Eric Corbeyran est l’un des auteurs les plus prolifiques du moment. Ce touche-à-tout a participé à différents projets tels que “Le Chant des Stryges”, son spin-off “Le Clan des Chimères”, “9/11”, “XIII Mystery”, “Assassin’s Creed” (l’adaptation BD du jeu vidéo), “Sept jours pour une éternité” (l’adaptation du roman)… et même quelques “Boule et Bill”.
Il signe ici une nouvelle série, “Zodiaque”, prévue en 13 tomes. Le pitch de cette saga tient en ces quelques mots : « Un signe. Un pouvoir. Une histoire ». Chaque tome de ce thriller fantastique contemporain peut donc se lire indépendamment, même si une intrigue principale, en arrière plan, semble lier les albums entre eux. Comme le nom de la série l’indique, chaque volume sera associé à un signe astrologique. Dans cette série, douze héros, portant un étrange collier symbolisant leur signe zodiacal, possèdent un pouvoir surnaturel unique. L’un a le don d’ubiquité, l’autre peut retrouver les personnes disparues… Ces personnages se croisent dans les différents albums, constituant ainsi un fil conducteur entre les divers one-shots.
Non, vous ne verrez pas de chevaliers en armure dorée dans cette série. Voici plutôt un rapide résumé de ses treize épisodes (selon le site de l’éditeur) :
“Le Défi du Bélier” : Un polar noir sur les traces d’un redoutable serial killer,
“Le Secret du Taureau” : Le portrait d’un Golden Boy des années 80,
“Le Choix du Gémeau” : Une enquête parapsychique et rédemptrice,
“L’Héritage du Cancer” : Une expérience métaphysique liée au secret d’un grimoire alchimique,
“La Part du Lion” : Une chasse au trésor empreinte de fantastique et d’occultisme,
“Le Supplice de la Vierge” : Un récit ésotérique, mystique et transcendant,
“Le Jugement de la Balance” : Un duel d’esprit magique et archétypal entre le bien et le mal,
“La Technique du Scorpion” : Une filature à haut risque alliant le charme au parapsychologique,
“Le Voyage du Sagittaire” : Une tragédie amoureuse à travers le temps,
“Le Pouvoir du Capricorne” : Une ascension irrésistible brisée par une troublante machination,
“La Malédiction du Verseau” : La vengeance machiavélique d’une mère au désespoir,
“L’Expérience du Poissons” : La traque acharnée d’un malfaiteur aux méthodes surnaturelles,
Tome 13 (Titre à définir) : La révélation finale.
Le treizième tome de la série tournera sans doute autour du méconnu Serpentaire, le treizième signe zodiacal. Il sera disponible vers mars 2013.
D’un point de vue marketing, l’idée de Guy Delcourt est très intelligente. Un nouvel album sortira tous les mois, juste avant sa période calendaire associée, constituant ainsi une bonne idée cadeau pour les anniversaires à venir. Imaginez : vous recherchez une BD à offrir pour un ami et vous vous retrouvez face à une tête de gondole proposant un livre dont le titre correspond au signe astrologique du copain. Ça en fait presque un cadeau personnalisé. Bien joué Delcourt !
Pour assurer un tel rendement, l’éditeur n’a pas eu d’autre choix que de proposer chaque numéro à un dessinateur différent. Depuis quelques années, cette pratique est de plus en plus répandue (souvenez vous du “Décalogue” !) et permet, en éditant les titres à échéances rapprochées, de ne pas perdre en route le lecteur impatient. Corbeyran, habitué aux longues séries, avait déjà eu recours à ce procédé pour la saga “Uchronie(s)”. Les puristes pourraient regretter cette pratique qui supprime l’identité visuelle d’une série.
Dans la série “Zodiaque”, pour conserver une certaine signature graphique, les couvertures des treize albums sont réalisées par Thomas Ehretsmann. Elles ont une présentation similaire, avec le rond du signe astral en pleine page.
