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Petits Arrangements avec l’Éternité
Éric Holstein
Mnémos, Dédales, roman (France), fantastique vie nocturne parisienne, 295 pages, septembre 2009, 22€

Les vampires ne sont pas ce que vous croyez, pauvres pommes accrochées à l’imagerie que Bram Stoker a enfoncée dans votre crâne parfois fécond. Non, s’ils sont presque immortels et parfois très puissants, ils ne sucent pas le sang, préférant manger dans une assiette, et supportent plutôt bien le soleil.

Eugène, vampire depuis un petit siècle, vivote à Paris, squattant les demeures cossues de bobos richards partis en vacances. Ancien roi de la cambriole, il se la coule relativement douce.

Les choses dérapent lorsqu’il recroise la route de Grace, midinette qu’il a « éveillée » (puisque c’est le terme), et dont le dernier richissime amant, fils à papa de Bombay, s’est mis en tête de devenir des leurs. Persuadé que tout s’achète, il va mettre la pression aux deux anciens amants, et déclencher une guerre entres deux groupes que les gens normaux auraient préféré ne pas connaître.



Quand notre confrère d’ActuSf Éric Holstein entreprend de dépoussiérer le mythe du vampire, il n’y va pas avec le dos de la cuillère. Si il n’oublie pas, dans son hommage à Paris, de placer une petite histoire d’amour, elle est, comme le reste, à cent lieues des romans pour ados qui fleurissent, comme leurs lecteurs, actuellement : oubliez les « Twilight » et leur descendance éditoriale. Là, on est dans la cour des grands.
On ne prend pas la pose, on ne soupire pas à tout bout de champ, on ne se demande pas si “il m’aime ou il m’aime pas ?”, mais plutôt si il y a un moyen de s’en sortir, vivant de préférence, avec les honneurs accessoirement. Euh, non, on va se contenter de rester en vie.

On pourra dire, sans mentir ni rougir, que le véritable personnage principal est Paris. La ville éternelle seule pouvait abriter le conflit entre vampires et une secte hindoue façon Hashashins. Qui ne connaît pas la capitale abandonnera vite l’idée de suivre les tribulations géographiques des personnages, au contraire des Parisiens qui se retrouveront en terrain connu et pourront suivre pas à pas le périple de ces créatures non pas monstrueuses, mais plus qu’humaines.

Éric Holstein déploie des trésors d’argot (contemporain, donc moins fleuri que celui d’Audiard, n’en déplaise aux fans) pour nous raconter ça par la voix (et les mémoires tapés à la machine à écrire rose, modèle Super Silent) de son héros, Eugène, fils de prolo, monte-en-l’air en retraite, et “jeune” vampire. Les évènements vont le conduire à découvrir les véritables pouvoirs de ceux de sa race, la famille qu’ils forment (ou pas), et certaines choses sur son “éveilleur”, Slawomir, dit le Vieux, initialement SDF pochtroneux, avant une ascension sociale à se pâmer. Voire au final, une ascension tout court....

Les premiers chapitres (aux titres plus savoureux les uns que les autres, jeux de mots truculents qui tombent toujours juste) ne laissent rien augurer de la suite. Devant la galère dans laquelle Grace, la midinette siliconée, les a fourrés, on s’attend à une résolution plus ou moins tordue, avec des échéances repoussées sous des prétextes bancals, puis des délais raccourcis à coups de menaces dum-dum. Allez dire à un milliardaire indien qu’on naît vampire, et que c’est tintin pour le devenir sinon.
Que nenni, l’auteur balaie cela rapidement, plutôt que s’y enliser, et déploie une histoire de rivalités de clan, de tromperie à l’échelle mondiale, et d’une lutte ancestrale contre une secte hindoue. Après un moment de surprise, et de crainte, on embraye pour le meilleur. Je ne vous en dis pas plus, sauf que la balade parisienne vaut le détour.

Un argot châtié teinté d’un humour acide, un style à la première personne très actuel, une histoire mêlant vieux mythes et critique de la société contemporaine, « Petits Arrangements avec l’Éternité » secoue notre image du vampire, dérange un peu (l’auteur aimant taper là où ça fait mal), et nous entraîne dans une cavalcade furieuse dans un “post-steampunk” plutôt réjouissant.

Un roman atypique, donc parfaitement à sa place dans la nouvelle collection Dédales de Mnémos. Mériterait qu’un autre malade du détail et des coups tordus, genre Guy Ritchie, l’adapte au cinéma...

Déplorons néanmoins une grosse trentaine de coquilles, sans compter le style direct qui parfois massacre allègrement la syntaxe par un génocide de virgules.

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Petits Arrangements avec l’Éternité - corrections

Titre : Petits Arrangements avec l’Éternité
Auteur : Éric Holstein
Couverture : Diego Tripodi
Éditeur : Mnémos
Collection : Dédales
Site internet : page roman (site éditeur)
Pages : 295
Format (en cm) : 15,7 x 23,4 x 2,2
Dépôt légal : septembre 2009
ISBN : 978-2-35408-057-0
Prix : 22 €



Nicolas Soffray
14 août 2010


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