Electriciteit serait une sorte de légende maritime, une île apparaissant sans crier-gare dans l’océan pour disparaître peu de temps après. Certains anciens lui ont même donné un surnom : l’île errante. Comme si elle se devait de la trouver pour honorer la mémoire de son grand-père, Mikura commence à réunir toutes les informations qu’elle peut trouver dans les notes, écrits se trouvant chez le vieil homme. Une forme de logique dans le déplacement de cette île semble peu à peu se former dans l’esprit de Mikura qui décide alors de survoler la zone où devrait apparaître Electriciteit. Des amis acceptent même de l’aider, mettant à sa disposition leur navire et leur sonar. Une île même errante ne doit pas pouvoir passer totalement inaperçue ? Attendant patiemment le bon repérage, elle délaisse peu à peu son travail. Mais un jour, Seijuro repère une grosse masse qu’il prend pour un groupe de baleines. Il commence à se faire tard, mais Mikura n’en a cure, elle part sur la zone. Et ce qu’elle découvre la laisse sans voix : ce qui apparaît flottant sur l’eau ressemble à un village dérivant au gré des flots... un village qui n’aime pas les intrus...

Kenji Tsuruta est un vétéran touche-à-tout. Manga, animation, illustration, Kenji Tsuruta a commencé par étudier la photographie avant de se lancer dans l’écriture et les mangas, inspiré par des auteurs comme Yukinobu Hoshino (“Le Trou bleu”, “2001 Nights Stories”). Remarqué par le magazine seinen Morning de Kodansha, il sortira chez cet éditeur ses plus grands succès. Connu pour ses œuvres de science-fiction, il nous offre ici une histoire tout en poésie, en finesse, plus proche du fantastique.
La collection Latitudes nous a habitué à des récits mélangeant rêves et réalité. avec “L’île errante”, nous suivons Mikura dans sa recherche de cette île mystérieuse où une habitante attend un colis que devait livrer son grand-père. Cette recherche est aussi une quête, un voyage afin d’enterrer réellement ce grand-père qui a fait d’elle un pilote d’hydravion sans véritable attache à part lui. Trouver Electriciteit devient même vital pour la jeune femme qui finit par ne vivre que par cette recherche sans grand espoir. Car Electriciteit est comme un Graal, seuls ceux qui le méritent ont droit de non seulement la voir mais y poser les pieds. Car cette île est aussi rebelle, faisant fuir les petits curieux et les petites curieuses. Mikura apparaît alors comme ce qu’elle est vraiment devenue : une jeune fille courant depuis longtemps après des fantômes. Sa recherche devient obsessionnelle et son physique marque le coup, surtout qu’elle ne parvient pas à s’approcher de l’île et que celle-ci ne semble passer au large que tous les trois ans.
Graphiquement, “L’Île errante” est tout simplement magnifique. Chaque planche est d’une richesse incroyable. Beaucoup n’ont pas de dialogue, elles n’en ont nullement besoin, la poésie, le sentiment qui s’en dégage parle de lui-même. Kenji Tsuruta nous montre qu’il a toujours l’œil du photographe. Certaines de ses planches apparaissent comme des photographies venant immortaliser un moment de la vie de Mikura. Pas toujours gai, mais toujours d’une certaine importance. Il parvient également à rendre le côté panoramique des vues d’avion, et pas seulement avec une double page. Ses paysages sont bluffant de réalisme et la première vision qu’il nous offre de l’île errante est tout simplement à couper le souffle. L’immersion est totale et l’empathie pour Mikura naît naturellement, on aimerait l’aider dans sa quête tout en lui rappelant qu’elle ne doit pas oublier les vivants.
“L’Île Errante” est une fable magique, une recherche, une vision utopique incarnée par l’île. Un moment de pur bonheur.
IIe Errante (L’) (T1)
Auteur : Kenji Tsuruta
Traducteur : Géraldine Oudin
Éditeur français : Ki-oon
Format : 170 x 240, noir et blanc - sens de lecture original
Pagination : 192 pages
Date de parution : 7 septembre 2017
Numéro ISBN : 979-10-327-0185-0
Prix : 15 €
BOUKEN EREKITE TOU © Kenji Tsuruta / Kodansha Ltd.
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