Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Nous n’avons qu’une Terre
Jean-Pierre Andrevon
Editions Arkuiris, recueil de textes et de dessins, 1er semestre 2023,172 pages, 15€

Si je devais garder un seul ouvrage d’Andrevon, ce serait celui-ci. Il est construit comme un catalogue, recensant les indignations d’un homme au soir de sa vie, ulcéré par les excès de ses semblables et le futur qu’ils préparent à la prochaine génération. En poussant ces cris de révolte, Jean-Pierre Andrevon illustre, par une série de dessins et de commentaires, les maux que l’humanité s’inflige, qui altèrent son environnement et la poussent vers un non-avenir.



Jean-Pierre Andrevon a abordé sa carrière artistique par le dessin. Il en rappelle les étapes, soulignant ses contributions à des revues comme « La gueule Ouverte » ou « Charlie ». Son art est bien sûr au service de ses idées, et, par conséquent, orienté. Andrevon est un précurseur en matière d’écologie. C’est son combat de toujours. Il passe donc en revue par des dessins de presse souvent percutants et des textes limpides des thèmes qui, mis bout à bout, déroulent un panorama édifiant sur notre situation actuelle et le destin qui nous attend.
« Nous n’avons qu’une Terre » ! clame-t-il, et nous la détruisons de multiples façons. Respectant une sorte de règle de Pareto, 20% des Terriens drainent 80% des ressources qu’offre la planète, c’est-à-dire des richesses disponibles. Poussé à consommer toujours plus au nom d’une économie de marché dont le profit est le moteur, l’Homme transpose aussi son agressivité sur le terrain de la compétition commerciale. Ce premier chapitre qui rappelle une évidence s’ouvre sur un dessin donnant le ton : celui d’un monstrueux paquebot faisant escale dans une île du Pacifique menacée de submersion. On pense aux Tuvalu dont tout le monde se fout de savoir si elles disparaîtront un jour ou l’autre sous les eaux (Elles ne recèlent pas de pétrole...). Andrevon étaie ses propos de quelques chiffres qui suffisent à brosser un sinistre tableau : celui de l’inégalité des conditions de vie d’un point du globe à un autre, de la consommation à outrance, du gaspillage et des dérivés de ces perversions que sont la pollution, la pauvreté, la guerre.
Jean-Pierre Andrevon traite la question sous de nombreux aspects. Social : la lutte des classes est-elle toujours d’actualité ou la dictature du fric conduit-elle les populations à s’enfermer dans un égoïsme forcené ? L’énergie : le nucléaire serait notre avenir, mais les centrales peuvent péter (et elles le font d’ailleurs) avec les conséquences que l’on connait. Pourtant on en construit de nouvelles, pour des coûts exorbitants alors que leur mix-énergétique, au niveau mondial, est dérisoire. Le climat : un certain président a appris récemment qu’il se déréglait ! Les 1,5 degrés d’augmentation de température à ne pas dépasser dans le cadre des émissions des gaz à effet de serre, tels que définis par la COP21, vont être bientôt enfoncés, et de beaucoup ! D’où un cortège d’effets « secondaires », sécheresse, montée des niveaux des océans, réchauffement de ceux-ci engendrant des phénomènes météo dévastateurs. (Andrevon n’a même pas besoin de faire un dessin quant aux répercussions de ces bouleversements sur le vivant). En parlant de vivant : les bêtes ! Il semblerait qu’elles soient sensibles à la douleur ! Andrevon s’insurge devant la cruauté avec laquelle on les traite et rappelle que la consommation de viande participe largement à l’émission des gaz à effet de serre et au gaspillage des ressources agricoles et d’eau.
Il a aussi une sacré dent contre les chasseurs et leur discours cynique de soi-disant protecteurs de la nature. Il les ridiculise et montre que ce sont d’authentiques tueurs. Il dénonce surtout une natalité galopante qui alourdit l’ardoise et promet des lendemains migratoires particulièrement chantants. Mais voilà Jean-Pierre : nous sommes aussi coupables, nous avons procréé, toi comme moi, participant, à notre petite échelle, à l’accroissement de la démographie.
Alors tout est-il irrémédiablement foutu ? Allons-nous infailliblement empoisonner la planète et disparaître à notre tour, victimes de notre bêtise ? Sommes-nous la « maladie » de la Terre, ce cancer dont parlait le commandant Cousteau ? Il existe des solutions telles que la décroissance, la séquestration du CO2, les énergies « propres », le développement des transports en commun, mais qui veut vraiment aller au-delà de l’effet d’annonce ? Une Greta Thunberg tempête en vain : les COP accouchent de souris. Tout au plus les groupes industriels se vantent-ils de faire du développement durable, de parler de bas-carbone tout en soignant leurs actionnaires. La doctrine libérale et l’intérêt bien compris des oligarchies gouvernent le monde et tant pis si le chaos se répand. Jean-Pierre Andrevon décrit une société entropique qui crée toujours plus de désordre au fur et à mesure qu’elle se « développe ».
Il faut ici remercier Yann Quero qui a pris l’initiative de proposer à Jean-Pierre Andrevon de composer ce guide terrifiant et indispensable, militant bien sûr.
Le vieux pachyderme de Grenoble barrit encore, et on l’entend de loin.


Titre : Nous n’avons qu’une Terre (textes et dessins féroces de J-P Andrevon)
Auteur : Jean-Pierre Andrevon
Éditeur : Arkuiris
Site Internet : recueil (site éditeur)
Pages : 172
Format (en cm) : 12,8 x 20,5
Dépôt légal : 1er semestre 2023
ISBN : 9782919090464
Prix : 15 €



Didier Reboussin
3 mars 2023


JPEG - 49.2 ko



Chargement...
WebAnalytics