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Roma Æterna
Robert Silverberg
Le Livre de Poche, Science-fiction, roman (États-Unis), traduction de l’américain, uchronie, 544 pages, février 2009, 6,95€

Et si l’Empire romain existait encore de nos jours !
Rien que cette phrase classe déjà ce roman de Robert Silverberg parmi les uchronies.
Une déviation dans le passé que nous connaissons entraîne de grands bouleversements et une histoire parallèle en découle. Notre présent n’existe plus, remplacé par une autre réalité, située dans un autre continuum.
Dans « Roma Æterna », les Hébreux d’Égypte, conduits par Moïse, n’ont jamais réussi à franchir la Mer Rouge. Les troupes du pharaon les ont rattrapés avant et massacrés. Les rares survivants ont été réduits en esclavage. Cet échec de l’Exode empêche la naissance du christianisme. La puissance de Rome ne sera donc pas affaiblie et la Pax Romana pourra régner.



Né en 1935 à New-York, Robert Silverberg est un géant de la science-fiction. Pour tout amateur du genre, son nom est incontournable et synonyme de nombreux chefs-d’œuvre : « L’Homme dans le Labyrinthe », « Les Monades Urbaines », « L’Oreille Interne », le cycle de « Majipoor »…
Dans « La Porte des Mondes », l’écrivain répondait déjà à l’hypothèse : “Et si…”.

« Roma Æterna » est une vraie uchronie. En effet, notre présent n’existe plus, il est tout autre et obéit à un passé différent. Souvent steampunk et uchronie sont confondus. Pourtant, le premier s’insère dans l’Histoire, en éclaire des pans obscurs et ne change pas forcément la période actuelle.
Pour les curieux ou ceux qui aiment ce type de récits, la lecture du dossier “L’uchronie, renouveau de la SF ?” leur permettra d’en apprendre plus sur le sujet.

Dès le prologue, Silverberg situe la déviation dans notre Histoire. Un historien imagine comment le monde aurait évolué si les Hébreux avaient réussi à rejoindre leur terre promise. Sa vision obéit à notre réalité et on ne peut s’empêcher de faire le parallèle avec « Le Maître du Haut-Château » de Philip K. Dick.
Robert Silverberg développe « Roma Æterna » de 1203 A.U.C (Ab Urbe Condita : depuis la fondation de la ville de Rome) jusqu’en 2723 A.U.C, correspondant environ à notre année 1970.
Une dizaine de tableaux, plus ou moins espacés dans le temps, ciblent certains changements et expliquent pourquoi l’Empire romain n’a pas périclité. Il est si vaste qu’à un moment décision a été prise de le scinder en deux : l’Empire d’Orient, administré par la ville de Constantinopolis et sous la domination des Grecs, et l’Empire d’Occident sous l’emprise de Rome et des Romains. Un Empire romain à deux têtes !
La folie des grandeurs d’un César, qui veut à tout prix conquérir le nouveau monde pour en faire la Nova Roma, va d’ailleurs entraîner le déclin de son empire et laisser juste un temps les Grecs en prendre les rênes. Mais comme l’explique le proconsul Pompeus Falco à Dame Eudoxia, la destinée des Romains est de dominer le monde.
La figure de l’Empereur est immuable, chaque successeur est le César, quelles que soient ses capacités à exercer le pouvoir. La faiblesse ou la folie de certains mettent à mal la mainmise de Rome sur ses conquêtes, l’affaiblissent, mais, de guerres en crises politiques, l’Empire romain ne cesse d’exister.
Même après un millénaire, peu de changements dans le quotidien nous sautent aux yeux, car la Pax Romana étouffe finalement toute rébellion, toute volonté d’évolution.
Certaines similitudes apparaissent avec notre Histoire, mais pas toujours à la même période, ou leur sort diffère. Par exemple : un dignitaire romain est exilé à la Mecque et élimine un futur prophète.
L’écrivain nous présente de beaux fragments d’Histoire parallèle et de belles surprises. La fin est particulièrement bien tournée !
Entre nostalgie, complots, bêtise d’un homme et horreurs pour l’intérêt de l’Empire, chaque partie nous réserve son lot d’images fortes.
Mais trop en dire de « Roma Æterna » serait un peu gâcher au lecteur le plaisir et l’émerveillement de la découverte, alors sachez que Robert Silverberg mène parfaitement ce projet à bien et réussit à rendre ce monde alternatif crédible.

Un roman à lire et à conserver précieusement à côté de « Pavane » de Keith Roberts, un classique de l’uchronie que « Roma Æterna » est appelé à rejoindre.

- Voir aussi sur Yozone l’avis de Bruno Peeters (édition Robert Laffont).



Titre : Roma Æterna (Roma Æterna, 2003)
Auteur : Robert Silverberg
Première publication française : Robert Laffont Ailleurs & Demain
Autre critique Yozone : première édition
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Jean-Marc Chambon
Couverture (souple) : Jackie Paternoster
Éditeur : Le Livre de Poche
Collection : Science-fiction
Directeur de collection : Gérard Klein
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 544
Format (en cm) : 17,8 x 11
Dépôt légal : février 2009
ISBN : 978-2-253-08988-9
Prix : 6,95 €



François Schnebelen
13 mars 2009


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Illustration de Jackie Paternoster



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