Oh que vous êtes nombreux à avoir connu ce son électronique si particulier et si… strident !
Pour les plus canoniques d’entre nous, sur les fameuses bornes d’arcade, qui dévoraient nos quelques pièces à la rapidité de l’éclair. Ces demi-frigos lourds, bourrés d’électroniques avec leur grand écran à la définition devenue au fil des ans plus que modeste, leurs manettes archaïques et leurs boutons de plastique malmenés par les doigts de lycéens remplis de testostérone.
Pour les moins vieux sur les consoles de jeux vidéo qui offraient des spectacles graphiquement insolites à la définition surannée.
Les auteurs, Joan et Lucas Dufour, père et fils, ont décidé de vous faire revivre ces moments d’excitations coupables servis désormais sur un plateau, avec des pions en bois très colorés, des tuiles bonus et des dés.
Chaque joueur se place d’un côté du plateau rectangulaire. L’un jouera l’Alien et devra atteindre la base spatiale avec au moins un de ses 12 vaisseaux. L’autre incarnera le Défenseur se battant héroïquement avec son unique navette pour détruire tous les vaisseaux Alien.
En mode « Stratégie » l’Alien tire 2 dés qui lui indiqueront les couleurs des navettes qu’il peut déplacer. Il pourra, comme au Yam’s, relancer les dés jusqu’à 2 fois afin d’obtenir ce qui sert le plus le moment. Lorsqu’il passera sur une case avec un carré de couleur, il récupèrera une tuile bonus qui lui donnera l’occasion d’avancer plus vite, de récupérer des vies ou encore de gêner son adversaire.
À son tour, le Défenseur lancera aussi 2 dés, un lui donnant le numéro d’une case sur laquelle il pourra se déplacer, l’autre la couleur du vaisseau Alien qu’il pourra éliminer. Lui aussi pourra relancer les dés 2 fois. Dès qu’il aura abattu deux Aliens de même couleur, il pourra bénéficier d’une tuile bonus. Par ailleurs, il aura l’occasion d’utiliser des pépites qui permettront d’influencer la valeur de son déplacement.
À chacun alors de bien définir ses mouvements et sa tactique à chaque coup.
Les parties sont assez rapides, tendues, et il ne faut jamais abandonner même si l’oppression vous guette au fur et à mesure de la progression de l’adversaire. En effet, les retournements de situation sont toujours possibles.
Dans ce mode, le Défenseur semble plus fragile. Ce qui nous transportera dans les méandres du temps, celui où les vagues d’Alien de la borne d’arcade nous insufflaient des doses d’adrénaline face à la puissance des invasions extraterrestres.
L’envie de revanche est très forte. On se demande si l’on peut maîtriser le hasard des dés pour parvenir à nos fins. Une stratégie est-elle vraiment possible ? De nombreuses parties seront nécessaires pour parvenir à en tirer la substantifique moelle statistique.
Il devient vite évident qu’il faut jouer les deux camps pour apprécier le jeu en permanence et tenter de se surpasser.
La cerise sur le gâteau de ce jeu est le second mode : le mode « arcade » !
Cette fois, on remet les tuiles bonus dans la boîte. On pose vaisseaux et navette sur le plateau. On s’empare des dés. Le Défenseur a quelques pépites pour modifier son déplacement. L’exaltation impétueuse vous envahit.
Ce mode se joue en temps réel, en simultané. Plus de lancers limités. On jette les dés, on relance si besoin et on applique les résultats sans attendre l’adversaire. Ce qui peut donner un Alien prêt à faire avancer l’un de ses vaisseaux, mais qui trouve une case vide car le Défenseur vient de lui lancer un coup de laser fatal.
Ou inversement, le Défenseur jubilant en obtenant la couleur tant attendue pour pulvériser un Alien et qui en levant les yeux s’aperçoit que le vaisseau a changé de colonne et a même avancé de 2 cases !
La partie devient frénétique. Les dés roulent dans tous les sens, les éclats de voix se multiplient, les grognements font vibrer les murs. Le jeu prend alors des airs de folie furieuse !
Il est évidemment nécessaire d’avoir deux joueurs qui ne trichent pas et qui sont prêts à accepter le résultat quel qu’il soit.
C’est le mode qui simule le mieux la tension que l’on pouvait connaître avec « Space Invaders ». Le chaos s’installe vite, les mouvements peuvent rapidement devenir si désordonnés que l’on perd finalement un peu de plaisir de jeu au profit d’un embrasement difficilement contrôlable.
Les enfants de 8 à 11 ans à qui nous avons fait pratiquer « Arkade » ont tenté les deux modes. Force est de constater que les enfants ont préféré le mode stratégie.
Pour celles et ceux prêts à se jeter dans un torrent de tension et qui seront capables d’en tirer un plaisir ludique, osez l’explosif mode arcade.
Jeu simple, rapide et tactique, « Arkade » est une madeleine de Proust redoutablement efficace que les parents pourront transmettre à leurs enfants hors des écrans chronophages.
Un jeu de plateau qui a su avec brio transposer le plaisir et l’adrénaline que les bornes procuraient dans une autre dimension, celle du carton.
Arkade
Mécanique(s) : affrontement, déplacements, tactiques
Âge : 7 ans et +
Nombre de joueurs : 2
Durée d’une partie : 10 min environ
Auteur(s) : Joan et Lucas Dufour
Illustrateur(s) : Mário Koichi Gushiken
Éditeur : Auzou Jeux
Date de sortie : 23 février 2024
Illustrations © Mário Koichi Gushiken & Auzou Jeux
