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Moby Dick (T2) la Chasse
Pécau (d’après Melville) & Pahek
Delcourt

Au plus profond de l’espace, le vaisseau du Capitaine Achab fait la chasse aux astéroïdes et météorites divers et variés. Le but de la manœuvre ? Récupérer de bien rares et précieux minerais dont l’humanité a un pressant besoin...
Mais le Capitaine Achab a cependant une obsession chevillée au corps. Retrouver la terrible Moby Dick, une espèce de comète à la trajectoire imprévisible et vaincre la malédiction en harponnant enfin le monstre errant une bonne fois pour toute...



Alors que la planète BD bruisse souvent de rumeurs étranges, qu’une certaine homogénéisation des scénarii et que le conformisme graphique de quelques dessinateurs s’ingénient à multiplier des histoires de chevaliers au grand cœur sur tous les modes, il est encore quelques vrais créateurs en ce bas monde. Dieu merci !

Bien sûr, on ne vous la fera pas, Jean-Pierre Pécau et Zeljko Pahek ont adapté un classique des classiques, le fameux « Moby Dick » de Herman Melville. Roman d’aventures maritimes mais aussi épopée philosophique et intérieure -ou quand une obsession détruit celui qui n’a pas eu l’intelligence d’y renoncer- ce pilier de la littérature mondiale fait une étonnante bascule en mode BD.
Il devient de la SF pure et dure ! Est-ce un hasard ? Sûrement pas !

Certains se souviennent sans doute de l’adaptation cinématographique du grand réalisateur américain John Huston et peut-être se rappellent-ils du nom d’un des co-scénaristes... Rien moins que Ray Bradbury, jeune écrivain révélé par ses « Chroniques Martiennes » quelques années auparavant. Le choix était déjà risqué à l’époque, coup de cœur et coup de maître, le film figure au Panthéon du cinéma.
Tout cela pour signaler (gentiment !) que l’idée de Pécau et Pahek fait plus que tenir la route et s’inscrit dans un cadre finalement très logique. « Moby Dick » en dit trop sur l’âme humaine pour ne connaître qu’un type d’adaptation ancré dans le réalisme. Ses relectures sont forcément multiples et la transfiguration du récit sous un éclairage spatial et SF ne pourra qu’enchanter le lecteur curieux.

Encore fallait-il se hisser au niveau.
Après tout, si l’on peut faire ce que l’on veut d’un grand roman, on ne peut pas le faire n’importe comment. De ce point de vue, le scénario innove et crée dans les interstices du récit (situation temporelle, décors, géographie spatiale), matière à rêver intelligemment. Moby Dick n’est plus une baleine blanche tueuse (une espèce de cachalot albinos, en fait) mais une comète au parcours hiératique et meurtrier. Et puisque la pêche (spéciale dédicace à Ketty !) au mammifère marin est compromise, autant aller chercher de bien rares minerais à grands coups de voyages intersidéraux et de harponnages hightech ! Bien vu, les gars.

Ceci dit et posé, plus que le scénario foncièrement imaginatif et bien maîtrisé, ce que l’on souhaiterait souligner aux amateurs d’images, ce sont les dessins de Pahek. Voilà bien un style graphique original et de grande ampleur. D’une belle amplitude aussi. Explosions des blancs et des noirs, jeux perpétuels sur des tonalités changeantes au fil des pages, un trait torturé et tourmenté retranscrivant les tourments intérieurs des principaux personnages, cadrages et découpages ambitieux, « Moby Dick, La Chasse » étonne et émerveille. L’œil est saisi, malaxé, la vision d’ensemble surprend et retourne l’esprit. Soyons francs, si vous n’avez pas doublé le cap de la ligne claire, la traversée va être rude avant de toucher cette terra forcément incognita pour vous !

Cependant, passé le stade initial de la découverte, l’enchantement sera à votre porte. Étoiles tentaculaires, géodes spatiales improbables, jets de lumières, contrastes permanents, « Moby Dick, La Chasse » multiplie les opportunités d’obtenir quelques souvenirs visuels durables. Au final, l’empreinte sera faite. Irrémédiablement.
Vous aurez entre les mains une œuvre rare, dure et parfois difficile. Un de ces bouquins qui incitent à la révérence et poussent à saluer le courage éditorial de l’éditeur. Les éditions Delcourt, en l’occurence.

La très belle couverture de Manchu profite agréablement d’un vernis sélectif réservé à la première édition de ce tome 2 et c’est avec beaucoup d’émotion que l’on referme -jusqu’à la prochaine lecture- ce superbe objet.
Du grand art, tout simplement.


La Chasse
Série : Moby Dick (T2)
Scénario : Jean-Pierre Pécau, d’après le roman de Herman Melville « Moby Dick »
Dessins & couleurs : Zeljko Pahek
Lettrage : Laurence Cassegrain
Couverture : Manchu
Éditeur : Delcourt
Collection : Néopolis
Pagination : 48 pages couleur
Format (en cm) : 24 x 1 x 32 (cartonné)
Dépôt légal : septembre 2005
ISBN : 2-84789-813-1
EAN : 9 782847 898132
Prix : 13 €


À lire sur la Yozone : Moby Dick (T1) New Bedford


© couverture et illustrations publiées avec l’aimable autorisation des auteurs et des éditions Delcourt.




Stéphane Pons
11 mars 2006




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