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Toutes les saveurs
Ken Liu
Le Bélial’, Une Heure-Lumière, n°31, court roman traduit de l’anglais (États-Unis), Western SF ?, 128 pages, mai 2021, 9,90€

La soif de l’or attire bien du monde à Idaho City, petite ville récemment ravagée par un incendie. De nombreux commerçants, banquiers... ont tout perdu et ils voient d’un bon œil les nouveaux arrivants pour la reprise des affaires. Des prospecteurs chinois débarquent, mais ils ne dépensent pas à tort et à travers. Ils se contentent de peu, travaillent infatigablement, font leur propre cuisine dont les effluves attirent Lily la jeune fille du propriétaire du petit baraquement où ils s’entassent pour dormir. Cela sent si bon qu’elle ne résiste pas à l’appel, d’autant qu’elle est fascinée par celui qui semble à leur tête, un géant au visage rouge et à l’énorme barbe, Lao Guan.
Le premier repas partagé lui donne une première leçon, leur culture est différente de la sienne et elle a beaucoup à apprendre pour comprendre ces inconnus si étranges.



Dans quelle case se range donc « Toutes les saveurs » ? Même si ce court roman est publié dans une collection de science-fiction, en est-ce pour autant ? Le lecteur se retrouve dans une ville de prospecteurs au temps de la ruée vers l’or, de la conquête de l’ouest qui nécessitait beaucoup de main-d’œuvre corvéable à merci comme les Chinois cherchant la fortune dans ce pays en devenir mais se retrouvaient souvent exploités. À leur contact, Lily découvre un autre monde, une autre culture qu’elle n’avait jamais soupçonnée. Les Chinois dérangent dans cette société, mais ils fascinent aussi. Rien que les effluves se dégageant de leurs gamelles éveillent une batterie de sentiments chez les habitants.

Lily aime écouter Lao Guan raconter des histoires, notamment celle de Guan Yu, le dieu de la guerre. Le rapprochement entre les deux personnages semble inévitable et c’est là que le récit penche vers l’imaginaire, sans jamais y verser totalement, car « Toutes les saveurs » est ancré dans l’histoire des États-Unis et des Chinois qui y ont débarqué. Ce grand pays ne s’est pas construit sans sacrifices, sans exploiter certains pour s’étendre, notamment avec la construction des voies du chemin de fer. De par ses origines, cette histoire devait lui tenir à cœur et Ken Liu a voulu présenter ce pan historique à sa manière si humaine et rendre hommage à ces travailleurs qui ont cherché loin de leur pays un nouveau départ. Il s’agit d’une belle leçon d’ouverture vers autrui. L’innocence d’une jeune fille permet de franchir les barrières de la culture, de la langue. Dans ce cas, un plus un ne fait pas deux, car chacun s’enrichit au contact de l’autre. L’addition des deux devient supérieur à leur somme. Histoire américaine et chinoise se côtoient et l’ensemble se révèle fascinant. Impossible de décoller de ce petit livre de 120 pages, tant le déroulement est plaisant.

La palette de Ken Liu ne manque ni de richesse ni de surprises et « Toutes les saveurs » montre une fois de plus tout le talent de cet auteur si attachant. À sa manière discrète, il ne déçoit jamais et nous immerge immanquablement dans son imaginaire pétri d’humanité. « Toutes les saveurs » donne une belle leçon d’ouverture et de fraternité. À l’image de Lily, il suffit parfois de faire le premier pas...


Titre : Toutes les saveurs (All the Flavors, 2012)
Auteur : Ken Liu
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Pierre-Paul Durastanti
Couverture et conception graphique : Aurélien Police
Éditeur : Le Bélial’
Collection : Une Heure-Lumière
Numérotation dans la collection : 31
Directeur de collection : Olivier Girard
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 128
Format (en cm) : 12 x 18
Dépôt légal : mai 2021
ISBN : 9782843449819
Prix : 9,90 €


Autres titres de la collection :
- 1. « Dragon » de Thomas Day
- 2. « Le nexus du Docteur Erdmann » de Nancy Kress
- 3. « Cookie Monster » de Vernor Vinge
- 4. « Le choix » de Paul J. McAuley
- 5. « Un pont sur la brume » de Kij Johnson
- 6. « L’homme qui mit fin à l’histoire » de Ken Liu
- 7. « Cérès et Vesta » de Greg Egan
- 8. « Poumon vert » de Ian R. MacLeod
- 9. « Le regard » de Ken Liu
- 10. « 24 vues du mont Fuji, par Hokusai » de Roger Zelazny
- 11. « Le sultan des nuages » de Geoffrey A. Landis
- 12. « Issa Elohim » de Laurent Kloetzer
- 13. « La ballade de Black Tom » de Victor LaValle
- 14. « Le fini des mers » de Gardner Dozois
- 15. « Les attracteurs de Rose Street » de Lucius Shepard
- 16. « Retour sur Titan » de Stephen Baxter
- 17. « Helstrid » de Christian Léourier
- 18. « Les meurtres de Molly Southbourne » de Tade Thompson
- 19. « Waldo » de Robert A. Heinlein
- 20. « Acadie » de Dave Hutchinson
- 22. « Abimagique » de Lucius Shepard
- 23. « Le temps fut » de Ian McDonald
- 24. « La Survie de Molly Southborne » de Tade Thompson
- 25. « Les Agents de Dreamland » de Caitlin R. Kiernan
- 26. « Vigilance » de Robert Jackson Bennett
- 27. « La Fontaine des âges » de Nancy Kress
- 28. « La Chose » de John W. Campbell
- 29. « Ormeshadow » de Prya Sharma
- 30. « À dos de crocodile » de Greg Egan

Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
25 juillet 2021


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