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Trône d’ébène (Le) : naissance, vie et mort de Chaka, roi des Zoulous
Thomas Day
Le Bélial’, roman (France), fantasy historique, 275 pages, mai 2007, 15€

Afrique australe, début du 19e siècle.
Selon la prophétie zouloue, un enfant béni des dieux naîtra qui unira tous les peuples du pays n’guni, deviendra empereur et sèmera la terreur auprès de ses ennemis.



À sa naissance, Chaka, fils du roi des Zoulous, est exilé avec sa mère aux confins du royaume. Souffre-douleur des autres enfants, il développe une grande force et une grande soif de vengeance. Guidé par la vieille sorcière Isangoma et par les dieux Marabout-Haut-Comme-Un-Arbre et Crocodile-Aux-Yeux-Emeraude, protégé par le roi des rois Dinguiswayo, il semble être l’enfant de la prophétie. Son parcours l’amènera à devenir guerrier, roi, puis empereur, avant d’affronter l’envahisseur blanc.

Le dernier roman de Thomas Day s’inspire du personnage historique de Chaka Zulu. Parti de rien, ce fils illégitime du chef de clan Zoulou et d’une princesse Langeni, à l’enfance malheureuse, devint un chef autoritaire et conquit en quelques années un vaste empire (un destin qui n’est pas sans rappeler celui de Gengis Khan). Stratège avisé, despote charismatique, il finit assassiné avant d’entrer dans la légende.

Sur ce terreau historique, Thomas Day élabore une épopée fantastique, un récit initiatique où se mêlent prophéties, sorcières et dieux africains. Le fantastique se fait toutefois discret : n’attendez pas une énième trilogie d’heroic fantasy dans laquelle les clichés habituels seraient replantés au petit bonheur dans un décor africain.
Non, nous sommes ici dans la lignée de « La Voie du Sabre » (Gallimard, Folio SF), ce superbe roman se déroulant dans un Japon du 17e siècle où la magie est présente en filigrane, et de sa suite, « L’Homme qui voulait tuer l’Empereur ».
Autre point commun, on retrouve dans l’écriture du « Trône d’ébène » la même force poétique que dans ces deux romans. Une fois encore, l’auteur a choisi un continent et une époque très peu explorée par les littératures de l’imaginaire, d’ordinaire plus friandes de tolkienneries et de matière de Bretagne, et s’est soigneusement documenté afin de camper des personnages et des décors crédibles.
Fidèle à ce qui semble être devenu un rituel, il propose en fin d’ouvrage une bibliographie et une filmographie invitant le lecteur curieux à prolonger le voyage. Enfin, on retrouve une autre constante de l’auteur : explorer la face sombre de l’humanité à travers des personnages complexes, complexés et loin d’être reluisants.

Toutefois, malgré ces qualités, ou plutôt à cause de celles-ci, « Le Trône d’ébène » me laisse un goût d’inachevé et de pas-assez. Ce roman racontant le destin exceptionnel d’un personnage hors du commun de sa naissance jusqu’à sa mort, narrant la vie d’un redoutable bâtisseur d’empire qui parle aux dieux africains, manque singulièrement de souffle épique. La faute en incombe en partie à la taille du roman, somme toute assez courte eu égard à l’ampleur du thème abordé.
Les chapitres sont brefs, donnant parfois l’impression que l’auteur ne s’est pas investi dans son sujet autant qu’il l’aurait pu. Ainsi, le passage où l’on découvre le deuil effroyable imposé par Chaka à son peuple après la mort de sa mère, passage qui aurait pu donner lieu à une scène magistrale, méritait beaucoup plus que la simple page dénuée d’émotion qui lui est consacré.

Le problème vient également du choix narratif, celui du conte traditionnel (le roman commence par « Il était une fois »), principalement dans les deux premiers tiers, et parfois aussi de la biographie, en particulier sur la fin lorsque Chaka est confronté à l’envahisseur européen. Il en résulte une certaine froideur, une distance par rapport au personnage principal.
Poursuivons jusqu’au bout la comparaison avec « La Voie du Sabre » esquissée plus haut : là où l’on faisait corps avec les personnages, c’est avec un certain détachement que l’on observe ici les tribulations de Chaka.

Il n’y a rien là de rédhibitoire : « Le Trône d’ébène » reste d’une lecture tout à fait agréable. Mais on était en doit d’attendre plus, tant du thème abordé que de l’auteur de « L’Instinct de l’équarrisseur », « La Voie du Sabre » (Gallimard, Folio SF) et « La Cité des Crânes » (Le Bélial’).

Saluons au passage les éditions du Bélial’ pour leur politique assumée de soutien des auteurs francophones au travers de livres aux prix raisonnables et aux couvertures réussies (ici, un Nicolas Fructus en grande forme).

Titre : Le Trône d’ébène
Auteur : Thomas Day
Couverture (illustration) : Nicolas Fructus
Éditeur : Le Bélial’
Dépôt légal : mai 2007
Pages : 277
Format (en cm) : 13 x 20
ISBN : 2843440785
EAN : 978-2-84344-078-6
Prix : 15€


Philippe Heurtel
31 mai 2007


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