute une société de type médiéval qui fait le lourd apprentissage de la différence, et du rôle qu’y joue la couleur de la peau.

Eh oui : pourtant ces quatre space-opera sont tous parmi mes meilleures lectures depuis que je lis. Inventifs et subtilement intelligents, d’un réel pessimisme quant à l’espèce humaine entremêlé avec un bel optimiste quant à l’individu, les figures que Julia Verlanger nous donne à lire nous permettent de « réfléchir en s’amusant » (pour suivre le slogan du magazine Pilote).
C’est un peu ce que propose Roland C. Wagner dans sa postface, qui, bien qu’un peu factuelle, nous permet de bien situer la place particulière de Gilles Thomas / Julia Verlanger dans l’histoire du Fleuve Noir.
C’est aussi l’analyse d’André-François Ruaud dans ses très bonnes “Notes éparses pour une étude de l’œuvre de Gilles Thomas”, et son concept de “Narcisse révolté”.
C’est ce que nous disait merveilleusement bien Xavier Dollo dans la postface du précédent volume.
Vous l’aurez compris, si vous ne connaissez pas Julia Verlanger, la publication de cette intégrale est l’occasion de plonger dans l’œuvre d’une grande plume qui fait mentir ceux qui pensent que “populaire” est le contraire d’intelligent...

Titre : Dans Les Mondes Barbares (intégrale 3)
Auteur : Julia Verlanger
Couverture : Benjamin Carré
Editeur : Bragelonne
Site internet : fiche du recueil
Collection : Les Trésors de la SF
Pages : 564
Format (en cm) : 24 x 15,5
Dépôt légal : 19 juin 2009
ISBN : 2352943132
Prix : 25 €

Chronique du tome 1 de l’intégrale, par Hervé Thiellement