Mais rien ne se passe comme Takuro l’escomptait. Non seulement la jeune fille, vivant pourtant seule sur une ile, se refuse à lui mais elle lui déclare en aimer un autre. Takuro ne s’est pas ruiné pour se faire jeter dans un jeu vidéo et il décide alors de prendre les devants en forçant la jeune femme à lui faire l’amour. Mais en se débattant celle-ci le mord et s’enfuit. Cela pourrait s’apparenter à un bug mais en regardant sa main, Takuro découvre une trace de morsure. Malheureusement, hormis lui exposer son monde de luxure, Daisaku est incapable de trouver une explication à ce problème... ou plutôt celle qui aurait est totalement improbable. Ne voulant en rester là, Takuro repart sous les traits de son avatar rajeuni et amaigri pour retrouver Tsukiko. Si leur seconde entrevue part sur un meilleur pied, un autre fait anormal survient alors : la jeune fille réussit à percevoir le monde réel...
Kengo Hanazawa fut découvert avec sa série « I am a hero ». Il cassait la logique des seinen avec un antihéros à l’apparence plus que négligée. Il surprenait aussi en ne mettant en scène principalement que des gueules sortant du stéréotype du beau gosse et donc convainquant ceux aimant l’originalité et perdant ceux ne parvenant pas à se personnaliser dans un personnage. Alors soyons clair, pour cette dernière catégorie de lecteur, n’allez pas plus loin, pour les autres, les éditions Ki-oon nous font découvrir une des premières œuvres du mangaka. « Ressentiment » fut dans un premier temps publié en quatre tomes puis réédité en 2012 sous le format de deux doubles volumes. C’est cette réédition que nous présente l’éditeur français.
Kengo Hanazawa s’attaque ici à un style de jeu vidéo peu répandu en France mais extrêmement populaire au Japon : les jeux de drague. Rappelons que cette série date de 2005, l’année 2015 est donc alors un futur proche et non l’année prochaine comme aujourd’hui. Toutefois, le futur qu’il imagine est, côté sociétal, loin d’être aberrant : une crise économique, des rapports hommes femmes toujours bien compliqués... La seule erreur est bien sûr l’essor du virtuel 3D qui est encore loin de ce qu’imaginait le mangaka. Ce qui va devenir sa marque est évidemment présent : un antihéros repoussant par son physique ingrat, sa goujaterie, un Tanguy en mode beauf. C’est un novice côté jeu et il va se plonger dans ce milieu qui n’a clairement pas une bonne image chez le mangaka. Les joueurs de jeux de drague sont dépeints comme des pervers tous plus laids les uns que les autres ne cherchant qu’à se créer des harem virtuels. Le jeu que va s’acheter Takuro n’aura rien à voir avec ce qu’il attendait. Au lieu de retrouver une jeune fille soumise, il rencontre une vierge prude et déjà amoureuse. Bien malgré lui, il va quelque part se conformer aux règles classiques de séduction et découvrir que cette jeune Tsukiko n’est pas une créature virtuelle normale. Le fantastique prend peu à peu la place attendue mais avec aussi une curieuse dérive.
Alors que la première partie du tome redorait l’image de Takuro, la seconde partie nous montre un monde virtuel proche de la réalité, monde central des réseaux : Unreal. La petite Tsukiko retrouve celui qu’elle pense aimer et qui va brouiller sa mémoire. Elle se retrouve alors dans un bordel pour joueurs las de leur propre pute virtuelle. Difficile de trouver vraiment de la cohérence dans ce changement brutal. Et surtout, l’histoire tourne à la farce pornographique, avec l’arrivée d’un véritable personnage féminin, qui ne sera pas du tout mis en valeur. Elle est depeinte comme une arriviste, imbue d’elle-même et jouant avec ce pauvre Takuro. Le personnage de Tsukiko perd aussi sa fraicheur, avec cet amour pour son maquereau, amour éprouvé par toutes les autres filles de joie. Un amour presque incestueux car cet homme est sensé être leur créateur. Kengo Hanasawa entre sur des voies malsaines et provocatrices. Mais il nous réserve une ultime surprise avec des derniers chapitres surprenants. Voire même déconcertants. Mais le mangaka aime à provoquer son lecteur et parvient tout de même à éveiller notre curiosité car le lecteur ne peut rester sur cette fin de premier tome et il ne peut que vouloir savoir quelle conclusion nous a préparée Hanazawa.
Toujours aussi atypique, avec « Ressentiment », Kengo Hanazawa interpelle encore une fois le lecteur sans vraiment se positionner sur le sujet.
Ressentiment (T1)
Auteur : Kengo Hanazawa
Traducteur : Sébastien Ludmann
Éditeur français : Ki-oon
Format : 130 x 180, noir et blanc - sens de lecture original
Pagination : 464 pages
Date de parution : 9 octobre 2014
Numéro ISBN : 9782355927591
Prix : 9,65 €
RESSENTIMENT © 2012 Kengo HANAZAWA / SHOGAKUKAN
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