Richard Ste-Marie revient avec son personnage fétiche : Hämmerli qui porte à présent la blouse, car il officie dans les hôpitaux. Pour “Docteur Hämmerli”, c’est plus facile de tuer une personne déjà mal embouchée, mais il aime toujours tenir les rênes de sa vie, faire selon ses envies.
Alors que l’on pouvait croire qu’il avait tourné la page, cessé son activité de l’ombre, il a changé de registre. L’auteur continue l’étude de ce tueur torturé par le passé, cet assassin qui n’a pas réussi la seule mission qui importait finalement. Espérons que la psychologie d’Hämmerli inspirera toujours Richard Ste-Marie, car ces rendez-vous sont toujours d’une grande profondeur.
“La dernière traque” de Rick Mofina porte bien son nom, car ce titre décrit parfaitement la fuite d’un prisonnier profitant de ce que l’avion qui le transportait se soit écrasé. Le seul autre survivant du crash, Garrett, se lance à sa poursuite, lui qui se demande toujours pourquoi il est encore vivant, lui qui ne se pardonne pas une mission ratée.
Rick Mofina place pas mal d’informations dans cette nouvelle car, en plus de Garrett, il s’attache aussi à la famille de la victime du prisonnier qui se rendait au tribunal. La fin est surprenante, à mi chemin du happy end. L’ensemble mêlant psychologie et action est prenant et laisse une belle impression.
Camille Bouchard revient dans l’univers des trafiquants, dans le cercle gravitant autour d’El Turco, formidablement mis en scène dans “Parce que, Paulina”, où Don Juan se sacrifiait pour sauver les enfants du chef de gang.
Là, c’est la femme de don Benito qui désire le quitter et demande l’aide d’un copain d’enfance qui sert de chauffeur dans un trafic de blanchiment d’argent. Comme il franchit régulièrement la frontière entre le Mexique et les États-Unis et que son mari quitte un temps la maison, elle voit l’occasion de prendre la fuite avec ses enfants. Entrera-t-il dans la combine ? À quel prix ? Quelles seront les conséquences ?
“Et de ton camion”, un nouveau morceau de bravoure signé Camille Bouchard qui montre un autre pan de cet univers fermé qu’il est interdit de quitter. C’est d’ailleurs intéressant de voir le contre-pied du précédent texte où la fidélité au boss primait sur tout. Ces plus de 40 pages nous transportent, elles se dévorent en une fois pour connaître le fin mot de cette histoire bien ficelée.
À travers trois œuvres, l’article de Norbert Spehner, “Montréal, ville ouverte et capitale du vice”, nous amène dans le quartier chaud : le Red Light dans les années 1940 à 1970. Bizarrement, c’est un auteur américain qui en parle encore le mieux ! Un très beau focus sur un lieu (The Main – Red Light) qui a actuellement droit à une exposition.
En plus de la traditionnelle rubrique “Camera oscura” de Christian Sauvé qui revient sur les héros vieillissants et compare des films à la même thématique, Pascal Raud interviewe Geneviève Lefebvre, l’auteure de deux romans noirs et un roman érotique.
Bien sûr, le cahier critique et l’aperçu des sorties du trimestre permettent aux amateurs de polar de faire leur choix.
Ce numéro s’avère réussi, tant au niveau des nouvelles que des articles, il est à la hauteur de la superbe présentation tout en couleurs.
Il est à noter que le prix unitaire qui a sûrement évolué n’est plus renseigné dans la revue.
Titre : Alibis
Numéro : 50
Comité de rédaction et direction littéraire : Martine Latulippe, Jean Pettigrew
Couverture : Bernard Duchesne
Type : revue
Genres : nouvelles, entretiens, articles, critiques
Site Internet : Alibis ; numéro 50
Période : printemps 2014
Périodicité : trimestriel
ISSN : 1499-2620
Dimensions (en cm) : 13,2 x 20,9
Pages : 160
Prix : 10 CAD