« Étrangère » se finissait douloureusement : nos héros étaient séparés. Nel et Syon, accompagnés de Telesme, venaient de tuer accidentellement un le Lié d’un Stellaire au coeur du mystère concernant leur île d’Enfenia, et prenaient la fuite. Isil, attaquée par la fanatique Indila, a failli mourir dans le Gouffre.

Dans une trilogie, l’épisode central est toujours compliqué. Exit la mise en place de l’intrigue et des personnages, et patience avant le dénouement. Il est souvent l’occasion d’un rebondissement dramatique, d’une mise en difficulté supplémentaire des héros. Souvent, ce n’est qu’un grand bout de chemin. Avec « Cendres », Samantha Bailly s’en sort plus qu’honorablement. Si ses personnages sont bien sur les routes, ralliant tous Luminelle, la capitale (Isil captive des Solaires, Syon, Nel et Telesme voyageant discrètement), où les attend La Lueur, ce voyage est riche en événements qui font avancer l’intrigue. On ne tiquera pas longtemps sur la mystérieuse « opération Cendres » dont Indila et Siao ne veulent rien révéler au capitaine Eroth, le seul Solaire amical avec Isil, puisqu’elle se réalisera rapidement : les Solaires rasent une ville du Nord pour, dans la logique de La Lueur, contraindre ces populations rétives au progrès à migrer au Sud et à rentrer dans le rang.

Ce voyage n’est pas non plus totalement innocent, il nous permet d’en apprendre plus sur la technologie d’Hermetis, et les conséquences du progrès lié aux mirières et du développement de Luminelle. On appréciera la collecte de chiffon pour répondre aux besoins grandissants en papier, notamment à cause de la machine administrative. Ce sera aussi l’occasion de ne pas mettre tous les Solaires dans le même panier. Le pouvoir est pour certains un honneur, pour d’autres un moyen. De faire quoi ? Le bien ou le mal ?

La révélation de l’identité de La Lueur, événement majeur, est adroitement placée en milieu d’ouvrage est non pas à la fin. Si elle ne surprendra que ceux qui, comme moi, aiment se laisser porter par les lignes (ou se faire avoir comme des bleus...), elle recentre l’intérêt sur le véritable mystère de cette histoire, celui d’Enfenia et de son Leviathan. Mystère qui s’éclaircit peu à peu, jusqu’à la conclusion de ce tome qui rebat complètement les cartes, en chamboulant brutalement une bonne partie de nos certitudes à propos de cette histoire. Un coup de maître pour Samantha Bailly, mais qu’on attendra d’autant plus au tournant dans le dernier volume, « Pluie », qui sera j’espère aussi surprenant.

Quelques légères réserves sur la couverture, beaucoup moins lumineuse et captivante que celle d’« Étrangère », et dont la perspective et les éléments architecturaux (pavage, colonnes) enferment les personnages, mais elle est finalement assez révélatrice de la noirceur qui s’installe dans cette seconde partie. Si elle dévoile un composant majeur de l’histoire, à savoir le pouvoir du bracelet de cheville d’Isil, la disposition des trois personnages, très symétrique, plaçant Eroth et La Lueur au même niveau, est un peu malvenue.

Titre : Cendres
Série : Souvenirs perdus, tome 2/3
Auteur : Samantha Bailly
Couverture : Prince Gigi (Thomas Girard)
Éditeur : Syros
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 292
Format (en cm) : 22 x 15 x 2,5
Dépôt légal : septembre 2014
ISBN : 9782748514872
Prix : 16,90 €

Souvenirs perdus
 Etrangère
 Cendres
 Pluie