Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Alibis n°55
L’anthologie permanente du polar
Revue, n°55, polar, noir & mystère, nouvelles - articles – critiques - interview, été 2015, 160 pages, 12,95$ CAD

Comme d’habitude, Bernard Duchesne nous livre une couverture illustrant magnifiquement une nouvelle du numéro. La présente s’avère intrigante à plus d’un titre avec cet être bicéphale, en réalité, ils sont deux à se partager le même corps, il s’agit des frères Omerović, chacun en dirigeant certaines parties.
Ces siamois sont au cœur de la nouvelle “L’Écho du Terroir” de Camille Bouchard, qui a remporté le Prix Alibis 2015.



Ils appartiennent au monde du spectacle, jouant du piano malgré ce handicap. Leur agent Ghislain Gauthier chapeaute aussi une jeune chanteuse au talent discutable, mais son père étant un milliardaire russe, il se plie à ses exigences. Quand elle est retrouvée morte dans la suite des siamois, l’un des deux, Zlatan, avoue le meurtre. Comme Mevlid, son frère, dormait pendant ce temps, il est jugé innocent. Comment dans ce cas livrer justice, car ils partagent le même corps ?
Du fait de leur célébrité et de leur particularité, cet assassinat a fait les gros titres des journaux. Contre toute attente, ils ont choisi de livrer leur version des faits à un petit journal local canadien : “L’Écho du Terroir”. Maxime Paquet est envoyé sur place.
Ce texte s’avère fascinant à de nombreux titres. Déjà, il s’affiche sur deux colonnes à l’image d’un article de quotidien. D’autre part, il tient aussi à ses personnages, en premier chef les frères Omerović dont les particularités sont livrées au fur et à mesure, éclairant les lecteurs sur leur cas et donnant une autre vision du meurtre. De plus, l’ensemble va bien plus loin que celui-ci, la mafia russe s’invite, il ne faut pas rigoler avec le paternel !
Il s’agit là d’une belle pépite, une véritable prouesse de Camille Bouchard qui capte à merveille l’attention des lecteurs. Pas étonnant qu’elle ait remporté le Prix Alibis 2015 à l’unanimité du jury !

Régulièrement des traductions de récits de Claude Lalumière figurent au sommaire d’« Alibis » ou de sa revue sœur « Solaris ». À chaque fois, il s’agit d’un temps fort et “Un désir secret pour la pluie” ne déroge pas à la règle. Ce texte décrit une relation bizarre entre un homme et une femme qui tous deux ont côtoyé Andrei. Ce dernier a posé son empreinte sur chacun d’eux, il les a séparés, avant que sa mort ne les ait à nouveau réunis. Il y a un petit côté malsain sur l’ensemble, leur relation est ambiguë, chacun cherche dans l’autre la présence du disparu. Claude Lalumière a créé une ambiance lourde, chargée de regrets et en conclusion, il surprend par l’érotisme soudain de mise et qui révèle les personnages. Brillant !

Sylvain Boïdo nous plonge dans le passé, du temps des exécutions en public. En 1778, le fossoyeur et assistant de l’exécuteur des Hautes Œuvres de la ville de Paris rencontre une femme à la recherche des assassins de son promis. Ce dernier en a blessé un qui a succombé depuis et se trouve dans la dernière cargaison de morts, mais elle veut retrouver le second. Le fossoyeur tombe sous son charme et décide de lui venir en aide.
“Quand débordent les fosses” se révèle assez sordide. La morale est mise à mal, car le fossoyeur qui a bien sûr foi dans la justice est placé face à la réalité. La fin est poignante et immorale. Très réussi !

“Dégradations” de Frédéric Laflamme se déroule de nos jours et montre le pouvoir et l’attrait des réseaux sociaux sur les adolescents. Un acteur, une ancienne gloire à présent décrépite, est choisi pour une émission de téléréalité où il exauce le vœu d’un malade condamné. Ça l’emmerde mais il ne peut refuser et se retrouve à l’hôpital. La suite prend le lecteur au dépourvu. L’ado entend bien vivre son rêve jusqu’au bout...
Le déroulement est très bien vu, ainsi que la personnalité blasée de l’ex vedette. Efficace et percutant !

Maxime Houde déçoit un peu, car “Dernier round” s’avère plutôt classique. Pas de surprises avec ce casse qui finit mal. Johnny croit qu’en abandonnant le butin, il échappera au passé, mais ce n’est pas du tout le cas. Même si l’auteur nous immerge dans le noir, j’en attendais plus et la réactivité des policiers suite à l’acte désespéré de Johnny face à son hébergeur m’a semblé peu plausible.

Christine Fortier partage avec nous les propos recueillis avec Maxime Chattam. L’entretien est bien orchestré et s’avère très instructif sur l’écrivain, aussi bien dans sa méthode de travail que dans sa vie. Il est vrai que le passage en couleurs apporte à ce type d’articles, pourvu d’une importante iconographie, un relief supplémentaire.
Il en est de même pour le compte rendu des “Printemps Meurtriers de Knowlton 2015” réalisé par Morgane Marvier. J’apprécie toujours particulièrement ce genre de papier où se ressent très bien la passion du rédacteur. Elle a aimé la manifestation et elle nous le communique très bien.
Dans “Camera oscura” de Christian Sauvé, on retiendra plus particulièrement le passage sur « Fast and Furious 7 ». La mort de Paul Walker pendant le tournage figure encore dans toutes les mémoires. La conclusion du film s’avère à la hauteur du tragique événement avec les deux routes qui bifurquent.

Débutant en fanfare avec la nouvelle lauréate du Prix Alibis 2015, « Alibis 55 » fait très bonne impression. Un numéro de haut vol !


Titre : Alibis
Numéro : 55
Comité de rédaction et direction littéraire : Martine Latulippe, Jean Pettigrew et Pascale Raud
Couverture : Bernard Duchesne
Type : revue
Genres : nouvelles, entretiens, articles, critiques
Site Internet : Alibis ; numéro 55 
Période : été 2015
Périodicité : trimestriel
ISSN : 1499-2620
Dimensions (en cm) : 13,2 x 20,9
Pages : 160
Prix : 12,95 $ CAD



Pour écrire à l’auteur de cet article :
[email protected]


François Schnebelen
4 novembre 2015


JPEG - 30.2 ko



Chargement...
WebAnalytics