Apothéose pour ce dernier tome. La violence politique atteint son paroxysme, et chacun doit choisir son camp. La trahison de Jenner a été douloureuse, et c’est Gavar qui va se retrouver à jouer les agents doubles, manipulé par les deux camps. L’autrice fait longtemps planer le doute sur sa véritable allégeance et sa réelle liberté de mouvement. La brute est lentement mais sûrement devenu un père prêt à tout pour sa fille illégitime, et les dessous de la mort de son amante éclateront enfin au grand jour. Gavar, par à-coups, aura gagné sa place au centre de cette histoire.
Mais celle qui surprendra le plus, c’est Abi. La gentille étudiante en médecine est brisée par la mort de ses parents, et envisage une action beaucoup plus radicale, suicidaire, pour mettre à bas le pouvoir des Jardine. Elle trouve inopinément un allié de poids avec Chien, que Silyen a libéré de nombreuses entraves. Abi incarne tous les espoirs déçus de ce conflit social, et il est douloureux de la voir se préparer au pire, même si cette démarche est cohérente avec son engagement en médecine : savoir parfois sacrifier des tissus sains pour retirer une tumeur...

Loin des tumultes politiques, Luke et Silyen marchent sur les chemins de la magie. Après un sauvetage dramatique chez Lord Crovan, ils vivent des expériences mystiques, et l’un avec ses connaissances, l’autre avec sa logique, ils s’interrogent sur les « trous » dans l’histoire de l’Angleterre, et finissent par dénicher l’ancien roi, qui leur content la naissance - sanglante, quelle surprise - des Puissants. Le Roi leur confie la tâche de ramener le monde sur la bonne voie, en supprimant la magie.
Mais dans le maelstrom final, tandis que Jardine s’apprête à exécuter certains rebelles captifs, Vic James entremêle finement les ambitions affichées et cachées de chacun, jusqu’à nous surprendre sur le coup de poignard final, qu’on se prend à relire plusieurs fois, avant de trouver confirmation dans les pages qui suivent. Tout ne finit pas bien, mais pour le mieux, dira-t-on, époustouflé par la conclusion de cette saga et du destin de ses personnages.

On ne peut qu’être essoufflé en refermant la saga des « Puissants ». Vic James nous aura montré comment s’écroule un système apparemment incontesté mais profondément inégalitaire : les germes de la contestation sont dans les deux camps, et la réponse répressive, comme devrait nous l’avoir appris l’Histoire, n’est jamais la bonne. L’ambition personnelle d’une famille, les intrigues individuelles ne fonctionnent qu’un temps, et engendre chaque fois plus d’ennemis, et la terre brûlée n’est guère viable : lorsqu’on l’envisage, c’est qu’il est déjà trop tard.
Chaque dystopie est le reflet d’une époque, et les « Puissants » collent, hélas, parfaitement à la France - voire l’Europe - actuelle, avec une élite autocratique et déconnectée, aussi prompte aux alliances qu’aux trahisons, imposant sa loi par la violence.

Une très belle trilogie, profondément humaine, radicalement politique, avec ce qu’il faut de fantastique, teinté de merveilleux, pour nous permettre de croire qu’il ne s’agit que de fiction.

Titre : Libres
Série : Les Puissants (Dark Gifts), tome 3/3
Autrice : Vic James
Traduction de l’anglais (GB) : Julie Lopez
Couverture : NC
Éditeur : Nathan
Collection : Littérature
Site internet : page roman (site éditeur)
Pages : 460
Format (en cm) :
Dépôt légal : avril 2019
ISBN : 9782092570425
Prix : 17,95 €

Les Puissants :
1 - « Esclaves »
2 - « Égaux »
3 - « Libres »