Les auteurs Joan Dufour (« Arkade »…) et Benoît Turpin (« Welcome to », « La planche des pirates »…) nous invitent à pratiquer la mécanique du Roll and Write (lance le.s dé.s et écris) dès 5/6 ans. Cette idée est monstrueusement excellente !
Avec un matériel tout en carton, bois et papier illustré par Rémi Leblond (« Birds »), le jeu nous embarque dans le monde des créatures horribles… pour rire.
Ils sont même plutôt sympathiques et attachants tous ces monstres qui posent pour la couverture de la boîte.
Et que dire des autres pièces du jeu, hautes en couleurs chatoyantes, qu’il s’agisse des standees de monstres, des jetons Peur qui se glisseront (pas toujours aisément d’ailleurs) dans le trouillomètre, ou encore des dés aux symboles de parties de corps de monstres (yeux, dents, jambes, bras, cornes ou accessoires).
Nous voilà munis d’une feuille sur laquelle nous cocherons les éléments récupérés grâce aux dés, et où nous dessinerons aussi notre monstre.
À chaque tour, le joueur actif lance des dés et en garde un pour lui. Il l’aura choisi en fonction de la partie du monstre qu’il tient à récupérer. Le joueur suivant prend alors un autre dé, puis le joueur suivant fait de même…
Le symbole obtenu sur le dé est coché sur la feuille. Attention toutefois, ne brûlons pas les étapes, pour récupérer un jeton Peur, il faut au moins 2 cases cochées du même symbole. On peut alors décider de prendre le jeton Peur correspondant qui ne fera qu’une modeste taille de 2. Ben oui, il en existe aussi un plus grand de taille 3 et un géant de taille 5.
Le but, c’est de dessiner son monstre, tout en tentant de faire monter son trouillomètre le plus haut possible. Attention, si je prends le pion 2 d’un des symboles, je ne pourrai pas prendre le 3 ou le 5. Et si j’attends un peu trop, peut-être qu’un de mes camarades me piquera sans vergogne aucune, et toute honte bue, le jeton Peur qui m’intéressait.
Lorsque je récupère un jeton Peur, je peux alors dessiner la partie du monstre correspondante.
Et si je ne peux ni cocher, ni récupérer quelque chose… et bien je me réconforte tout de même par la prise d’un jeton Décor.
Quel que soit le jeton pris, je le glisse dans le trouillomètre et le voici qui monte, qui monte, qui monte… et lorsqu’il déborde, la victoire se répand !
« Le grand méchant monstre » est un jeu malin. Il introduit la mécanique du Roll and Write en amenant les jeunes joueurs.euses à s’interroger sur la meilleure des tactiques à adopter. Vais-je tenter d’attraper les petits jetons Peur car cela semble plus rapide ? Cependant n’oublions pas que l’on s’aperçoit que les 5 jetons de valeur 2 ne sont pas suffisants pour remplir le trouillomètre. Alors, j’ai sans doute intérêt à aussi en chercher des plus grands… sans être toutefois trop gourmand.
Ce jeu a l’avantage de ne pas créer trop de frustration avec les plus petits, (un enfant pleurant à chaude larme et inconsolable peut mettre au tapis les meilleures intentions de jeux et laisser les adultes pantelants). Lorsqu’on ne peut rien prendre ou cocher, un jeton Décor est toujours à disposition en prix de consolation. Le trouillomètre augmente inexorablement, mais pas à la même vitesse pour tout le monde.
On trouve un aspect course très plaisant, qui crée une discrète tension tout à fait tenable. Ainsi que le frisson de la chance. Peut-être même que des joueurs vont commencer à observer le plateau des autres et se prendre au jeu de choisir un dé qui ne serait pas anodin pour leur adversaire. Mais ne soyons pas trop pressés d’en faire de fins stratèges.
On pourrait s’arrêter à cet aspect de jeu tactique en occultant l’essentiel : le plan graphique.
Quel plaisir de commencer à dessiner son propre monstre, de lui ajouter des cornes menaçantes, des pattes velues, des yeux globuleux, des mines patibulaires. Ou bien, de choisir de casser les codes inhérents aux monstres et de partir dans sa propre fantasmagorie. Pas besoin d’être un Jérôme Bosch en herbe, puisque l’ajout des éléments se compose à petite mesure.
De fait, l’expérience offerte conjugue une totale liberté de choix et de représentation. Nous vous conseillons d’ailleurs de vous munir de crayons de couleur pour que la fête soit plus folle.
Une petite spoliation cependant peut naître si l’un des enfants ne parvient pas à terminer sa créature avant que l’un des trouillomètres ne déborde. Cependant, rien n’empêche de prendre son temps en fin de partie pour que chacun puisse avoir tout loisir de terminer son monstre. Ce devrait même être une règle absolue et obligatoire !
Au final, cette salade d’apprentissage d’une mécanique ludique associée au plaisir graphique, offre une excellente entrée dans l’univers du jeu pour les plus jeunes, ainsi qu’un plaisir pour les plus grands. Cela fait de ce « Grand méchant monstre » un jeu à apprivoiser pour le plus grand plaisir des plus jeunes.
Le grand méchant monstre
Mécanique(s) : jeu de dés, roll and write, dessin
Âge : 5 ans et +
Nombre de joueurs : 2 à 4
Durée d’une partie : 20 min environ
Auteur(s) : Joan Dufour & Benoît Turpin
Illustrateur(s) : Rémi Leblond
Éditeur : Bankiiiz éditions
Date de sortie : 10 mars 2023
Illustrations © Rémi Leblond & Bankiiiz éditions