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Dossier : Fantômas Revient
Le super-vilain est de retour dans une version 100% musicale


Fantômas revient est un nouvel épisode (imaginé par Gabor Rassov) des aventures de Fantômas, l’ancêtre des Super Méchants créé par Souvestre et Allain à l’aube du vingtième siècle. De retour grâce au sérum de jeunesse que lui a inoculé le professeur X, Fantômas a le projet dément de tuer tous les habitants de notre planète puis de cloner sa fille Hélène en des millions d’exemplaires. Ainsi la terre ne sera plus peuplée que par elle et il sera le père de l’humanité. Abominable projet qu’il n’aurait aucun mal à réaliser sans la farouche résistance de sa fille courageusement secondée par son fiancé, le jeune journaliste Jérôme Fandor, et par Juve l’inspecteur de police ennemi juré du bandit. Comédie funk constituée d’une succession de tableaux joués et chantés, Fantômas revient fera appel au spectaculaire - apparitions et disparitions magiques, clonage, serpent géant, décapitation - mais sera aussi l’occasion de faire vivre avec humour ce mythe populaire et moderne.

Évoquer le crime en chanson
par Gabor Rassov

Feuilleton théâtral épique et chanté en seize tableaux Fantômas revient conte le retour de ce super méchant de légende. Il revient donc, plus décidé que jamais à faire ce pourquoi il est né : le mal. Toujours soucieux de détourner à des fins malfaisantes les innovations technologiques, séducteur et quelque peu magicien Fantômas sera, dans ce nouvel épisode de ses aventures, confronté à ses adversaires de toujours : l’inspecteur Juve, incarnation de l’honnêteté impuissante, du bien jamais assez armé pour faire face à son implacable ennemi et Jérôme Fandor apprenti journaliste velléitaire et fanfaron dont la qualité essentielle se révélera d’être le fiancé de la seule personne capable de vaincre Fantômas, Hélène la propre fille du monstre, son double lumineux. Père contre fille, terrible tragédie. Avec Pierre Pradinas nous avons choisi que c’est en chanson cette fois-ci que nous évoquerons le crime parce que la musique adoucit les mœurs bien sûr, mais surtout parce que nous voulions aller plus loin dans notre collaboration avec les compositeurs Christophe Minck et Dom Farkas.

Le Génie du crime
Notes de mise en scène par Pierre Pradinas

Avec Gabor Rassov, nous avons fait plusieurs fois au théâtre le portrait de tyrans. Nous partageons une préférence pour ces personnages inquiétants - somme toute humains - dont les méfaits sont révélateurs des penchants les plus sombres de l’humanité. Picrochole, Richard III, Néron... tout le monde connaît ces personnages et leurs histoires, contées par des poètes. Elles nous sont parvenues à travers le temps comme des mises en garde. Farces sanglantes ou tragédies, elles nous montrent d’effrayantes versions du possible... Ces êtres monstrueux sont une part de l’humanité. Ils naissent dans notre inconscient mais ils finissent par franchir le seuil du réel. Nous les imaginons peut-être pour nous en préserver, et en même temps, nous leur donnons corps. Ils sont une œuvre collective. Vers 1912, est apparu Fantômas, le « génie du crime », qui, s’il n’est mentionné nulle part dans l’état civil, suit le siècle comme son ombre. Un mythe du 20ème siècle. Né sous la plume de Pierre Souvestre et Marcel Allain dans la tradition déjà ancienne du feuilleton journalistique, Fantômas a le visage de nos peurs, il avance masqué. En 1913, juste avant la guerre, Louis Feuillade adapte pour le cinéma naissant plusieurs épisodes de ses aventures aux titres éloquents, entre autres Juve contre Fantômas, Le mort qui tue... Les surréalistes sont enchantés par les films autant que par les romans. Souvent avec humour, ils vantent l’exceptionnelle imagination des auteurs, l’absence de réalisme, la pertinence de leur inspiration populaire. Guillaume Apollinaire, Max Jacob, Jean Cocteau, René Magritte... lui dédient textes et tableaux, Blaise Cendrars ose : « Fantômas, c’est l’Eneide des temps modernes », et en 1933, Robert Desnos termine sa Complainte de Fantômas par un point d’interrogation :

« Allongeant son ombre immense
Sur le monde et sur Paris
Quel est ce spectre aux yeux gris
Qui surgit dans le silence ?
Fantômas, serait-ce toi ?
Qui te dresses sur les toits ? »

Fantômas, « notre contemporain »...

