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115 degrés vers l’épouvante
Lazare Guillemot
Les moutons électriques, les saisons de l’étrange, roman (France), aventures, 202 pages, mars 2018, 15€

1925, Cornouailles. Orphelin recueilli par sa tante, Billy Babbridge améliore l’ordinaire en guidant des touristes comme le Père Brown, un prêtre anglais, sur les sites mégalithiques des environs. Mais ce jour-là un nuage en forme de crapaud s’avère particulièrement agressif. Un avion vient à leur secours, dissipant l’horreur. C’est ainsi qu’ils font la connaissance de Hareton Ironcastle, sa fille Muriel et son neveu Sidney Guthrie, aventuriers émérites également intéressés par les mégalithes.
D’autant que certains ont disparu. Pff, envolées, des pierres de plusieurs tonnes.
D’autres horreurs les assaillaient, une sorcière, des champignons, et d’autres crapauds, poussant les aventuriers à quelques explications : une secte de créatures malfaisantes cherche à rassembler les fragments d’un Clé, éparpillés de l’Afrique à l’Irlande, sur une diagonale de 115°, dans le but de réveiller, pour ce qu’ils en savent, une horreur appelée Tsathoggua...



La collection “Les saisons de l’étrange” rassemble des textes plus populaires, au sens noble du terme, que ce que publient habituellement les Moutons électriques. Quelque part entre le pulp et le roman rétro, « 115° vers l’épouvante » nous lance dans une aventure au doux parfum de cuir, de thé anglais et de bave de crapaud.

La balade dans les bocages cornouaillais tourne court, interrompue pas une irruption toute lovecraftienne : un crapaud-nuage pas vraiment sympathique. Puis arrive le reste de l’équipe des héros de cette histoire, un trio d’aventuriers tout droit sorti des œuvres de Rosny aîné. Avec ces facilités de gens aussi expérimentés que richissimes (ce détail permettant d’éviter bien des écueils et d’instaurer un certain standing), ils vont sauver le monde.

Au travers de l’explication aux deux nouveaux éléments, le Père Brown également érudit et connaisseur des différentes formes du Mal, et de Billy, ado propulsé dans la plus grande aventure de sa vie, on nous distille les informations nécessaires, comment les Ironcastle se sont retrouvés mêlés à cette aventure. Récit enchâssé plein de trous, d’hypothèses, mais aussi de suffisamment d’indices pour saisir leur arrivée en Irlande avec armes et bagages mais... un temps de retard. L’ennemi est déjà là.

Une fois l’ambiance posée, c’est la course contre la montre qui commence, avec un exotisme très à la mode dans la littérature du début du siècle : passage obligé par les côtes africaines, l’Egypte et le Canal de Suez. L’occasion d’un rappel sur l’état du monde méditerranéen en 1925 et des empires coloniaux.

On ne peut que sourire à des plans archi-classiques, comme les repas gastronomiques servis par le chef français dans le yacht des Ironcastle, ou la facilité avec laquelle l’aventurier règle ses affaires, en deux coups de téléphone. Ces moments alternent avec les rencontres des créatures surnaturelles, et engendrent un rythme en dents de scie, explications / action, qui passerait sans doute très bien à l’écran.

L’idée d’une plante télépathe venue de la jungle profonde semble sympathique, elle se transforme vite en un palliatif aux téléphones portables. Son usage, jusqu’à la corde, finit donc par lasser.

Si la conclusion est dantesque, convoquant les plus grands effets visuels, avec puits dans l’océan et apparition titanesque, la dramaturgie est tuée dans l’oeuf par une résolution simpliste et trop rapide.

Bref, si vous êtes fan d’Indiana Jones ou de ces aventures au charme rétro comme « Le Monde perdu » de Conan Doyle ou les films de la série « La Momie », « 115° vers l’épouvante » devrait vous satisfaire. Quoiqu’un peu bavard et finalement plan-plan, car bien dans le style des romans qu’il pastiche, le récit fait la part belle au fantastique mais, trop prosaïque, ne laisse jamais vraiment l’horreur lovecraftienne s’installer.

Pour le coup, un vrai roman de gare, distrayant mais bien peu mémorable. A trop vouloir imiter le genre, le roman de Lazare Guillemot ne fait montre d’aucune réelle originalité. Idéal pour s’initier en douceur aux aventures lovecraftiennes, mais à mon goût il y manque quelque chose : de l’humour, de l’auto-dérision, davantage de fond, de densité... ?


Titre : 115° vers l’épouvante
Auteur : Lazare Guillemot
Couverture : Melchior Ascaride
Éditeur : Les Moutons électriques
Collection : Les saisons de l’étrange
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 202
Format (en cm) : 18 x 14 x 1,5
Dépôt légal : mars 2018
ISBN : 9782361834425
Prix : 15 € ou 6,99€ en EPUB


Note : un officier du yacht s’appelle Vince Actussev, clin d’œil évident à Jérôme Vincent, des éditions ActuSF.


Nicolas Soffray
15 avril 2019


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