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Des poncifs et des longueurs, mais bon…
La porte de bronze de Bernard Simonay
Délices & Daubes n° 109


Cette semaine j’ai fait une expérience. J’ai acheté et découvert de la SF de notre beau pays, oui monsieur, ni jeune ni moderne, qui a gagné un prix Julia Verlanger et qui se fait ré éditer par Folio SF : j’ai nommé “La porte de bronze”, roman en quatre parties et un épilogue de Bernard (en voiture) Simonay, dont j’ignorais tout jusqu’à cette emplette (chez Djib le Djeune pour être précis).

Que voilà un étrange objet, plein de qualités et de défauts. Un truc humain ? Est-ce possible ?
Il faut, dès le début, s’accrocher pour résister à l’avalanche de tous les poncifs et tics langagiers. L’angoisse est toujours sourde, le torrent tumultueux, qui charrie des cailloux ou des pépites. Le catalogue est quasi complet, il n’y a pas un nom ou un verbe qui ne soit pas associé à son adjectif ou à son complément habituel préféré. Franchement, ça fait drôle ce systématisme. Mais, encore plus étrangement, on continue la lecture de ces presque 500 pages. Pourquoi est la question.

Parce que, tente-je de répondre, plusieurs niveaux d’intérêt sont suscités qui titillent le lecteur alpha, lambda ou omega. Des îles entières disparaissent, pffuitt. Et les gens aussi, qui “s’effacent” au lieu de mourir et pourrir comme tout le monde.
La trop belle Ele’a, qui vit d’amour et de pêche dans les îles, danseuse extraordinaire aux seins nus (c’est une constante du livre, nudité = liberté), adore son Darys qui s’efface peu après la venue du mystérieux Ykhare, maître du monde.
Après la vie idyllique dans les îles et dans l’eau, Ele’a va à la ville, s’habille et fait copine avec une licorne, mais ne sait trop que penser du maître qui la gâte mais qui pourrait être responsable de la mort de son chéri.
Soudain elle s’enfuit avec sa licorne, traverse les déserts et les neiges, fait la princesse chez les sauvages, se fait reprendre par Ykhare. Les parties deux et trois sont longuettes : il y a trop de descriptions détaillées à l’extrême de cette planète peu originale qui ressemble à la Terre, avec d’infimes variantes dans la flore et la faune (des licornes et des yaks géants) mais plus d’invention dans les us et coutumes des peuples isolés.
Mais qui est cet étrange nain à chapeau pointu ?
Et les bizarreries sur les pouvoirs de la dame intriguent. Ele’a sait se servir d’un télescope ou d’un “computeur” en une leçon, apprend une langue étrangère en dix jours, etc.

Ce qui fait qu’on va jusqu’au bout tient sans doute aussi de la philosophie qui se dégage du livre : qu’il est bon de vivre sans entraves sous les cocotiers, à fumer du tabac aux herbes et à boire des coups. Si guerres et armes n’existaient pas… Un monde sans violence et donc sans armée ni police serait possible ? Faut-il croire que les dieux existent ?

Tout s’explique et se résout à la fin, comme dans un bon vieux Stefan Wul, mais avec 250 pages de plus.
On a changé d’époque. Le « plus c’est long, plus c’est bon », parfaitement justifiable dans les affaires intimes, devient également l’apanage de la littérature contemporaine. À croire que les droits d’auteur sont proportionnels au nombre de pages. Ou que le chaland qui achète un livre aujourd’hui souhaite que ça dure plus longtemps qu’hier.
Ou pas.


Henri Bademoude
22 juin 2008


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