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Amour et de Sang Frais (D’)
Christopher Moore
Calmann-Lévy, Interstices, roman traduit de l’anglais (États-Unis), vampires d’aujourd’hui, 255 pages, octobre 2009, 17€

À la fin des « Dents de l’Amour », Jody, éprouvée par la solitude et son état récent de vampire, se décidait à partager cela avec son serviteur de jour, le jeune écrivain en devenir Tommy. Les deux jeunes gens partageront plus que des parties de jambes en l’air, et la jeune femme l’aime bien, voire plus, et c’est largement réciproque.
Seulement voilà, il reste des choses en suspens : que faire d’Elijah, le maître vampire coulé dans le bronze ? et comment quitter la ville, comme promis aux deux flics, compréhensifs depuis qu’ils ont touché leur part du magot ? Et va se poser la question des tâches administratives : puisque Tommy est désormais une Créature de la Nuit, il leur faut un nouveau “serviteur”...
Et quand les Animaux débarquent de Vegas avec une limousine et une prostituée bleue au plan de carrière évolutif, même Tommy, du haut de ses 19 ans, sent que les choses risquent de se gâter très vite...



Pari réussi pour Christopher Moore, qui 12 ans après donne une suite immédiate à ses « Dents de l’Amour » (retour des vampires au box-office oblige). Mais on se gardera bien de le taxer d’arriviste et de profiteur, tant son style, drôle, décalé et profondément satirique fait merveille lorsqu’il dépeint les enfants de Dracula.

Si le schéma peut sembler similaire (retrouver un serviteur pour les tâches quotidiennes aux heures ensoleillées), le récit diffère totalement, par ses problématiques comme son déroulement. Dans le premier volume, Jody avait assez bien accepté sa transformation, et se reposait sur Tommy pour beaucoup de choses, laissant le jeune homme de l’Indiana expérimenter tous les clichés sur elle, avec ou sans son accord (parfois).
Dans « D’Amour et de Sang Frais », les voilà en véritable couple de vampires, et Tommy doit apprendre d’un professeur au savoir encore frais. Leur expérience des semaines passées leur sera donc d’un secours vital : il leur faut trouver un nouvel appartement ou quitter la ville, et pour cela trouver quelqu’un qui ne s’endort pas dès le lever du soleil ; et il leur faut manger.
Là, ça se gâte, car Jody a du mal à avouer à Tommy qu’elle a mordu d’autres gens que lui, le jeune homme étant certain que la morsure s’accompagne d’un plaisir érotique, et il est un peu jaloux...
C’est aussi pour Tommy l’heure de la lucidité : être vampire, c’est pas cool, on ne peut plus boire de café (encore moins d’alcool), manger quoi que ce soit... Manger va donc lui poser un problème éthique, aussi se rabattront-ils sur le gros chat d’un SDF, avant d’“embaucher” le SDF lui-même. Je vous laisse découvrir les aléas du premier repas...

Le danger revient les menacer via la prostituée bleue que les Animaux, complètement accros au fantasme de “baiser un Schtroumpf” (je cite), ont ramenée de Las Vegas, et auprès de qui ils ont dépensé toute leur fortune récemment acquise. La belle bleue, découvrant rapidement la nature de Jody et Tommy (c’est fou comme des hommes esclaves du sexe sont bavards), voit là un avenir radieux s’ouvrir à elle, et disparaître le spectre de la vieillesse.
La libération d’Elijah est également au menu, après une suite abracadabrante de décisions pourtant pas stupides (prises séparément). Obligé de retrouver ses instincts primaires pour survivre dans la nature urbaine de Frisco, le vampire regrette son confort chèrement acquis (et pas déplaisant durant tous ces siècles) et ne va pas faire dans le détail pour clore cette parenthèse entamée avec la création de Jody. Comme on dit, du passé faisons table rase, et tant pis pour qui se trouve sur sa route...

Et je ne vous dis pas trop de choses du nouveau serviteur : c’est Tommy qui dégote (ou est-ce l’inverse) une jeune gothique, qui fait de lui son Seigneur Flood. Jeune fille débrouillarde, insolente, et gavée de culture vampirique, des pages de son journal émaillent le roman, pour du récit enjolivé et à la première personne encore plus jouissif que le reste (même si, dans ce qu’elle raconte, tout n’est pas drôle, loin de là.)

Un peu plus court que le précédent, « D’Amour et de Sang Frais » concentre 255 pages de bonheur de lecture, loin des vampires pâlichons d’aujourd’hui, un cocktail d’humour (noir) et de cynisme (soft), un regard sur la société et l’humanité plus profond qu’on ne s’y attend. Et une fin qui fait écho à celle du tome précédent.

Rhâââ, vivement le troisième !

Texte - 393 octets
D’amour et de sang frais - corrections

Titre : D’amour et de Sang Frais (You Suk. A Love Story, 2007)
Auteur : Christopher Moore
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Luc Baranger
Couverture : Néjib Belhadj Kacem
Editeur : Calmann-Lévy
Site Internet : page roman (site éditeur)
Collection : Interstices
Pages : 255
Format (en cm) : 15 x 23 x 2.3
Dépôt légal : octobre 2009
ISBN : 978-2-7021-4049-9
Prix : 17 €



À lire également sur la Yozone :
- La critique du volume précédent, « Les Dents de l’Amour » par Hervé Thiellement (à sa sortie) et Nicolas Soffray (lecture enchaînée des deux volumes)
- D’autres romans de Christopher Moore : « Un Sale Boulot » et « Le Sot de l’Ange »


Nicolas Soffray
28 juin 2010


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