Parfois, un roman, une aventure vous laisse pantois par la grâce que le récit déploie. Et l’on se retrouve sans voix, sans moyen, totalement démuni à communiquer sa passion.
Malheureusement pour Timothée de Fombelle, j’ai dévoré ce second opus des aventures du minuscule Tobie encore plus vite que son premier tome (« La Vie Suspendue ») et je me suis détruit les neurones en cherchant un moyen convenable de lui rendre justice...
Avaler et digérer l’aventure proposée n’était pas suffisant. Il fallait que le temps passe.

Finement ciselé, ce roman s’adresse à tous les publics même s’il est destiné officiellement aux « Jeunes ». Décrivant simplement des émotions ou des choses compliquées (l’amour, l’amitié, la fidélité, le racisme, la liberté, etc), il dresse un constat sans concession de l’état de notre monde. Car parabole il y a.
Le grand chêne et ses problèmes écologiques, industriels, sociaux et politiques ressemblent beaucoup à notre bonne vieille planète. Mais un message d’espoir transparaît. Il faut croire en ses idées, lutter pour elles si nécessaire, mais aussi les partager et savoir diffuser la bonté et la joie autour de soi pour arriver à quelque chose. Alors tout devient possible, réalisable et c’est merveilleux.

Néanmoins, là où Timothée de Fombelle étonne, surprend et séduit, c’est que le fond du roman n’en détruit pas la forme. On savoure une belle aventure, pleine d’ingéniosité, vive, énergique, triste et mélancolique aussi. On escalade des montagnes, on se cache dans les arbres, on fuit devant quelques ennemis, on croque la vie à pleines dents. Joies, souffrances, passions, trahisons, le registre est très étendu mais certainement pas confus. l’univers imaginaire proposé est d’une logique implacable, le rêve palpable et crédible.
Plusieurs séquences sont stylistiquement superbement écrites. Les phrases courtes s’enchaînement avec une grande fluidité, un vocabulaire précis mais aussi complexe est rendu aisément compréhensible, une vraie poésie émerge et émeut. Quant aux vignettes et dessins de François Place, le trait sensible semblent donner vie aux personnages.

Au final, on referme l’ouvrage avec une petite larme à l’œil, empli de tendresse pour les autres, ceux que l’on aime, ceux que l’on respecte et on ne sait plus trop quoi penser d’autre. On est bien. Heureux de savoir lire et fier de ne pas avoir perdu son temps en vains mots et petites histoires à deux balles.

Alors, on prend ces « Yeux d’Elisha » et on le range dans sa bibliothèque à côté du précédent volume (« La Vie Suspendue »), au bon endroit, là où trônent les livres auxquels on tient vraiment. Ceux dont les mots nous accompagnent jusqu’à notre dernier souffle, ceux dont les émotions créées par un écrivain nous ont rendu plus forts ou moins bêtes.

Pas moins. Coup de cœur littéraire.

Titre : Les Yeux d’Elisha
Série : Tobie Lolness (tome 2)
Premier tome : La Vie Suspendue (Grand prix de l’Imaginaire, catégorie Jeunesse 2006, Utopiales de Nantes).
Auteur : Timothée de Fombelle
Couverture et illustration : François Place
Editeur : Gallimard
Collection : Gallimard-Jeunesse - Hors Collection
Site Internet : http://www.gallimard-jeunesse.fr - Fiche série
Pages : 352
Format (en cm) : 16 x 2,5 x 24 (broché)
Dépôt légal : avril 2007
Code distributeur : A57893
ISBN : 978-2-07-057893-1
Prix : 16€