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Robe Blanche de Cendrillon (La)
Kir Boulytchev
Black Coat Press, Rivière Blanche, Fusée, 2 courts romans, science-fiction, 262 pages, mars 2011, 20€

Deux aventures de Slava Pavlych, médecin de la Flotte des Confins, composent ce livre : “La robe blanche de Cendrillon” et “Le grand esprit et les fugitifs”, datant respectivement de 1974 et 1972. Toutefois, pour “La robe blanche de Cendrillon”, il s’agit de la seconde version de 1980, augmentée de la nouvelle “Sur un bioforme laid” (1975).
Ce recueil de deux novellas débute par deux préfaces, la première signée par Mikhaïl Manakov et Kirill Ratnikov, présentant Kir Boulytchev considéré comme un classique en Russie, et la seconde par Patrice Lajoye, introduisant le cycle du docteur Pavlych.
Une entame utile et intéressante, avant d’entrer dans le vif du sujet, sur les traces de ce médecin aventurier.



La robe blanche de Cendrillon” (titre très subtil) débute par le chapitre “Sur un bioforme laid”, dans lequel il n’est aucunement question de Pavlych, mais de Dratch, de retour d’une planète inhospitalière pour l’homme. Dans l’esprit de « Semailles Humaines » de James Blish, l’être humain est adapté à son nouvel environnement, mais ici c’est seulement pour remplir une mission et non pour coloniser un espace vierge. La transformation est censée être réversible, mais dans le cas de Dratch la chose s’avère compliquée.
Kir Boulytchev introduit très bien l’aspect de Dratch, il ne révèle les détails que petit à petit. Comme il s’agit d’une nouvelle à la base, ce chapitre se suffit à lui-même et l’intérêt de ce rajout par rapport à la première version de “La robe blanche de Cendrillon” n’apparaît que plus tard, lorsque Pavlych amène une cargaison sur la planète Projet-18. Lors d’une soirée, il a rencontré une mystérieuse jeune fille qui lui a tapé dans l’œil avant de disparaître ; aussi, quand il apprend qu’elle est ici, il souhaite la rencontrer. Mais ce n’est pas réciproque…

Slava Pavlych n’est pas seulement médecin, il est aussi un homme d’action, n’hésitant pas à payer de sa personne. Il a incontestablement du cœur, on pourrait même lui prêter une certaine exubérance. Autant de traits le rendant d’emblée sympathique. Il n’aime pas l’inaction, ne tient pas en place et fait ce qu’il estime juste.

Cette dernière assertion se trouve parfaitement illustrée dans “Le grand esprit et les fugitifs”. Suite à une avarie dans l’espace, une partie de l’équipage est mise en animation suspendue jusqu’à ce qu’un hypothétique secours soit trouvé. Le capitaine décide de tenter sa chance sur une planète, visitée un jour et sur laquelle une balise doit exister. Le vaisseau s’écrase au sol et de ceux qui étaient restés éveillés, seul Pavlych survit. Lors de la première nuit, en voyant des lumières s’allumer au loin, il endosse une combinaison et sort du relatif abri de la carcasse pour chercher de l’aide…

Les deux novellas ont des thèmes très distincts, portés sur l’interrogation.
Transformer notre corps nous fait-il perdre notre humanité ? À partir de quel stade n’est-on plus considéré comme humain ? Pense-t-on différemment et ne va-t-on pas préférer notre nouvel état ? “La robe blanche de Cendrillon” soulève le débat, sans avancer de solution. Cela dépendra forcément des cas.
Dans “Le grand esprit et les fugitifs”, la planète s’avère habitée par des indigènes et, bien sûr, Slava Pavlych va intervenir dans une situation d’urgence, remettant en cause la non-ingérence extérieure sur des civilisations primitives. Le docteur n’écoute que son cœur, il ne peut rester à regarder deux êtres mourir, même si s’immiscer dans les affaires des autochtones revient à révéler sa présence et empêcher l’évolution naturelle des choses. Pourtant, qu’est-ce qui est le pire : intervenir instinctivement sans réfléchir à ses actes ou le faire en toute connaissance de cause par esprit scientifique ?

« La Robe Blanche de Cendrillon » ne constitue pas seulement un agréable divertissement, mais cherche aussi à interpeller le lecteur avec des problèmes d’éthique. Comme réagirait-il s’il était à la place de Pavlych ? Qu’est-ce qui définit un homme ? Aider les êtres primitifs afin d’accélérer leur évolution est-il une bonne idée ? Sommes-nous d’ailleurs des modèles ?

Avec les aventures du médecin Slava Pavlych, Kir Boulytchev mêle habilement distraction et réflexion. Ce volume est agrémenté d’illustrations originales, ainsi que d’une bibliographie du cycle de Pavlych, de quoi donner envie de découvrir le docteur face à d’autres cas de conscience, avec l’espace en toile de fond.

En dehors des frères Strougatski, les traductions des œuvres de SF russe sont suffisamment rares pour ne pas saluer cette initiative de Rivière Blanche et de Viktoriya et Patrice Lajoye, qui n’en sont d’ailleurs pas à leur coup d’essai. Dans la même collection Fusée, « Dimension URSS » et « Dimension Russie » ont déjà été publiées.


Titre : La Robe Blanche de Cendrillon
Auteur : Kir Boulytchev
Traduction du russe : Viktoriya et Patrice Lajoye
Couverture : Grillon
Éditeur : Black Coat Press
Collection : Rivière Blanche Fusée
Directeurs de collection : Philippe Ward et Sylvie Miller
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 262
Format (en cm) : 20,4 x 12,7
Dépôt légal : mars 2011
ISBN : 978-1-935558-90-3
Prix : 20 €



François Schnebelen
5 juin 2012


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