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Derniers Parfaits (Les)
Paul Beorn
Mnémos, Dédales, roman (France), fantasy uchronique, 321 pages, octobre 2012, 21€

Tout commence par un siège, d’où s’échappent quatre prisonniers enchaînés les uns aux autres. Parmi eux : Cristo, qui a tout du chevalier sauf le titre et Mousse, un petit bout de femme autoritaire aux ressources insoupçonnées. Faute de pouvoir traverser le front, ils vont s’enfoncer en terrain ennemi, en pays cathari, avec le secret espoir de rejoindre le cou d’Espagne et de convaincre son roi de prendre les démons catharis à revers.
Car l’ennemi n’est pas naturel, ainsi que leur voyage va le leur prouver : outre les « anges » démoniaques apparus sur les champs de bataille, capables de saper le courage de la chevalerie française d’un seul regard, ces diables ont changé le pays en terre désolée, dépouillées de ses forces vives : les hommes font la guerre, les femmes sont encloses dans des « maisons de jeunesse », des forteresses où depuis une génération, elles fabriquent de la chair à canon...



Paul Beorn poursuit dans sa veine de fantasy historique. On tombe avec Les derniers parfaits en pleine période cathare. Sauf que dans ce XIVe siècle-là, la foi des Parfaits a été dévoyée par des démons, et tout le Sud-Ouest de la France est devenu un pays de guerre totale : sous la puissance d’un embrigadement religieux appuyé par la magie, toute la population, vouée au culte de ces « anges » noirs (leur description fera invariablement penser aux Nazguls de Tolkien ou aux Détraqueurs de Rowling), voit ses forces drainée par la guerre contre la France. Hanté par ses vieux, vidé de sa paysannerie, c’est un pays mort, gris que nos quatre héros enchaînés sillonnent, sur des routes où ne circulent plus que des tombereaux macabres, chargés de morceaux de cadavres qui vont alimenter les repaires des démons...

Après le fracas du siège en ouverture, c’est donc une lente pérégrination dans un pays mort, glacé et effrayant qui nous attend. L’occasion de découvrir les différents protagonistes liés par le destin, et quelques spécificités de ce monde, donc la magie : chacun en France voit sa magie associée à un animal, et en obtient les qualités. Bien évidemment, nous avons affaire à des cas à part : Mousse est sous le signe de la chimère, et détient un pouvoir d’illusion aussi pratique que mal vu, quant à Cristo, il est « indéterminé », et ce flou est un grand traumatisme dans sa vie qui n’en manque pas.
On découvre aussi que cette petite magie individuelle peut être mise en commun, drainée, et que c’est ainsi que l’armée catharis fait des ravages. On croise également quelques petits artefacts d’un mystérieux Empire (qui n’est pas sans rappeler l’Atlantide), après lesquels les puissants courent avidement.

Il va sans dire que nos enchaînés vont finalement être séparés, et chacun pourra se tourner vers sa propre quête : pour le loyal Cristo, alerter l’Espagne de la réalité de l’ennemi restera une priorité, jusqu’à ce qu’il apprenne la capture de Mousse dans une « maison de jeunesse ». Soutenus par les vrais cathares qui vivent clandestinement dans leur propre pays, il décide de partir à l’assaut de la forteresse... sans savoir que Mousse ne reste pas les bras croisés et entreprend de s’évader !

Et ce n’est pas le dernier rebondissement. Batailles épiques et trahisons diverses sont au menu, dans des scènes très visuelles où notre culture fantasy iconographique actuelle sera très souvent mise à contribution. Un regard à la couverture suffit à cibler une partir des influences visuelles de cette histoire foisonnante et d’une densité propre à satisfaire les amateurs du genre. Paul Beorn crée un univers très riche, dosant savamment les emprunts à l’Histoire et ceux aux codes du genre, jouant avec les images devenues habituelles pour forger quelque chose d’un peu plus original et qui ne manque jamais de nous surprendre. Plutôt que chercher à tout prix le merveilleux, il fait le choix d’une dark fantasy où la sorcellerie n’est qu’un élément mineur, les plus grandes horreurs étant, comme l’Histoire nous l’apprend bien, le fait des hommes.

Les éditions Mnémos ont fait le choix d’un corps assez petit, si bien que ce « Derniers Parfaits » ne fait « que » 321 pages, bien remplies de 50 lignes, mais en vaut 500. Le rythme haletant des aventures ne laissera guère le temps de reprendre notre souffle, et le frisson sera permanent, entre visions horrifiantes et scènes épiques.
En fait, la seule faiblesse que je pourrais lui reprocher est ce titre, bien peu représentatif du contenu, et qui l’uniformise dans la masse de la fantasy courante alors qu’il explose et flamboie.


Titre : Les derniers Parfaits
Auteur : Paul Beorn
Couverture : David Lecossu
Éditeur : Mnémos
Collection : Dédales
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 321
Format (en cm) : 23,5 x 15,5 x 3
Dépôt légal : octobre 2012
ISBN : 9782354081478
Prix : 21 €



Nicolas Soffray
17 février 2013


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