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Chroniques du Premier Age
Francis Valéry
Rivière Blanche


Francis Valéry est un individu éminemment sympathique, avec qui j’ai eu l’occasion de boire des coups et des coupes aux dernières Utopiales.
J’ai lu son dernier livre intitulé « Chroniques du Premier Age » chez Rivière Blanche.
Ce n’est pas un roman ni même des chroniques qui se suivent ou une « histoire du futur ». C’est un recueil de nouvelles longues ou courtes, artificiellement raccrochées les unes aux autres par une mise en scène (intro des « documents », historique à la fin, noms changés dans les nouvelles). En plus, comme Valéry est un vieux routier talentueux de l’écriture et qu’il change de style à chaque nouvelle, cela n’aide pas à l’homogénéisation de l’ensemble. Et ça procure un drôle de sentiment d’exercice de style.

On voit bien que l’auteur est un écolo convaincu, et un amoureux de la botanique : il n’y a pas une nouvelle sans paragraphe sur la beauté des fleurs, des feuilles et des racines, hydroponiques en général. Et il ne pense pas grand bien de notre espèce humaine qui ne respecte pas la Nature. Jusque-là tout va bien, je (comme bien d’autres)suis d’accord avec lui.

Ce qui est plus gênant, à mon avis, c’est que, un peu partout dans le bouquin (des nouvelles publiées entre 1991 et 2000, si j’ai bien compris la « bibliographie »), on trouve, en filigrane assez épais, ou carrément, des velléités de mise en perspective d’un gravissime problème de toujours : le racisme. La position ou l’attitude de l’auteur est sans aucun doute honorable mais, certainement à son insu, elle s’avère plus qu’ambiguë, de mon point de vue. Au début et à la fin du bouquin on fait l’apologie du Grand Israël « qui ne doit rien à personne » et est maître d’œuvre, financé par le mouvement sioniste (!), de la première expédition vers Alpha du Centaure d’où est parvenu un message indiquant la présence d’une civilisation extraterrestre. C’est « l’accroche » du livre, quoiqu’on n’en entende plus parler après, des Centauriens !? Pour « compenser », il y a un génie palestinien de la physique qui travaille avec eux (parce qu’on lui a demandé ?) et qui a une fille très belle (mais un peu bornée) qui reste fidèle à la « cause » palestinienne, mais qui comprend à la fin qu’elle n’aurait pas dû.
Au milieu, on parle des blacks et de la négritude : la solution préconisée, dans cette Terre d’après, contre l’immigration vers la société occidentale du trop-plein, c’est le retour des Africains à leurs valeurs premières (au sens « art premier »), ce qui se traduit par un exode dans un monde parallèle. Et ce, même pour le héros « nègre blanchi » qui n’aime rien tant que les belles hybrides eurasiennes ou africasiennes. Les Japonais et les Allemands (les méchants de la Deuxième Guerre, pour ceux qui auraient, à juste titre, oublié) dominent le monde capitaliste au détriment de la nature qu’ils exploitent comme ils le font des hommes. Bref, il y a, d’évidence, de bons sentiments et de belles idées à faire passer, mais ils ne passent pas, le discours se prend les pieds dans le tapis du racisme ordinaire en voulant le dénoncer.

Par contre, je l’ai déjà dit, Valéry sait écrire et le démontre, tour à tour poétique, rationaliste, banlieuso-vulgaro-speedé ou parlant comme une machine dans ses nouvelles.

On referme ce recueil de nouvelles hétéroclites, j’insiste - le rassemblement en « chroniques » ne peut tromper personne -, avec un drôle de sentiment de talent indéniable mais mal utilisé et de message antiraciste confus et douteux.
Il y a aussi des coquilles (absence ou excès d’espaces après les tirets de dialogue) des fautes (Béguine pour Begin par exemple), et des incohérences dans le nom des protagonistes (Leppard ou Leppards) dues, suppute-t-on, à une homogénéisation précipitée entre les parties. Moins grave, la couverture n’est vraiment pas belle, mais ça, des goûts et des couleurs...

En résumé, à mon humble avis, un recueil de nouvelles pour les amateurs de SF écrite (avec une emphase sur l’adjectif), d’un auteur écolo et sympathique, mais dont le message ne passe pas, dans une collection TRÈS sympathique, mais qui manque (on les comprend, c’est rare et cher sur le marché) de correcteurs pointilleux.

H.T (qui aurait sincèrement préféré ne dire que du bien)

- Titre : Chroniques du Premier Age
- Auteur : Francis Valéry
- Couverture : Patrick Marcel
- Nombre de pages : 320 p.
- Éditeur : Rivière blanche
- Commandes directes sur le site de l’éditeur
- Dépôt légal : janvier 2006
- ISBN 1-932983-54-6
- Prix : 20 euros


Hervé Thiellement
21 juin 2006


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