Le scénario de ce premier épisode est assez bien ficelé. L’inspecteur Stephen Aries de Chicago est sur les traces d’un redoutable serial killer : Le Bélier, en hommage au tatouage qu’il laisse sur le front de ses victimes. Le meurtrier provoque la police en donnant des indices sur les 12 meurtres qu’il prépare. A chaque fois, les forces de l’ordre arrivent trop tard, augmentant ainsi la pression sur les épaules de Stephen. Mais plus les preuves s’accumulent, plus l’inspecteur lui-même devient suspect. Et si Stephen Aries était finalement la pièce maitresse de toutes ces mises en scène ? Quel est son niveau d’implication, voire sa responsabilité, dans ces différents crimes ? Et pourquoi cache-t-il chez lui cet étrange collier à l’effigie du signe du bélier ?
Le suspense est bien mené. Les intuitions du lecteur, au fil des planches, identifieront plusieurs suspects successifs avant la révélation finale. Par ailleurs, en tant que premier volume de la saga, le lecteur sera surpris par les pouvoirs libérés par les colliers. Ce dernier élément surprise sera évidemment absent dès le second épisode.
Dans “Le Défi du Bélier”, l’inspecteur Aries fait appel à Agatha Mercury, détentrice du collier à l’effigie du Gémeau, pour résoudre une énigme. Cette parenthèse permet d’introduire le troisième album de la saga.
Néanmoins, cette BD souffre d’une petite lacune, qui s’explique sans doute par la rapidité du récit. La psychologie des personnages est assez grossière, presque caricaturale. Pas facile de développer des personnages en seulement 48 planches. Par exemple, pour la série “Sept”, compilant des one-shots sous une même idée, les auteurs disposaient d’un espace de plus de 60 pages. Du coup, dans “Zodiaque”, Corbeyran est obligé d’avoir recours aux longs monologues de ses personnages pour présenter les situations narratives. Cette méthode ne facilite pas le dynamisme du récit.
En ce qui concerne les dessins, le sentiment final est similaire au scénario. Le résultat est globalement satisfaisant, même si quelques petites lacunes demeurent.
Le cadrage reste classique mais sert parfaitement le récit. Les personnages sont distinctifs et expressifs. Les décors, comme l’intérieur des appartements de Chicago, sont très détaillés. Un style simple mais très efficace.
Les couleurs, réalisées par Yago Garcia, sont peut-être un peu trop vives et manquent de texture, mais l’ensemble reste cohérent et crédible.
Le seul bémol que je noterai concerne les scènes de crimes. Le serial killer est sensé être un psychopathe sanguinaire. Par conséquent, comme le disent d’ailleurs les personnages, ses meurtres doivent être violents et horribles. De vrais carnages. Pourquoi n’y a-t-il alors aucune goutte de sang sur les victimes ? Cet aspect ne ressemble pas aux autres ouvrages du dessinateur, Sébastien Goethals, spécialiste de thriller en BD. Globalement, on sent que l’éditeur a voulu conserver un aspect « tout public » à ses albums. Dommage. Surtout pour un livre qui se veut être un « polar noir ».
A noter : Pour lancer la série les deux premiers tomes, correspondants aux signes Bélier et Taureau, sont disponibles dans une édition promotionnelle vendue en pack.
En tant que one-shot, sans être extraordinaire, cet album est réussi, servi par un scénario assez complexe et un graphisme efficace. Il est encore trop tôt pour juger de la qualité de la série. Laissons du temps à l’intrigue principale pour se développer, pour enrichir le lien entre les albums.
Le troisième épisode de la série, “Le Choix du Gémeaux”, mettra en scène Agatha Mercury, rencontrée dans ce premier volume, et sera disponible le 9 mai 2012.
(T1) Le Défi du Bélier
Série : Zodiaque
Scénario : Corbeyran
Dessin : Sébastien Goethals
Couleurs : Yago Garcia
Couverture : Thomas Ehretsmann
Éditeur : Delcourt
Collection : Machination
Dépôt légal : 7 mars 2012
Format : 240 x 320mm
Pagination : 48 pages couleurs
ISBN : 978-2-7560-2391-5
Prix Public TTC France : 13,95€
Illustrations © Sébastien Goethals et Delcourt (2012)
