“Abîme intérieur” plonge le lecteur dans un futur abrutissant les masses à force bouquets vidéos n’offrant plus grand-chose de neuf. Les gens sont accros, l’inédit se paye cher, très cher, encore faut-il être capable d’en proposer. Or, la créativité est en berne et ce ne sont que resucées d’anciennes séries et autres films. Pour pallier à cette disette, des plongeurs sont envoyés dans le cerveau d’artistes décédés pour y ramener du matériel vierge. C’est ainsi que Dale s’enfonce toujours plus profondément dans les neurones du cerveau de David Lynch...
L’inspiration de Stéphane Paccaud n’est pas sans rappeler « Destination cerveau » d’Isaac Asimov, mais il donne un coup de jeune au thème pour un résultat étonnant. Les producteurs sont si désespérés qu’ils sont prêts à tout pour parvenir à leurs fins. Dès que le gros profit se profile, plus rien ne compte d’autre, même pas la vie humaine, sacrifiée sur l’autel du consumérisme et du capitalisme. Une belle inspiration qui inclut bien des clins d’œil au cinéaste.

Anne Goudour aura mis 7 ans à achever “De l’autre côté de l’écorce” dont les deux premières versions auront été jugées non satisfaisantes. Les incendies de forêts constituent le fond de l’histoire. Un pompier pris au piège des flammes trouve son salut en suivant une étrange créature. Ici, le réel côtoie un monde parallèle, du moins c’est ce qu’on pourrait croire. Le protagoniste découvre tout un monde caché, inconnu.
Il demeure toutefois des zones d’ombres : sommes-nous ailleurs ? Ou simplement plus loin, vu que la menace des flammes est la même ? La suspension d’incrédulité ne va ici pas de soi. Le texte se lit très bien, mais le déroulement ne trouvera pas le même accueil chez le lecteur, suivant son acceptation ou non de ce décalage. Parfois, un texte ne fonctionnera pas malgré toutes les modifications que l’on pourra faire. C’est un peu mon sentiment dans le cas présent.

Vivien Esnault s’empare aussi de l’actualité pour extrapoler dessus. “Tu n’es pas Charlie” pose bien des questions. Après les attentats de Charlie Hebdo, presque tout le monde relayait « Je suis Charlie » sur les réseaux sociaux. Mais combien étaient-ils à s’interroger sur la signification de ces mots, à ne pas agir par simple automatisme pour afficher une solidarité qui n’allait pas forcément de pair, mais était juste basée sur le clic ? Le protagoniste, comme beaucoup d’autres personnes, apprend un jour que cela peut avoir des conséquences et il faut alors assumer ses actes en éprouvant vraiment son engagement à une cause. Le raisonnement s’avère pertinent, plein d’enseignements sur les travers humains. Une belle nouvelle qui ne peut que faire réagir.

Trois nouvelles au sommaire, chacune bien différente, montrant que les territoires de l’imaginaire sont vastes et que le présent n’a pas fini d’inspirer les auteurs. Un bon numéro.

Titre : AOC
Numéro : 61
Directrice de la publication : Evelyne Beuzit
Rédacteur en chef : Olivier Bourdy
Couverture : Aeon Lux
Illustrations intérieures : 570 et Jubo
Type : fanzine
Genre : Science-fiction, fantasy, fantastique
Site Internet : le club Présences d’Esprits
Période : été 2021
Périodicité : trimestrielle
ISSN : 1772-3442
Dimensions (en cm) : 13 x 19,9
Pages : 84
Prix : 3,50 €

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