Dans “Superposition”, David Walton transpose les lois de la physique quantique à la vie de tous les jours, c’est-à-dire que ce qui est vrai au niveau microscopique peut aussi s’appliquer au macroscopique. Contrairement à la mécanique classique, la position d’un électron par exemple est inconnue, il faut raisonner en densité de probabilité de présence. Il peut se trouver en une infinité d’endroits en même temps, et son spin, son mouvement giratoire, peut être positif comme négatif. Il n’est ni l’un ni l’autre, mais les deux à la fois tant qu’il n’est pas observé. Cette notion de spin négatif ou positif est illustrée par les termes horaire et antihoraire, dont David Walton use pour nommer les chapitres. Vous suivez ?
Le professeur Roland Lehoucq, bien connu des lecteurs de « Bifrost », signe une postface pour éclairer les lecteurs sur la physique quantique qui doit être difficile à appréhender pour les novices en la matière.
À travers ses recherches, Brian a réussi à ouvrir une porte entre le microscopique et le macroscopique, à apprendre à manipuler la matière comme il le ferait des simples particules. C’est ainsi que des personnages vont exister à plusieurs états, comme Brian, mort dans le labo et vivant dans sa voiture, ou encore Jacob Kelley, soupçonné du meurtre, qui d’un côté est arrêté par la police et traduit en justice et de l’autre a réussi à fuir en prenant une autre sortie. « Superposition » suit ces deux versions de Jacob coexistant en même temps, l’un sous les verrous en plein procès et l’autre en liberté, cherchant à comprendre et à retrouver sa famille dont il a vu presque chaque membre mort. Il est clair que le postulat de base permet des développements des plus surprenants sous couvert de la science. Il faut accepter de rentrer dans le jeu, de subir plus d’une explication sur les phénomènes à forte connotation quantique. L’auteur abuse un peu du procédé et voir la facilité avec laquelle une des protagonistes plie les lois de la mécanique classique selon ses volontés ne peut que faire tiquer. Au bout d’un moment, il est difficile de tout accepter et alors il est tentant de décrocher ou de tout prendre pour argent comptant sans chercher à comprendre.
Fort à propos, David Walton a greffé une affaire policière dans le récit qui alterne entre la version de Jacob en liberté et très versée sciences et le Jacob arrêté bien plus terre à terre. Bien sûr, avec le temps, les fonctions d’ondes des deux ne peuvent que se rejoindre... Qui a tué Brian Wanderhall ? Et comment faire comprendre au jury que Jacob est innocent ? En semant le doute à force renfort de mécanique quantique où un élément peut exister à différents stades ? L’auteur présente aussi l’évolution de la relation entre un père et sa fille qu’il voit sous un autre jour, car elle n’est plus cachée derrière son frère et sa sœur. Il offre ainsi des temps ancrés dans le quotidien, permettant aux lecteurs de ne pas crouler sous l’avalanche quantique.
Le grand mérite de David Walton tient dans la mise en avant de la mécanique quantique, un champ peu usité et qu’il transpose dans notre quotidien afin d’en étudier les possibilités. Son pan policier rend plus ludique des notions très abstraites difficiles à accepter et le terme Thriller quantique lui sied très bien. Il est toutefois regrettable que l’auteur abuse trop de certains postulats - on pourrait parler de facilités - comme s’il voulait démontrer que rien n’est impossible.
Même si « Superposition » peine parfois à convaincre, il faut reconnaître son originalité qui aurait mérité d’être mieux canalisée.
Une curiosité !
Titre : Superposition
Auteur : David Walton
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Éric Holstein
Couverture : Ugo Bienvenu
Éditeur : Gallimard (1ère édition française : Éditions Actu SF, 2016)
Collection : Folio SF
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 444
Format (en cm) : 10,9 x 17,8
Dépôt légal : août 2018
ISBN : 9782072721274
Prix : 8,30 €
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