Silène est désespéré, ses ambitions viennent de s’écrouler avec les photos l’incriminant. Et l’ambiance chez lui devient détestable, entre son père qui le prend pour le pire des délinquants et sa mère qui le défend envers et contre tous. Dans ce genre de situation, il n’y a qu’une solution : aller se souler à grande dose d’alcool de shochu. Le bar où attérit Silène n’est pas le meilleur du coin mais vu son état déjà avancé d’ébriété, il s’en fiche royalement. Le barman est un étrange « adapté » au profil d’Anubis. Et ce dernier lui propose un étrange marché : il lui sert son meilleur alcool de shochu à la condition que Silène aille ensuite au mont Aicard. Mais pourquoi Silène a-t-il accepté sans réfléchir et bu ce verre ? Maintenant, il a ce fou furieux de Vega qui le suit comme un petit chien, devant vérifier que le jeune homme remplisse sa part du marché et parte pour Aicard. Seulement, ce n’est pas vraiment dans les projets de Silène. Mais malheureusement, Vega est un malade qui est prêt à tout pour le convaincre, comme voler les bandelettes de chirurgien de Silène et les lui ramener, le tout le moins discrètement possible pour la police le poursuive. Mais si finalement, Vega avait raison, si plus rien ne le retenait réellement chez lui ?

“Shochu” est la première association de Carole Bartier et Said Sassine. Il faut dire que la jeune scénariste ne s’est lancée dans la bande dessinée, et plus particulièrement dans le manga, qu’en 2009, après avoir vu les animés de “Death Note” et “Monster”. Bon, comme références, on peut dire que la demoiselle choisit le meilleur. En général, les références de Carole Bartier sont très hétéroclites mais reste toujours autour de mondes oniriques où la frontière avec la réalité est des plus ténues, comme dans le film “Fight Club” ou encore “Ça” de Stephen King. Il n’est donc pas étonnant que, pour sa première série, elle nous entraîne dans un monde imaginaire où les humains partagent leur territoire avec des animaux anthropomorphique, appelés « les adaptés ». Si le contexte culturel est à peine abordé, il est clair que les adaptés sont considérés comme des sous-races, des animaux qui ne méritent que d’être traités comme tels. Les animaux locaux sont appelés « shochu » et chaque espèce secrète une forme d’alcool pouvant être une délicieuse boisson comme un mortel poison.
Nous suivons l’histoire de Silène, un jeune privilégié destiné à la glorieuse carrière de chirurgien mais qui va gacher sa vie en trichant. Silène est plus un anti-héros qui, quelque part, mérite tout ce qui lui arrive puisqu’il est maître de son destin à tout moment de l’histoire. Même s’il ne veut pas tout de suite l’admettre, l’apparition de Vega est en réalité le déclic qui permet au jeune homme de s’échapper et partir à l’aventure, ce qui semble être sa véritable envie. Vega est le partenaire glauque, peu fréquentable classique du shonen ; On sent un peu du shinigami de “Death Note”, Ryuk, dans Vega, avec le même comportement nonchalant, mais avec plus de perversion chez Vega. La relation entre les deux personnages sera très ambiguë, entre haine et respect, Silène ne sachant trop s’il doit le détester pour lui avoir volé le peu qui lui restait de sa vie ou le respecter pour lui avoir ouvert les yeux sur son véritable destin. Les personnages secondaires sont peu développés, hormis James aux tendance homosexuelles se révélant peu à peu. Le personnage de Rita aurait mérité plus d’approfondissement, surtout que ses parents sont des adaptés. Comment est-ce possible ? On espère que Carole Bartier développera un peu plus les notions sur les adaptés dans le prochain tome.
Saïd Sassine s’est orienté vers le manga vers les années 2000 mais son style graphique est fortement marqué par le style Wakfu. Contrairement au shonen classique, ce dessinateur est plutôt du genre à noircir la feuille, au point parfois de nous submerger de détails qui alourdissent le dessin et rendent les planches un peu difficiles à lire. Toutefois, ses personnages ont chacun leurs caractéristiques propres, évitant toute confusion et sa vision des adaptés est vraiment réussie, sa version anthropomorphique de ces animaux ne choque pas et les rend même sympathiques. Les scènes d’action sont dans le plus pur style manga, avec des traits allongés créant le mouvement et la vitesse, déformant quelque peu les corps.
Ce premier tome de “Shochu” présente un univers qui apparaît assez complexe pour donner l’envie d’en savoir plus et surtout nous abandonne sur un cliffhanger surprenant qui ne laissera pas le lecteur indifférent.
Shochu on the rocks (T1)
Scénario : Carole Bartier
Dessins : Saïd Sassine
Éditeur : Ankama
Collection : Kuri
Format : 130x180 mm
Dépôt légal : 19 juin 2015
Pagination : 192 pages
Numéro ISBN : 978-2-35910-764-7
Prix public : 7,95 €
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