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Enfants du Mandarin (les)
André Caroff
Black Coat Press, Rivière Blanche, n°2035, roman (France), anticipation, 253 pages, juillet 2007, 17€

Le Plus Grand Mandarin de tous les Grands Mandarins David est mort, laissant la place à son fils, Roy. Celui-ci poursuit dans la voie tracée par son père et lutte contre les Oppos, patrons du nouveau Grand Capitalisme qui opprime les ouvriers. Mais les incessantes révoltes fomentées par ces encapuchonnés, soutenus par Oxima de Serpent, ainsi que les fréquentes tentatives d’assassinat finiront par avoir la peau du Mandarin.

Sa fille Julia devient la nouvelle Mandarine (personne ne rit, merci), soutenue par Sun Song, un chinois ami de son père. Plus radicale que son père, elle décide de ne pas rester stoïque et mène la guerre dans le camp oximien, personnellement, au péril de sa vie.



Cette suite de « La Couronne de Fer » se divise en deux parties. Après un prologue qui vous résumera les faits du précédent volume, commence “Le Fils du Mandarin” (pages 9 à 119), racontant le règne de Roy, ses pérégrinations avec son épouse vers les terres australes et les cataclysmes qui secouent son empire.
Un tremblement de terre vient notamment réduire à néant le renouveau de la civilisation. Tout est à reconstruire à New-Shanghai. Pire encore, les Oximiens provoquent un autre séisme qui arrache à la Terre un quart de sa matière, façon quartier d’orange, qui se détache et commence à se satelliser. Amis de la science et de la logique, passez votre chemin, ce passage-là, pourtant crucial pour la suite du récit, est assez incompréhensible.

Mais d’autres périls guettent : les grands patrons d’industrie, formant l’opposition, se réunissent tout encagoulés et complotent contre l’épouse du Mandarin : la dynastie doit s’éteindre, afin d’instaurer la démocratie, et l’élection d’un président partisan du capitalisme (tant qu’à faire). Car le monde a vite repris ses mauvaises habitudes, en dépit des efforts des Mandarins, le système des actionnaires est de nouveau là.
Donc on envoie des assassins, notamment une jeune et jolie femme, qui veut devenir Mandarine à la place de la Mandarine. Pour ne pas attirer l’attention, elle séduit un garde de la sécurité. Ce sera l’occasion de multiples parties de jambes en l’air, d’autant que la demoiselle est plutôt insatiable et profite de ses rapports à Oppo Un pour se faire un petit plaisir pour la route. Amis de la nymphomanie, vous êtes les bienvenus.
Mais bon, malgré tout, l’amour l’emporte, elle choisira, plutôt que la mort, de devenir agent double et aide à démanteler les Oppos. Mais entretemps, ceux-ci sont parvenus à leur but, Roy a été mortellement blessé lors d’une révolte populaire. La paix est revenue, grâce au contingent chinois mené par Sun Song, fidèle à Roy. Ce dernier meurt en confiant sa fille Julia au Chinois.

Et donc logiquement, page 121, nous passons à “Julia, farouche Mandarine”. Si cette seconde partie est l’occasion d’approfondir quelques détails sociaux et technologiques, notamment la mixité raciale (après 2-3 générations, la population est déjà bien mélangée, comme si le cataclysme avait mis fin au raciste et encouragé les mariages mixtes, au profit des Chinois et des Noirs) et l’état de l’équipement (on remet doucement l’électricité, suite au séisme qui avait détruit la ville). C’est l’occasion de nouvelles incohérences et raccourcis faciles (on s’interrogera sur la présence de goudron mais l’absence de pétrole, la résurgence de normes antisismiques plus ou moins efficaces selon à qui appartient la maison, le système d’actionnaires alors que les Mandarins ont sévèrement lutté contre l’inégalité). Bref, malgré tous les efforts de chacun, c’est le retour au XXIe siècle, le début de la décadence, la misère des uns fait la richesse des autres… Le temps est aussi malmené, mais on en avait l’habitude.

