Jeune femme aux talents de baroudeuse évidents, Franka n’a pas froid aux yeux et n’hésite pas à risquer le coup de poing. Croisement idéal d’une jolie pin-up avec une demoiselle très libérée, l’héroïne propose un portrait féministe assez décalé dans l’univers de la BD.
Certes, on pense à Natacha pour le petit côté mode et charmeur ou à “Yoko Tsuno” pour le contenu fantastico-policier de l’aventure proposée, mais Franka a un petit quelque chose en plus !
C’est qu’au-delà du glamour surgit une nana totalement émancipée, indépendante et résolument femme jusqu’au bout des ongles. Loin du fantasme masculin type personnel aérien ou toubib des causes humanitaires perdues, Franka vit et agit en toute décontraction.
Elle a de l’énergie à en revendre, un charme fou, un cerveau pleinement actif et s’habille naturellement en 30 secondes avec classe tout en ne reniant pas les besoins de l’aventure.
Henk Kuijpers évite ainsi tous les pièges du genre et ne propose pas une figure archétypale. Franka n’est pas tourmentée par un lourd passé, n’a pas de revanche à prendre sur la vie et ne se nourrit pas non plus d’une haine quelconque envers les hommes.
Tout aussi bien à l’aise dans ses baskets que dans ses escarpins, la belle virevolte, bondit, observe et s’active avec une joliesse évidente.
- Dans le port d’Amsterdam, il y a Franka qui se promène par une belle journée ensoleillée !
Graphiquement, l’abordage par la face classique que subit la bonne vieille ligne claire est intrigant à plus d’un titre.
Souvent, de petites cases énergisent le récit, des tons de couleurs très francs rehaussent la perception visuelle de l’ensemble et des dialogues nombreux et explicatifs s’insèrent utilement dans la narration.
Défaut d’une cuirasse séduisante, on finit vite par se ficher de l’histoire proposée pour ne plus s’intéresser qu’à la belle. On préfère aussi toutes les pages consacrées à Amsterdam et à des évocations nocturnes très réussies plutôt qu’à une seconde partie tendance globe trotter sur le mode trépidant.
À trop vouloir en dire (la corruption, la trahison, la météo, le climat, les cataclysmes, les légendes, l’archéologie, etc), Henk Kuijpers nous perd un peu dans ses tribulations. Même si le tout est formidablement documenté, et ce quel que soit le pays visité, on s’en tamponne un peu !
Le Tome 2 (« Dragon Tonnerre ») est prévu pour fin juillet et le reste de la série sera à suivre dans la foulée (à noter que cette réédition des Humanos évite les premiers albums jugés moins adultes ou trop enfantins).
Bref, avec quelques années d’avance, Kuijpers proposait un modèle de personnage ne reniant rien de son être profond (femme elle est et femme elle s’assume) tout en s’inscrivant dans son époque (du muscle, un cerveau et une féminité évidente).
Une forme d’antithèse des mannequins anémiques aux tronches de morts-vivants créées par quelques « artistes » un rien azimutés. Spectres lugubres et maladifs arpentant les défilés de haute couture et envahissant les étals des revues féminines en distribuant des poses effarantes d’androïdes désarticulés... Beurk qu’on pense et rebeurk qu’on dit à tout cela !
Nous, la femme de nos rêves, c’est Franka sortant en cinquième vitesse de sa douche pour filer le train d’une méchante asiatique, c’est la beauté bio filant d’un pas léger et cheveux aux vents d’un rendez-vous à l’autre ou jouant efficacement des poings avec une grâce de danseuse classique mâtinée de la technique d’un Dr Justice !
Na !
Les Dents du Dragon (épisode 1/2)
Série : Franka
Scénario et dessin : Henk Kuijpers
Traduction (Hollandais) : Jean-Pierre Mercier et Frank Reichert
Couleur : Studio Leonardo
Lettrage : Studio Makma
Maquette : Philippe Ghielmetti
Éditeur : Les Humanoïdes Associés
Site Internet éditeur : Humano.com
Site Internet Henk Kuijpers : Franka.nl
Format (en cm) : 22,5 x 29,7
Pagination : 48 pages
ISBN : 978-2-7316-1949-2
Prix : 10€
Illustrations : © Les Humanoïdes Associés et Henk Kuijpers (1984, 1987 et 2007).
