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Galaxies n°56 (Nouvelle Série)
Directeur de publication : Pierre Gévart
Revue, n°56, SF - nouvelles - articles - critiques, novembre 2018, 192 pages, 11€

À l’occasion du centenaire de la fin de la Guerre de 14-18, « Galaxies » consacre un dossier à ce conflit, s’intéressant notamment à son impact sur la production des récits de ce que l’on appelait alors le merveilleux scientifique. Chiffres à l’appui et sans s’attarder sur le pourquoi, Patrice Lajoye montre comment le nombre de titres par an a drastiquement baissé durant cette période. De nombreuses nouvelles d’époque figurent en ses pages, avec toujours en toile de fond la guerre.



Didier Reboussin a écrit un article sur le militaire et politicien Émile Driant, mort dans les premiers jours de la bataille de Verdun, et qui a signé quantité d’ouvrages d’anticipation sous le nom de plume de Capitaine Danrit. Cette figure controversée est présentée à travers son œuvre annonciatrice du conflit et qu’il semblait appeler de ses vœux, et du contexte d’alors avec les tensions dues à la séparation de l’église et de l’état. Toujours instructif.
Les lecteurs découvrent aussi grâce à Patrice Lajoye les inventeurs qui n’avaient de cesse de chercher les moyens d’occire le maximum d’ennemis par des méthodes plus ou moins farfelues. “Le char du diable” (1917) du Russe Valentin Frantchitch met en scène un énorme véhicule pour mater une manifestation. “Le dreadnought aérien”, un extrait de « Le savant, étude actuelle » de son compatriote Nikolaï Lvov imagine un énorme aéronef destructeur. Avec “L’étrange aventure” (1916), Sirpe aborde le thème de l’invisibilité et le regret d’un protagoniste que cela ne puisse servir à l’effort de guerre. Autres récits d’alors : “Les alliés” (1917) d’André Couvreur autour d’un jeu de mots et qui illustre la haine éprouvée envers les Allemands. Particulièrement de mauvais goût ! “L’homme aux yeux radiographiques” (1928) du Norvégien Frøis Frøisland est le résultat d’une grave blessure sur le front. Son corps en aborde les stigmates et il est affublé d’un don défrayant le monde scientifique.
Un article présente « L’énigme de Givreuse » de J.-H. Rosny aîné et « L’homme truqué » de Maurice Renard, deux romans d’anticipation parmi les rares datant de la Grande Guerre, et un autre revient sur Jean de la Hire et son imaginaire fortement imprégné des écrits de H. G. Wells.
Trois nouvelles actuelles poursuivent le dossier. Avec “Les chants de l’engoulevent”, Sylvain Lamur met en avant la superstition, avant un dénouement pour le moins inattendu et qui n’est pas sans faire écho avec “La complainte des belles” de Meddy Ligner dans laquelle une fille cherche à savoir ce qui a pu tant marquer son père. Les deux imaginent une intervention alien salvatrice mais uniquement pour certains. En plus de signer la couverture et les illustrations intérieures, Caza livre aussi une courte nouvelle pleine d’humour : “Midi à quatorze-dix-huit heures”.
Pour conclure ce dossier très bien orchestré par Patrice Lajoye, “Anticipation” publié dans « Le Canard Enchaîné » et repris dans le « Bochofage » (journal de tranchées) daté du 16 et 17 novembre et décembre 1917 se projette dans l’après conflit où les visiteurs des champs de bataille n’arriveront toujours pas à se mettre d’accord. Une vraie curiosité !

Dans les nouvelles hors dossier se distingue “La guérisseuse (aux rives prochaines)” de Claude Mamier. Dans un monde uchronique, Essam a survécu à l’engloutissement d’Alexandrie. Il en a conservé une phobie de l’eau et il ne parvient pas à franchir le Pont-Neuf enjambant le Tarn à Albi. Comment vaincre cette peur enracinée au plus profond de son être ? Une nouvelle prenante à l’atmosphère feutrée et au contexte intrigant.
“Dieu est mon miroir” de Paul Hanost ressemble au résumé d’un livre et narrée ainsi ne présente guère d’intérêt.
“Bodythèque” de Wilfried Renaut a beau avoir terminé seconde ex-æquo du Prix Alain le Bussy 2018, l’idée de changer de corps de la sorte m’est apparue trop incroyable pour adhérer à l’ensemble, et ce d’autant que l’auteur ne fait pas dans la dentelle jusqu’à la fin.

Dans la partie rédactionnelle, Jean-Guillaume Lanuque revient sur The Alan Parsons Project et son album « I Robot ». J’admire toujours cette rubrique “Musique et SF” et la lit avec intérêt avant de me jeter sur les morceaux mis en avant.
Dans sa “Croisière au long du Fleuve”, Didier Reboussin aborde Pierre Barbet, l’auteur entre autres de « L’empire du Baphomet » et « Babel 3805 ».
Deuxième partie de l’article sur l’innovation dont je ne comprends pas trop ce qu’elle vient faire là.
Dans cette livraison se trouve une importante partie critique de presque 60 pages, quasi le tiers du numéro. Démonstration à l’appui, Claude Ecken dit que l’on aurait tort de se féliciter de la nouvelle traduction de « 1984 » d’Orwell, car Josée Kamoun n’est de loin pas restée fidèle à l’œuvre originale et que des mots tombés dans le langage courant sont passés aux oubliettes.

Un important dossier dans l’air du temps et qui fait la part belle aux récits d’époque, ce qui est d’autant plus intéressant que le conflit est toujours de manière plus ou moins directe en arrière plan, une très belle nouvelle de Claude Mamier, un Claude Ecken en forme, un bon numéro de « Galaxies ».


Titre : Galaxies Nouvelle Série
Numéro : 56 (98 dans l’ancienne numérotation)
Directeur de publication et rédacteur en chef : Pierre Gévart
Couverture et illustrations intérieures : Philippe Caza
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, entretiens...
Site Internet : Galaxies
Dépôt légal : novembre 2018
ISSN : 1270-2382
Dimensions (en cm) : 13,8 x 20,9
Pages : 192
Prix : 11€



Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
8 février 2019


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