Achille a déjà perdu trop de temps. Il ne souhaite pas mourir en laissant derrière lui tant de regrets dont le premier est de n’avoir jamais répondu aux lettres de Rebecca. Mais cette fois, il va prendre son courage à deux mains et la direction de la grande ville, Hawkmoon. Avant cela, il doit se fabriquer de nouveaux pieds pour les visser à ses moignons. Dur de se présenter devant quelqu’un qui vous manque avec ce genre de prothèses, mais Achille est décidé, il doit revoir Rebecca avant de mourir. En paquebot, le chemin est long et quand il arrive, c’est un monde totalement étranger qui lui fait face. Une mégalopole où les gens se regardent avec défiance. Même les serveuses de bar se méfient des clients. Toutefois, Achille est plus social qu’il n’y parait et il n’a pas l’adresse de Rebecca.
Voici donc une des premières publications de Sandawe. Pour ceux qui ne connaissent pas le principe, je leur conseille de lire notre article qui expliquait le mode d’emploi de cet éditeur sur le web où ceux qui ont tout pouvoir sont les internautes.
Nicolas Vadot fait donc partie des premiers élus, son album ayant été financé par 170 internautes qui ont le plaisir d’être cités en première page. Vadot a un univers particulier et un style graphique qui fait immanquablement penser à Fred et son Philémon. Vadot a cette douce folie lui permettant de mélanger avec finesse le monde réel et onirique de son héros. Nicolas Vadot est né en 1970, au sud de Londres, pour revenir sur le continent, à Bruxelles, à 17 ans. Il publie ses premières planches dans Le Vif/L’Express en 1993 et obtient en 1999 sa page hebdomadaire. Il publie son premier album BD en 2001, « Norbert l’Imaginaire », aux éditions Le Lombard, avec Olivier Guéret comme co-scénariste. Avec un beau bagage dans son escarcelle, il vient tenter le défi Sandawe et parvient à faire partie des premiers publiés.
Le titre « Maudit Mardi » est en fait un clin d’oeil au mardi d’août où l’auteur apprit que son album était retenu par les internautes. Nous suivons les aventures d’Achille, un homme reclus sur lui au point de s’être enraciné au premier sens du terme. Dès les premières pages, Vadot nous emmène dans son univers, qu’il rapproche de celui d’un Tim Burton. Le fantastique va se mêler à la réalité mais tout en douceur, pas du tout à grands coups d’effets spéciaux mais plutôt comme si cela était du plus grand naturel. Achille va ensuite commencer un voyage de la dernière chance, ne sachant trop combien de temps il lui reste à vivre. Une belle métaphore philosophique sur la peur de mourir... mais aussi celle de vieillir car en retrouvant Rebecca, c’est le poids des années qui lui arrivent en pleine face, celui du temps perdu et qui ne semble pas possible de rattraper.
Vadot nous transporte par un récit parfois tragique, parfois nostalgique. Et ses dessins sont le support idéal. Comme je ne disais ci-dessus, ils font penser à ceux d’un Fred, les cases servant à reconstruire sa vie comme un puzzle, le tout avec des couleurs au crayon comme on aimerait en voir plus souvent. Chaque planche recèle une surprise, Vadot surprend car il peut nous montrer la réalité de la vie de citadin pour ensuite transformer en créature imaginaire un simple insecte comme un moustique.
« Maudit Mardi » est une merveilleuse BD, à la beauté onirique et ayant la dureté de la réalité. Une oeuvre qui démontre que les lecteurs sont parfois les meilleurs des juges et non les pseudo critiques professionnels.
Maudit Mardi (T1)
Scénario : Nicolas Vadot
Dessin et Couleurs : Nicolas Vadot
Éditeur : Sandawe
Dépôt légal : 24 août 2011
Pagination : 64 pages
ISBN : 978-2930623023
Prix : 15€
Illustrations Nicolas Vadot © Editions Sandawe, 2011
