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Crossed : Valeurs Familiales
David Lapham et Javier Barreno
Milady Graphic

Adaline vivait paisiblement dans un ranch avec toute sa famille. C’était un clan très uni derrière la figure du père, le parfait exemple de bons WASP américains, blancs, chrétiens dévoués, sous l’autorité d’un homme charismatique. Bon, il a aussi la fâcheuse habitude de violer ses filles sauf Adaline, la rebelle. Tout le monde ferme les yeux sur cette petite perversion. De toute façon, qui oserait s’opposer à lui et le jour où Adaline tenta de le sermonner, il le lui fit payer, évidemment. Mais avec l’arrivée des contaminés, tout allait changer. La tranquillité allait voler en éclat et la famille allait subir ses premières pertes. Mais Adaline va vite déchanter car plus les choses changent, plus elles restent les mêmes.



Adaline retomba dans une routine pour oublier la dernière vision de sa jeune soeur contaminée, crachant sa haine à son visage. Maintenant, elle observe les contaminés pour protéger la colonie, ce nouveau havre que son père a bâti... Son père, le nouveau messie, le nouveau gourou pour tous ceux qui vivent avec eux, les vrais membres de la famille. La famille.. Si seulement Adaline savait ce qu’elle est devenue, si seulement elle savait que son père non seulement continue de violer ses filles mais les met enceintes... Si seulement elle savait qu’il a laissé l’une d’elle se faire contaminer et la garde comme une bête qu’on étudie... Et malheureusement, Adaline va finir par savoir et elle va encore une fois le payer. Mais ce sera aussi le début de la fin de cette famille totalement gangrenée par le mal.

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Difficile de mieux caractériser la série « Crossed » que par cette avertissement sur sa couverture : « ce comic est violent, amoral et profondément malsain ». Je m’étais étonné que l’avertissement au public averti ne soit qu’en quatrième de couverture pour les deux premiers tomes. Je suis satisfait de voir que Milady Graphic a répondu (surement sans le savoir) à mon souhait. En tout cas, ce troisième opus est dans la droite ligne de ses prédécesseurs : puisant dans le pire de notre subconscient, faisant ressortir ce qu’il y a de plus malsain en nous, nos penchant les plus perverts. Et la couverture annonçait tout de suite la couleur : notre chère religion risquait d’en prendre un coup.

Total changement d’équipe pour ces « Valeurs Familiales ». Le scénario est confié à David Lapham, qui reçut le célèbre prix Eisner Award en 1995. Plutôt habitué aux super-héros comme Spider-man ou le Punisher, il va parfaitement faire sien ce monde particulièrement sordide. Mais ce que va surtout nous montrer ce scénariste est que les pires monstres ne sont peut-être pas les contaminés. En tout cas, il va s’en prendre à l’Amérique bien pensante, bien croyante, qui cache ses sales secrets comme ce père incestueux devenu un prophète avec l’apparition de l’épidémie. Le scénariste sera réellement sans la moindre pitié pour cet homme et politiquement incorrect. Je voyais même parfois du Warren Ellis dans ce récit car, après s’en être pris au père, il ne va pas non plus être tendre avec son héroïne.

Car c’est un calvaire sans fin qu’il va lui drodiguer, l’obligeant à assumer tous les choix d’un groupe, à devoir accepter de réaliser les pires atrocités pour sauver les siens. Et souvent, ses pires ennemis seront des humains sains de corps, mais plus d’esprit. Il va aussi nous donner une image de la mère à des années-lumière de la madone, blasphémant, diront certains, sur tous les symboles qu’elle représente. Mais d’un autre côté, et à mon avis le bon, il nous montre surtout sans concession ce côté obscur que nous tentons, sous couvert de civilisation, de pseudo morale, de cacher et que la contamination ne fait de nous renvoyer en pleine figure de la pire des façons.

Difficile pour Javier Barreno de remplacer Jacen Burrows au dessin. Son graphisme, plus classique, plus cartoon, atténue certainement de nombreuses scènes, n’ayant pas le réalisme et peut-être l’audace de montrer avec trop de clareté certaines planches. Toutefois, comme à leur habitude et je ne peux que les en féliciter, Digikore Studio nous offre un travail de colorisation de premier choix, parvenant à créer de véritables visions d’horreur en s’appuyant sur les crayonnés de Barreno. Au final, il n’y a vraiment pas à rougir de ce troisième opus, bien dans le ton sanguinolent et gore des premiers.

Spin-off des deux premiers tomes, « Crossed : Valeurs Familiales » nous a emmené une nouvelle fois dans nos pires cauchemars et en plus, on adore cela ! Bon, faut vite que je vérifie mon visage...


pour public averti

Crossed : Valeurs Familiales
- Scénario : David Lapham
- Dessin : Javier Barreno
- Encrage : Julien Huginard-Bert
- Couleurs : Digikore Studio
- Illustration de couverture : Paul Duffield
- Galerie d’illustrations : Jacen Burrows
- Traduction : Philippe Touboul
- Éditeur : Milady
- Collection : Graphics
- Dépôt légal : 20 janvier 2012
- Pagination : 160 pages couleurs
- Numéro ISBN : 9782811207076
- Prix public : 14,90 €


© Edition Milady - Tous droits réservés



Frédéric Leray
11 février 2012




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