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Père et fils
Radio libre Albemuth de Phillip K. Dick - Lunarpark de Bret Easton Ellis
Délices et Daubes N°3

En voilà deux livres qu’ils sont bons ! C’est pas tous les jours en ce moment, grogntudju !



Je viens de finir Radio libre Albemuth, de Phillip K. Dick, Folio SF, un roman posthume introduisant (dit le traducteur préfacier) la trilogie divine et mystique. Je ne l’ai pas lu comme ça mais comme un roman de SF normal, si on peut dire ça de ce qu’écrit maître Dick.
Un livre très engagé politiquement contre le président des Etats-Unis, F.F.Fremont (666 le diable, à l’époque Nixon, aujourd’hui GW) et ses services secrets, qui exercent leur dictature sur les corps et les esprits, alliés de fait avec les communistes.
Thomas Brady, le copain de toujours de Phil l’écrivain, a une soudaine révélation. Le Penseur de l’Univers lui parle à travers un satellite extraterrestre en provenance d’Albemuth. Il est même contaminé par une entité plasmatique qui guérit ses maladies, lui dicte ses actions et le rendra immortel en esprit (cela paraît confus et embrouillé mais c’est parce que je veux faire court). Phil assiste à tout ça jusqu’à l’exécution de son ami par la police.
Le livre se termine bizarrement sur une note d’espoir : le monde sera peut-être sauvé quand même, grâce aux enfants. C’est très fort, très prenant (bien que parfois longuet au début). C’est un vrai livre avec des vraies questions sur la religion et sur la liberté, et avec cet étrange dédoublement schizophrénique de Phil et Thomas, quand le narrateur devient personnage.

Cette lecture (pas un délice, trop triste, mais un très bon livre) m’a fait penser à Lunarpark de Bret Easton Ellis (un autre bon livre). Mon premier Ellis, impressionnant.
Très lisible, malgré les nombreux effets de style. Il y a même du Stephen King pour le fantastique en toc et de la poésie sur les garçons qui disparaissent chez Peter Pan ! Plein de choses sur la défonce, sur la relation aux enfants et sur, thème central, la relation père-fils dans les deux sens. Un peu gênant sur le côté surfric et branchouille, mais très certainement un grand écrivain. Et, pour en revenir à Dick, les mêmes questionnements sur le dédoublement et la schizophrénie du romancier qui raconte sa vraie fausse vie.
Il y a beaucoup plus de drogues chez Ellis qui l’assume que chez Dick qui nie leur utilisation. La révolte pour trouver vérité et liberté est toute personnelle, comme la problématique des rapports père-fils chez Ellis quand chez Dick elle implique de contester la société, le monde et la religion.
Aujourd’hui (Ellis), on essaie de sauver sa tête (sa pensée consciente et sa liberté) en s’interrogeant sur soi et ses rapports avec sa famille alors qu’hier (Dick), on se posait les mêmes problèmes mais la solution était recherchée au niveau de la société, en termes politiques. Et pourtant le Monde n’a pas changé, USA et Russie sont objectivement alliés pour l’économie de marché, L’Irak a remplacé le Vietnam, Bush Nixon, et Dick pourrait écrire le même bouquin aujourd’hui, en encore plus pessimiste, sans note d’espoir à la fin. Ses enfants (Ellis en tête) recherchent le bonheur et la liberté dans leur petit cercle fermé, les autres, les pauvres, les opprimés peuvent bien crever. On ne peut rien pour eux, pensons à notre nombril.
Mais ce sont vraiment deux bons bouquins qui consolent de trop nombreuses déceptions et qui réconcilient avec la lecture.


Henri Bademoude
1er mai 2006


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