Le seul pouvoir intemporel

Les Oximiens sont de retour. Après un pacte passé avec les Oppos, désormais menés d’une poigne de fer par Karin, une femme sévère, trois nouveaux assassins vont se succéder :
- Elios, un Oximien très porté sur la chose qui fera gémir Karin comme elle ne l’aurait jamais imaginé (amis de la domination, bonjour), et séduira une infirmière avec la même efficacité pour approcher sa cible ;
- Mira, une cyborg ultra-sexy capable de séduire homme ou femme d’un battement de cils et dont le baiser est mortel. Elle entre comme masseuse au Palais, je vous laisse imaginer comment elle gravit les échelons… Comme elle est robotisée, elle ne ressent ni plaisir ni douleur, et est auto-nettoyante. Amis des fantasmes masculins pervers, on vous attendait ;
- Livio, un Terrien renégat élevé sur Oxima, qui lui non plus ne se laissera pas miner par sa mission au point de ne pas profiter des beautés locales…
Et je vous passe les subterfuges de Karin, obligée aux pires bassesses pour échapper aux contrôles de police…
Mais laissons de côté tout cela, pour revenir à Julia. Suite aux tentatives d’assassinat, elle décide d’employer un virus récemment redécouvert pour éliminer la colonie oximienne installée dans les montagnes. Malgré une courte pensée pour les femmes et les enfants, sa main ne tremble pas. Malheureusement, elle est capturée, et sert de monnaie d’échange. Les Oximiens s’arrogent la moitié de la planète (plus le quart qu’ils ont déjà mis en orbite), et tracent une frontière désintégrante entre leur pays et celui des terriens.

Un volume double riche en action, et très riche en sexe. Les écueils évités dans le précédent volume sont ici gros comme le Mont-Saint-Michel. On a parfois l’impression de lire un roman érotique, avec des fantasmes très masculins de séduction facile et de domination totale des partenaires toutes plus pulpeuses et soumises les unes que les autres. Le choix cornélien de Lola dans la première partie (dois-je choisir l’agent de sécurité qui m’aime tendrement et passionnément, et devenir un agent double, ou bien rester fidèle à Oppo Un qui me fait des choses (que la décence m’empêche d’écrire ici) qui me font grimper aux rideaux, et mourir pour sa cause ? Dur…) n’est que le prologue des innombrables scènes sexuelles qui vont suivre. Je sais que la SF est un domaine majoritairement masculin, mais la véritable science-fiction de tout cela est de croire qu’il existe de tels étalons et nymphomanes à chaque coin de rue.

Des esquisses intéressantes

On ne regrettera d’autant plus que les thèmes qui sous-tendent le récit ne sont pas inintéressants. Les Oximiens, qui ont le mauvais rôle (et que leur appétit sexuel très humain ne tend pas à rendre plus sympathiques), dévoilent plus en détails les raisons de leur présence. Leur planète, polluée, se meurt, et eux aussi faute d’oxygène. Tout cela revient donc à une simple guerre de territoire. On les sent prêts à accepter le compromis d’une cohabitation, mais aussi l’envie de tout raser à coups de désintégrateurs. Néanmoins, quitter une planète polluée pour vivre sur un champ de ruines…
Un consensus aurait peut-être été possible, s’ils se montraient moins gourmands en terres et moins supérieurs aux hommes. Mais cela aurait été une toute autre histoire…
De même, le geste extrême de Julia (empoisonner la nourriture des colons) est un acte aux graves conséquences morales.

On retiendra donc de « Les Enfants du Mandarin » la suite logique d’une tentative d’utopie : les plus bas instincts de l’homme reprennent le dessus, les forts exploitent (physiquement et économiquement) les faibles, la justice demande un minimum de violence pour être crainte, et qui veut la paix prépare la guerre.
Et surtout, tout est sexuel. En tout cas, il paraît que ça fait vendre.

Le nombre de coquilles n’est hélas pas en baisse (aux alentours de 200) et, au-delà de la compréhension de certains passages, la lecture reste douloureuse pour les yeux.

À noter que la suite paraîtra prochainement sous le titre « Sun Song le Mandarin ».


Titre : Les enfants du Madarin (France, 2007)
Auteur : André Caroff
Conseiller à la rédaction : Serge Parmentier
Couverture : Christine Clavel
Editeur : Black Coat Press / Rivière Blanche
Site Internet : fiche du roman
Collection : Rivière Blanche
Directeur de collection : Philippe Ward
Numéro : 2035
Pages : 253
Format (en cm) : 20,4 x 12,7 x 1,7
Dépôt légal : juillet 2007
ISBN-13 : 978-1-932983-86-9
Prix : 17€



Nicolas Soffray
13 avril 2009


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