La mort foudroie deux des condamnés, le troisième doit être exécuté d’une balle dans la tempe...sauf qu’il ne meure pas. L’état-major envoie un prêtre, ami d’enfance du capitaine, pour que celui-ci examine le survivant. Les hommes parlent déjà de miracle...
Sorti, il y a presque un an, cet album est pourtant en plein dans l’actualité avec le début des différentes commémorations pour le centenaire de la guerre « 14-18 ». Zidrou (alias Benoît Drousie)
déjà scénariste de « La peau de l’ours » (dessin Oriol, éd. Dargaud, 2012) ou de « Lydie », (dessin Jordi Lafebre, éd. Dargaud, 2010) continue ses histoires one-shot avec un registre plus dramatique et plus intense que ses séries comme « L’Élève Ducobu » (dessin Godi, éd. Le Lombard) ou « Tamara » ( Dessin Christian Darasse, éd. Dupuis). Ici, il dénonce la folie de la guerre aveugle et imbécile, dictée par des généraux loin des réalités (et surtout loin du front). Par le biais de retours réguliers à l’arrière du front, il nous offre une narration moins linéaire, apportant un peu de répit et de douceur. Zidrou, en présentant Monet peignant ses « Nymphéas » à Giverny, oppose l’art comme comme création à la guerre (est-ce aussi un art ?) comme destruction. Il pose aussi la question de l’utilité de l’artiste et de la création artistique en temps de conflit. Introduisant un ton fantastique, Zidrou l’utilise pour appuyer le décalage entre la vie normale et l’aliénation des soldats.
Très proche d’« Un long dimanche de fiançailles », film de Jean-Pierre Jeunet, d’après le roman de Sébastien Japrisot, sorti en 2004 ou de « Les Sentiers de la gloire » (« Paths of Glory ») film de guerre américain de Stanley Kubrick, (noir et blanc), sorti en 1957, d’après le livre du même nom de Humphrey Cobb paru en 1935. Pour plus de renseignements, vous pouvez lire « Les damnés de la guerre », écrit par Roger Monclin et dont le sous-titre est « Les Crimes de la Justice Militaire », qui fut publié en 1934. Sans oublier « Paroles de Poilus : Lettres et carnets du front, 1914-1918 » (Éditions 84 ,Collection : Librio). Bien sûr, la BD n’est pas en reste avec ce thème, notamment par les ouvrages de Jacques Tardi.
Récit sépia et charbonneux, évoquant bien la boue, la désolation et le cafard des poilus, Francis Porcel, dessinateur et coloriste espagnol qui a travaillé avec Jean-David Morvan sur « Mediacop - Reality show » (Éditions Dargaud), a trouvé le bon ton. Les moments de vie et de mort soulignés d’une teinte rouge et l’utilisation parcimonieuse de la couleur apportent une dimension encore plus dramatique. D’un trait réaliste, il réussit à transmettre toutes les émotions et a nous faire voir leurs âmes.
En cette période de commémoration du début de cette « drôle de guerre », voila un album attachant, sensible mais cruel. A noter que le Président de la République a demandé, lors d’un discours récent, au ministre de la défense, qu’une place soit accordée aux fusillés au Musée de l’Armée des Invalides. Une première étape dans la réhabilitation de ces poilus.
Les Folies bergère
Scénario : Zidrou
Dessin et couleurs : Francis Porcel
Éditeur :Dargaud
Dépôt légal : 28 septembre 2012
Pagination : 96 pages quadrichromie
Format : 240 x 320 mm
ISBN : 978-2-5050-1390-7
Prix : 16,45 €
A lire sur la Yozone :
Lydie
Zidrou, Porcel©Dargaud édition 2012
