Les lecteurs d’« Inavouable » (Pocket, 2018) se retrouvent en terrain connu. Au lieu de se lancer à la recherche d’un tableau, Zofia est en quête d’un mystérieux artefact et la fameuse voleuse suédoise Lisa Tolgfors est à nouveau de la partie. Zofia passe par toutes les émotions, elle connait bien des péripéties dans des lieux fort différents, allant au devant du danger sans toujours s’en rendre compte. Il faut dire que Bogdan Smuga n’a pas été franc avec elle, il ne lui a raconté qu’une partie de l’histoire et de ce qu’il cherchait vraiment. Une fois trouvé, nous ne sommes qu’à la moitié du livre. Comme souvent les apparences étaient trompeuses et ce n’est qu’alors que Zofia comprend vraiment dans quoi elle a fourré son nez. Sous ses dehors idéalistes, Bogdan obéit à un projet qu’elle ne peut cautionner. Que faire ? Foncer tête baissée comme elle le fait souvent...
Pas de temps morts dans « Inestimable », le récit est mouvementé, loin de se cantonner à un seul terrain d’action. Les événements les plus improbables arrivent à Zofia qui se révèle un simple pion dans des visées à long terme. Elle ne peut l’accepter et il suffit de l’éloigner pour qu’elle revienne au galop, bien aidée en cela par Lisa. Bien sûr, rien n’est simple et les ennemis de tes ennemis ne sont pas forcément tes amis. Les allégeances aux divers camps ne sont pas claires, il est difficile de ranger les divers intervenants dans des cases précises. D’ailleurs il vaut peut-être mieux ne pas chercher, car Zygmunt Miłoszewski en fait trop de ce point de vue, complexifiant outre-mesure la situation, et se perd un peu en route. Désigner les adversaires de Bogdan tient déjà de la gageure, des pistes sont données mais le choix est large. L’auteur se disperse beaucoup, ce qui explique les presque 700 pages au compteur. Il aime dresser des portraits élaborés de personnages que l’on ne fait parfois que croiser. Comme il a l’art et la manière de le faire, ça passe, mais cela n’apporte pas grand-chose à l’intrigue qui aurait pu être plus resserrée.

Zygmunt Miłoszewski est Polonais et le fait comprendre tout au long du livre avec une auto-dérision toute polonaise, véritable marque de fabrique dans les deux ouvrages cités. Il ne loupe pas une occasion d’égratigner les travers polonais, de revenir sur le passé du pays, de désigner les occasions manquées (par exemple, Marie Curie non reconnue en Pologne à l’époque). Au passage, les Français ont aussi droit à une critique non dénuée de sens. En plus d’un récit vivant, cet aspect fait le charme d’« Inestimable ».

Lire Zygmunt Miłoszewski s’avère à chaque fois une expérience stimulante. Résumer ses livres tient de l’exploit, tant il fait feu de tout bois, se dispersant souvent trop, mais sans jamais lasser les lecteurs. Il aime son pays et, pour en parler, s’inspire du proverbe « Qui aime bien, châtie bien » en usant d’un humour qui lui est propre. « Inestimable » nous conduit très loin sur le chemin de l’aventure et brosse bien des portraits hauts en couleurs.
Un auteur qui mérite d’être découvert pour sa voix originale.

Titre : Inestimable (Kwestia Ceny, 2020)
Auteur : Zygmunt Miłoszewski
Traduction du polonais : Kamil Barbarski
Couverture : Tanguy Morin
Éditeur : Pocket (1ère édition : Fleuve éditions, 2021)
Collection : Thriller
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 688
Format (en cm) : 10,8 x 17,8
Dépôt légal : septembre 2022
ISBN : 9782266324823
Prix : 9 €

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