« AOC », miroir littéraire du club Présence d’Esprit, donne sa chance aux chères têtes blondes que les mondes de l’imaginaire inspirent. C’est un travail évidemment respectable et difficile, l’objet de cette critique n’est donc pas de distribuer bons ou mauvais points, mais bien de souligner ce que subjectivement je relève comme défauts ou qualités pour permettre aux auteurs d’avoir une vision tierce - forcément partisane - de leurs créations.

Premier texte proposé : “Racines”, d’Ismène Fleury. Il nous est ici conté l’histoire d’une famille de bohémiens isolée dans un village lui-même perdu quelque part dans une lande peu hospitalière, et des rapports hostiles que les habitants du dit village éprouvent à leur égard. J’ai trouvé que l’ensemble manquait de couleurs et les personnages d’épaisseur, mais l’ambiance désespérante de cet univers sans horizon est bien rendue, on pense aux dessins de Fred et en particulier au « Petit Cirque ». Le fantastique nous rattrape à la fin.

Versant davantage dans la fantasy, “La Tour dans le Labyrinthe” de Christophe Guillemain raconte, comme le texte précédent, une histoire de vengeance, mais en faisant appel à l’arsenal classique de ce genre de littérature, à savoir magiciens, monstres, guerriers... J’en ai trouvé l’écriture un peu maniérée mais l’ensemble se laisse lire sans déplaisir et l’évocation de cette île, de son labyrinthe (peut-être un peu trop vite traversé) et de la tour du magicien est assez réussie. Les personnages de Jahela et du capitaine Konrad ne manquent pas d’humanité.

“Un Monde Parfait” de Dominique Chapron ne m’a pas vraiment convaincu. Cette évocation parallèle de la Création et du pêché originel manque de crédibilité et l’histoire est vraiment tirée par les cheveux. Mais je confesse ne pas être un grand amateur de fantasy, et certaines trouvailles relèvent d’une vraie poésie, tel l’arbre du souvenir et ses petites fioles qui conservent ceux des hommes... Peut-être ce texte aurait-il eu pour moi un impact plus fort s’il avait été traité en vers ?

Dernière nouvelle de la série, “Nous voyons loin” d’Éric Morlevat est intéressante à plus d’un titre. D’abord par l’originalité du thème abordé, la finalité de la conquête spatiale, et par l’angle surprenant que l’auteur a choisi pour cela : le financement du rêve à la réalité grâce à une subvention illimitée de la part d’un émir. Un texte à la fois coquasse et profond, une petite révélation.

Ce numéro s’achève avec trois courts textes issus d’un match aux Imaginales. Le principe en est le suivant : en un temps donné, à partir d’un thème et de deux contraintes imposés, l’élève doit accoucher d’une histoire si possible cohérente. Je dois avouer ma surprise à la découverte de ces résultats ! Aucun doute, l’imagination est au pouvoir et nos trois auteurs gagnants (Tom Ariaudo, Élodie Serrano et Lia Guillaumet) ont réalisé des récits très réussis à la base d’idées dont il m’aurait fallu, en ce qui me concerne, des mois avant d’être en mesure de livrer quelque chose. Belle prouesse de la part de ces auteurs.

Un numéro agréable et varié donc, qui donne un aperçu convaincant des talents qui fleurissent actuellement dans notre petit monde.

Titre : AOC
Numéro : 39
Directeur de la publication : Jocelyn Talureau.
Rédacteur en chef : Olivier Bourdy
Couverture : Éric Faure-Brac
Type : fanzine
Genre : Science-fiction, fantasy, fantastique
Site Internet : le club Présences d’Esprits ; le numéro 39
Période : hiver 2016
Périodicité : trimestriel
ISSN : 1772-3442
Dimensions (en cm) : 12,9 x 19,7
Pages : 78
Prix : 3,50 €