Terreur sur la ville, vols, crimes, corruption, morts violentes ... Fantômas frappe encore. Nul ne sait où, quand, et à quelle échelle il recommencera.
Dans la pièce de Gabor Rassov, son utilisation démoniaque de la science, et en particulier de la génétique, en fait notre cruel contemporain. Il y rêve de réduire la diversité humaine à une infinité de clones de sa fille. Il est vrai que le style populaire du feuilleton de Marcel Allain et de Pierre Souvestre a été méprisé par certains, qui n’ont voulu y voir qu’une littérature bas de gamme et de « pur divertissement ». C’est pourtant la naïveté assumée du style, annonçant la coulée verbale de l’écriture automatique, qui avait séduit les surréalistes. Fantômas est le cousin de Maldoror, et Fritz Lang le prit comme modèle pour son docteur Mabuse. Les monstres et créatures qui peuplent notre imaginaire, grotesques reflets de nos comportements, ont de beaux jours devant eux. Gabor Rassov s’est approprié cette écriture feuilletonesque pour en faire une fable d’aujourd’hui, loin de toute reconstitution nostalgique. Son Fantômas est empli d’une atmosphère de cauchemar dont on peut rire de connivence. La pièce est en grande partie chantée et musicale, et constitue ainsi un hommage, au delà de Fantômas, au grand monde des héros du pire, de l’art mineur et de la série B.

Théâtre, musique et mise en scène

Depuis plusieurs années, Dom Farkas et Christophe Minck créent la musique originale de mes spectacles. Notre collaboration n’a cessé d’évoluer et nous avons beaucoup travaillé l’interaction entre la musique et le jeu d’acteurs, ceci reste au centre de mes préoccupations. Cette fois, les musiciens sont sur scène, et ils participent au récit, en jouant et en chantant. Leur musique est moderne, mélange de funk et de soul, elle télescope le côté français de Fantômas, et magnifie les artifices bien connus du feuilleton. J’utiliserai dans la mise en scène les moyens que le théâtre met à notre disposition, la machinerie, la magie, les effets spéciaux, au service de cette fable baroque et drôle.

100% MUSICAL !
Avec Christophe Minck et Dom Farkas

Pour chaque pièce de Pierre Pradinas, Dom Farkas et Christophe Minck ont opté pour un genre musical différent, en fonction de l’histoire et de la situation : Néron mélangeait musique de Péplum hollywoodien, musique
antique et « jungle beat » ; Jacques et Mylène privilégiait l’ « easy listening » et Le conte d’hiver constituait une sorte de folklore imaginaire censé être celui d’une Bohème de fantaisie. Pour orchestrer les abominables méfaits du « génie du crime », Dom Farkas et Christophe Minck ont composé un opéra funk baroque où s’entremêlent sur des rythmiques implacables, chœurs disco, envolées lyriques et mélodies langoureuses. La présence de 2 instrumentistes et de 3 chanteurs-comédiens sur scène permet de garder la musique vivante. L’utilisation de la harpe ou de la contrebasse offre un intérêt acoustique et visuel. Ainsi, instruments classiques et technologie numérique sont étroitement mêlés sur scène. A l’instar de son personnage principal, la couleur musicale dominante de Fantômas revient est certainement le noir et les références à la musique afroaméricaine sont funk. Noires encore les incursions vers le gospel, le rap et même la rumba zaïroise. Tout comme Gabor Rassov s’est emparé du personnage de Fantômas pour le transposer dans une fable d’aujourd’hui, la musique de la pièce se joue sans nostalgie de « clichés musicaux » avec un son résolument actuel. Ainsi, Les 21 musiciens réunis en studio pour interpréter les versions instrumentales forment les pièces d’un puzzle de la scène musicale française des années 80 à aujourd’hui : Vincent Segal et Cyril Atef (Bum Cello, M), Malik Mezzadri (Magic Malik Orchestra, Julien Lourau Groove Gang, La poésie B), Fixie (Java, Tony Allen), Thomas Bloch (Arthur H, Radiohead)... Enfin, une attention toute particulière est accordée à la diffusion : mince filet sonore venant du fond du plateau pour un moment intime, son surrround pour une scène d’action venant souligner les effets spéciaux...

