Originellement sortie en trois tomes, regroupés ici dans un seul tome (de 672 pages découpés en 25 chapitres), cette quête nous entraîne dans un Japon médiéval, sous l’ère Edo. Écrit deux ans après « Sabu & Ichi » en 1974 pour le magazine Big Comic jusqu’en 1975, il est typique des mangas du genre « jidaigeki ». Littéralement « théâtre d’époque » ou plus largement « drame historique », ce genre désigne au sens large les œuvres ayant pour sujet le Japon médiéval, plus précisément au moment de l’ère Edo (entre 1600 et 1868). Il existe pour les mangas l’appellation plus précise de « jidai mono », ayant pour acteurs incontournables le samouraï ou le rônin, la geisha ou le shinobi (ninja). Pour le cinéma c’est le terme de « Chambara eiga » qui est utilisé, plus spécialement pour les films de combat au sabre (en France, il existe un parallèle avec nos films de « cape et d’épée »). Le « jidaigeki » a connu trois époques, la première au début des années cinquante avec Kurosawa et « Les sept samouraïs » (1954), la deuxième dans les années 80 avec « Ran » (1985) ou « Kagemusha » (1980), toujours de Kurosawa. La dernière fin des année 90, avec « Après la pluie » (1999) réalisé par Takashi Koizumi, « Zatoichi » (2003) réalisé par Takeshi Kitano ou « Le dernier samouraï » par Edward Zwick en 2003.
La quête ou l’enquête de Kuzuryû n’est qu’un prétexte de l’auteur pour nous montrer sa vision de l’homme. Touchant ce qu’il y a de plus vil chez l’individu, la haine, l’envie, son vendeur ambulant arrive comme le remède définitif. Mais, parfois, la guérison est plus douloureuse que la maladie. C’est un récit plus destiné aux adultes, quelques scènes dénudées soft parsemant l’histoire. D’un ton très sombre, le récit parfois permet le sourire. Bien que le personnage soit monolithique aussi bien graphiquement que dans ses sentiments, l’auteur reporte les émotions sur les personnages secondaires. Tout au long des vingt cinq chapitres, le mangaka distille des informations sur la quête de son héros. La narration, un peu lente au début, s’accélère dans le dernier tiers du récit pour conclure l’histoire et terminer sur une note optimiste. Ishinomori nous détaille la vie de l’époque, à travers des cérémonies ou simplement par l’image d’un intérieur de maison.

Ishinomori est un artiste. Il est aussi à l’aise pour dessiner un superbe paysage sous la neige que pour nous mettre en scène un combat au sabre. Ses dessins sont raffinés et élégants, rendant parfois hommage au travail des artistes ayant réalisé des estampes. Son découpage efficace permet de rythmer de lecture.

Je vous engage à lire la poste-face de Karyn Poupée, journaliste française vivant au Japon, qui nous explique l’engouement des japonais pour ce type de manga. Même si le trait peut sembler un peu « vintage » et que le poids du livre peut inquiéter, ce pavé reste malgré tout un bon manga, plus adulte que « Sabu et Ichi ».
Kuzuryu
Auteur : Ishinomori Shotaro
Traduction : Pascale Simon
Éditeur : Kana
Collection : Sensei
Dépôt légal : 06 mai 2011
Pagination : 672 pages N&B
Format : 14,8 X 21cm
ISBN : 9782505011644
Prix public : 18 €
A lire sur la Yozone :
Sabu & Ichi (T1 et 2)
MEDICINE DEALE KUZURYU© Shotaro ISHINOMORI / ISHIMORI PRIODUCTION INC. 1974