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Lady Helen, tome 2 : Le Pacte des Mauvais Jours
Alison Goodman
Gallimard Jeunesse, roman, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne), 587 pages, août 2017, 19,50€

Suite aux événements tragiques du bal, Lady Helen s’est enfuie à Brighton chez Lady Margaret et Mr Hammond, les assistants de Lord Carlston. Officiellement elle est dans cette station balnéaire à la mode pour convalescence, en réalité elle va commencer son entraînement de Vigilante.
Hélas, la ville reçoit bientôt toute la bonne société, et elle croise le Carlin et sa mère qui l’invite à une fête, mais aussi Lord Selburn qui n’a pas renoncé à l’épouser !
Elle croit également reconnaitre dans la rue des Abuseurs, et elle rencontre Pike, le nouveau secrétaire d’Etat et chef du Club, un ancien Terrène, un homme aigri qui déteste Carlston, et semble déterminé à la monter contre lui. D’autant que le beau et mystérieux Lord Carlston dépérit, en proie aux restes démoniques qui demeurent dans le Vigilant à chaque réveil d’un Rejeton...



Relire la chronique du tome 1 : « Le Club des Mauvais Jours »

Après la découverte des Abuseurs et des Vigilants, place aux choses sérieuses : Lady Helen n’est plus une naïve jeune fille, les événements du printemps 1812 lui ont ouvert les yeux sur beaucoup de choses. Et ont mis fin à certains de ses projets de jeune fille de bonne famille. Rejetée par son oncle, fuyant lord Selburn qu’elle ne peut plus épouser sans le mettre en danger, elle a choisi de marcher dans les pas de sa mère et de devenir une Vigilante, sans doute très puissante puisque son père l’était également. Cette double ascendance fait d’elle l’Héritière, et annonce également la venue d’un Abuseur Suprême auquel une partie du Club, Pike le premier, ne croit pas.

Dans l’abri relatif de Brighton, Helen commence donc un entrainement intensif sous la direction de Carlston. Cela va du combat à l’usage de ses sens développés de Vigilante, mais aussi au travestissement en homme. N’oublions pas que nous somme au début du XIXe siècle, les hommes jouissent d’une liberté de mouvement bien supérieure, tant sociale que vestimentaire ! On a droit à deux belle pages où Helen et Darby découvrent ses nouvelles tenues et leurs avantages comme leurs inconvénients (culotte montante ajustée, chemise, veston, etc.) dont l’enfilage qui demande, comme pour les dames, l’assistance d’un valet de chambre. Helen doit également sacrifier sa belle chevelure, trop longue pour un homme. Mais sa nouvelle apparence va lui permettre de naviguer presque à sa guise dans la ville, sans craindre pour sa réputation déjà mise à mal. Alison Goodman réussit à merveille à nous plonger dans son décor XIXe et sa bonne société, prompte aux commérages et aux rumeurs, mais aussi dans ses quartiers plus populaires, crasseux et miséreux, de taverne en maison close (un choc pour notre héroïne !).

L’intrigue de ce second volume tourne autour de l’ancien Terrène de Benchley, Lowry, un homme aussi brutal que son ancien maître était cruel. Il a conservé le journal de Benchley, qui recèle nombre de secrets sur des gens haut placés, et des informations vitales pour les Vigilants. Peut-être la raison de la mort de la mère de Lady Helen. Pike tient à tout prix à mettre la main dessus, et charge Helen et Hammond de l’obtenir, en cachette de Carlston. La rivalité entre les deux hommes est très forte : Pike, déclinant depuis la mort de son maître, veut prendre l’ascendant sur le lord charismatique, et n’hésite pas à brandir sa faiblesse actuelle, signe évident de sa folie imminente, pour tenter de l’écarter... définitivement.
Lorsque durant le bal du Carlin, Carlston négocie avec un vieil Abuseur des informations sur son mal, il apprend l’existence du journal, compliquant les plans d’Helen pour s’en emparer. De plus, elle doit mentir à tout le monde, car Lowry a changé son prix : il veut redevenir un Terrène, le sien ! une idée qui révulse la jeune fille. Pour l’apprentie Vigilante, c’est une course contre la montre. Et si son allégence - et son amour - va à lord Carlston, dont certains arrangements avec la loi l’étonnent un peu, elle doit demeurer fidèle au Club. Elle peut heureusement compter sur Hammond, mais pas sur sa soeur Margaret, elle aussi amoureuse de Carlston et très protectrice.

Le livre est rythmé par les journées qui les séparent de la pleine lune, date idéale pour lier un Terrène à son Vigilant, et délai imposé par Lowry. Helen se rapproche davantage de Carlston, leurs entrainements puis leur rencontre avec Lowry pour acheter le journal les poussant à toujours plus de proximité physique, et le travestissement d’Helen y ajoute une touche de trouble. Mais plus ils sont proches, plus Carlston est victime de crises de folie qui déclenchent aussi des explosions de ses pouvoirs. Témoin de l’une d’elle, Selburn en use pour se faire adouber par Pike et devenir l’assistant d’Helen, argumentant que son rang peut lui ouvrir des portes, et profitant de sa proximité pour poursuivre sa cour assidue.
Il s’avère également que le journal est un Ligatus, l’un des trois artefacts nécessaires à ouvrir une porte pour que les Abuseurs déferlent sur Terre. Helen s’étant déjà fait volé le Colligat de sa mère, elle a à cœur de mettre celui-ci hors de portée du camp ennemi et d’empêcher la fin du monde.

Comme le premier tome, ce « Pacte des Mauvais Jours » est extrêmement dense, très riche en détails et profondément immersif. Les sous-intrigues, mineures mais indispensables au réalisme de la vie sociale qui entourent l’héroïne, abondent et s’entremêlent magnifiquement : chaque choix de Lady Helen est souvent lourd de conséquences, qu’il s’agisse de petites omissions, d’oublis, de révélations faites à tel moment, trop tôt ou trop tard, de prises de risques ou de fuites. Certains malheureux hasards ruineront des jours d’efforts, un refus d’obéir coûtera la vie d’un proche. Le climax final est à couper le souffle, même si on en devinera quelques conséquences à l’avance, comme la persistance du trio Helen/Carslton/Selburn dans le troisième volet de cette histoire.

Du Jane Austen sauce dark fantasy, vante l’éditeur en quatrième de couverture. Ce n’est pas usurpé. Tous les ressorts de la vie sociale du XIXe sont très présents, en façade mais aussi dans la conduite des relations entre les personnages, et les Abuseurs, les Rejetons, les Irrévéillables ajoutent une noirceur supplémentaire à la crasse des bas-fonds, tout aussi dangereuse que les intrigues de couloirs ou la pression masculine sur les femmes, aussi fortes soient-elles.

Une perle.

Conclusion imminente dans « L’Ombre des Mauvais jours ».


Titre : Le Pacte des Mauvais Jours (The Dark Days Pact, 2017)
Série : Lady Helen, tome 2/3
Auteur : Alison Goodman
Traduction de l’anglais (Australie) : Philippe Giraudon
Couverture : Marion Louw
Éditeur : Gallimard Jeunesse
Collection : Grand format littérature
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 587
Format (en cm) : 22,5 x 15,5 x 5
Dépôt légal : août 2017
ISBN : 978207066348
Prix : 19,50 €


Lady Helen
Le Club des Mauvais Jours
Le Pacte des Mauvais Jours
L’Ombre des Mauvais Jours


Nicolas Soffray
10 mai 2020


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