Propos recueillis par Léonor Manuel

FANTÔMAS : PERSONNAGE ET INCARNATION D’UN FEUILLETON INTEMPOREL

Le feuilleton est inséparable de l’essor de la presse au XIXe siècle et s’étend à tous les genres, artistiques, littéraire, romanesque. Les plus grands noms s’y adonnent, épisodiquement (Balzac, Sand, Nerval) ou systématiquement (Dumas), pour y puiser l’essentiel de leurs ressources. Le feuilleton devient progressivement un domaine à part entière de la production littéraire, populaire par excellence. Continuant à s’affranchir, il aboutira aux livraisons par fascicules accessibles aux bourses les plus modestes - procédé utilisé par les plus confirmés, comme Lamartine ou Hugo. Une ligne ininterrompue relie ainsi Dumas, Sue, Paul de Kock, Montépin, Féval, d’Ennery, parallèlement à celle que jalonnent d’Artagnan, Monte-Cristo, Rodolphe de Gerolstein, Rocambole, Lupin, Fantômas, etc. Le roman-feuilleton reprend les thèmes, les situations, les personnages et parfois les décors du roman noir (« gothique » ou de « terreur », au choix), sans qu’il y ait vraiment rupture ou rivalité entre les deux genres. S’y retrouvent interventions providentielles (au sens littéral), voire surnaturelles, innocent(e)s persécuté(e)s moralement ou physiquement, intrigues machiavéliques ou inextricables, repaires truqués ou inaccessibles aux profanes, sociétés secrètes maléfiques et tentaculaires, pérégrinations volontaires ou non (enlèvement, fuite, exil).
C’est dans le Paris de la Belle Epoque (celle des Apaches, des combats aux entrepôts de Bercy, des receleurs, des chiffonniers, des prostituées et des voyous) que Fantômas naît de la plume de Marcel Allain et Pierre Souvestre. En 1910, Allain, journaliste, critique théâtral et écrivain rencontre Souvestre, fils de préfet et journaliste sportif. Ils créent ensemble Fantômus en 1911 que la myopie de l’éditeur Fayard transforme en Fantômas. Ils écriront ensemble les 32 volumes de l’histoire feuilletonesque de Fantômas. Pierre Souvestre meurt à 40 ans, à la veille de la première guerre mondiale. Le dernier roman écrit en commun avec Allain s’intitule La mort de Fantômas. Marcel Allain reprend seul l’œuvre en 1919. Il disparaît en 1969 à l’âge de 85 ans. En 1913, le cinéma s’empare du personnage. Nous sommes au temps des commencements du long métrage accompagné de films à épisodes. Début d’une tentative de fidélisation du public empruntée au feuilleton. Un nom domine alors dans le cinéma français : Louis Feuillade, chef de production au studio Gaumont. Pour porter à l’écran Fantômas, il retient le principe de brefs longs métrages qu’il développe dans cinq titres : Fantômas à l’ombre de la guillotine, Juve contre Fantômas, Le mort qui tue, Fantômas contre Fantômas, Le faux magistrat. L’avènement du cinéma parlant est l’occasion d’un retour de Fantômas sur grand écran en 1932 sous la direction de Paul Féjos. La même année, Paul Dehame, l’un des maîtres de la radio offre à Robert Desnos de travailler à ses côtés. Il réalise avec lui la célèbre émission radiophonique à épisodes La grande complainte de Fantômas. La musique est de Kurt Weill, Antonin Artaud assure la direction dramatique et joue le rôle de Fantômas. Il faudra attendre l’après deuxième guerre mondiale pour revoir Fantômas dans deux films :
Fantômas en 1946, réalisé par Jean Sacha et sa suite, Fantômas contre Fantômas en 1948 dirigé par Robert Vernay avec Maurice Teynac.
En 1964, le Fantômas d’André Hunnebelle apparaît comme une distrayante parodie en couleurs qui connut le succès grâce à Jean Marais, Louis de Funès et Mylène Demongeot. En 1980, Claude Chabrol crée pour la télévision Echafaud magique et le Tramway fantôme avec Helmut Berger et Jacques Dufilho. Par la suite, le thème est largement développé entre autres par Fritz Lang (Les Araignées, 1919 ) Jacques Rivette ( Paris nous appartient, 1958), George Franju (Judex, 1959), Olivier Assayas (Irma Vep,1996). Comme l’a fait René Magritte, (qui dès 1946 a voué une véritable passion au personnage à travers ses nombreux tableaux). Il semble nécessaire, encore aujourd’hui, de tenter d’appréhender l’insaisissable dans l’itinéraire feuilletonesque de ce dandy magnétique et ténébreux en proie à toutes nos turbulences.

Extraits du dossier de presse « Fantomas Revient »


Bruno Paul
1er avril 2005



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