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De la Chair à l’Acier
Anthologie
Editions Icare, anthologie de science-fiction, 240 pages, février 2010, 17,50€

Un homme en refus du progrès, une réécriture du mythe de l’Atlantide, un voyage à Alexandrie, une rencontre fantastique avec Jack l’Éventreur, des voyages interplanétaires, une société déshumanisée, des jeux du cirque, un guerrier fort et fier, un monstre d’acier, et un homme en quête de libre arbitre… Voici ce que nous proposent, avec plus ou moins de bonheur, les 10 auteurs de ce recueil.



C’est un exercice complexe que de critiquer 10 nouvelles dans le même article. Surtout quand elles sont aussi différentes en termes de style et d’univers. Certaines intégraient parfaitement le thème, à leur manière, certes, mais intégralement tout de même, d’autres beaucoup moins. C’est une par une qu’elles vous sont exposées ci-dessous.

Allegro Ma Non Troppo

C’est une nouvelle de ce que j’appellerais de la proche anticipation que nous propose Hans Delrue. Essentiellement axée sur la réaction d’un vieil homme face au progrès, l’auteur use d’un thème immémorial et toujours d’actualité. Avec un style fluide et rapide, voire même un peu trop sur la fin, c’est un beau combat moral entre déchéance et honneur…

Au Large d’Ildeïade

Cette deuxième nouvelle de Sébastien Ruche nous laisse un petit goût d’inachevé. En revisitant à sa manière le mythe de l’Atlantide, l’auteur nous livre un texte à la fin trop rapide, pour lequel il y aurait largement matière à développement, que ce soit dans l’histoire même mais aussi dans sa poursuite, tant des questions sont posées, et tant l’envie est grande d’en savoir plus. Une matière à roman, sans aucun doute, d’autant plus que le style, assez sombre, est très agréable à lire. L’imaginaire est très bien creusé et l’auteur semble parfaitement à même de créer son propre univers et surtout de nous emmener.
Le thème de la chair à l’acier ne prend ici que le dernier paragraphe, comme un prétexte, mais sans rancune, il y a tellement à lire derrière !

Byblos

Le mythe de l’Atlantide recommencerait-il à faire des émules ? En tout cas, c’est autour d’un livre atlante très particulier que l’auteure de cette 3ème nouvelle, Natalia Aparicio Vuille, construit son récit pour nous raconter sa version très personnelle du grand incendie de la bibliothèque d’Alexandrie.
Un style et une nouvelle somme toute classique, même si le livre, objet phare, est très loin de l’être !

Cortex Connection

Première impression sur cette nouvelle : Christophe Nicolier a trop lu « Dracula l’Immortel » ! Pourquoi ? Londres, 1888, des meurtres de femmes à l’utérus retiré, des vampires. Le parallèle s’arrête cependant ici. Le récit est confus, les vampires semblent démasqués mais traqués. Le personnage principal, Sherlock Doll (ah bon, il vous rappelle quelqu’un ce détective privé ?) semble avoir été victime d’expérimentations médicales, mais là aussi, les données fournies sont incomplètes, livrées en une seule fois et beaucoup trop rapidement. Si on comprend qu’il s’agit d’un complot, on ne saisit qu’assez mal les tenants et les aboutissants, tout comme l’intérêt du vampire. Et pour ce qui est de l’acier ? Trois lignes sur une prothèse biomécanique somme toute légèrement anachronique…

La Barrière d’Arkhan

Une vraie et belle nouvelle de SF qui nous est proposé ici par Luani. Dans la veine du « cycle des partenaires » d’Anne Mc Caffrey, l’auteur nous plonge dans un univers où les humains sont partis à la conquête d’autres mondes malgré une limitation qui les obligent à utiliser des vaisseaux cyborgs. À la croisée de la guerre galactique, des dons psioniques et du drame psychologiques, “la Barrière d’Arkhan” est un récit puissant et efficace.

Les Lumineux

Cette nouvelle de Jean Baret traite, avec philosophie, délicatesse et sensibilité de la déshumanisation de l’homme par le progrès. Confronté au suicide de son enfant qui refuse la société qu’on lui impose, un « homme », parfait et parfaitement lucide, finit enfin par comprendre ce qui fait que l’homme est homme.
En s’appuyant sur une anticipation assez classique, qui ressemble finalement assez à « Equilibrium », l’auteur nous pousse à une réflexion sur le progrès et ses conséquences, bénéfiques mais destructrices.
Ou quand l’homme, pensant devenir parfait, se transforme en monstre.
Le tout, pour ne rien gâcher, écrit de façon souple, rythmé et tout à fait adéquate.

L’Ours et l’Ombre

Un titre anodin pour ce récit à la limite du celtique-fantasy et qui réécrit les jeux du cirque en y ajoutant une pointe de technologie. Sans jamais vraiment savoir si on navigue entre deux réalités, l’auteur brouille les pistes en arrivant à placer son héros au second plan et le second rôle, qui n’en est pas vraiment un, au premier.
L’écriture et le style n’ont rien de spécialement remarquables mais Kenelm Bechon-Pearson rend ses personnages très rapidement attachants et l’on plonge sans retenue dans l’univers qu’il déploie à nos pieds.

Premières lignes

C’est un tout autre aspect du thème qui est développé ici par Nicolas Soffray. Ou comment devenir un homme et trouver un sens à sa vie par le fer. Le texte est traité comme un roman, pas de raccourci, juste un texte concis et clair qui permet à l’auteur d’exposer clairement ses intentions et de brosser la psychologie de ses personnages, tout en nous livrant toutes les clés pour comprendre son héros.
Là encore, le personnage devient vite attachant, et un texte plus long n’aurait pas été de refus.
À noter : l’effet de style dans la première partie du texte où le « tu » est utilisé pour la narration. Un peu déstabilisant mais efficace pour appréhender l’état d’esprit du personnage.

Sourire Cobalt

Quand le métal se mêle à la chair, qu’en ressort-il ? Un héros ou une arme de destruction ? Malgré une introduction en décalage complet avec le reste du récit, Nicholas Eustache nous dépose dans un univers entre science, irrationnel et services secrets.
Le style est efficace mais le récit étrangement…vide. Certes, il est difficile en si peu de pages de faire pénétrer le lecteur dans son univers. Mais au final, on survole cette nouvelle de beaucoup trop haut pour vraiment la vivre. Probablement parce que l’auteur s’est finalement peu attaché à la psychologie de ses personnages.

Une liberté au goût d’acier

Ils lui ont enchaîné l’esprit à ses armes, sa volonté à un homme par un morceau d’acier. Jean-Luc Saikaly nous raconte le combat d’un homme par le fer, contre le fer, pour retrouver sa liberté d’être humain, son libre-arbitre et la maîtrise de son corps. L’atmosphère du récit est très intéressante, non sans rappeler un peu « L’Assassin Royal » de Robin Hobb. L’écriture est simple, efficace. Malheureusement l’histoire est un peu longue à se mettre en place et, comme souvent dans ce cas, trop rapide à se conclure. Cette nouvelle fait cependant partie de celles qui pourraient facilement passer au format supérieur et dont on regrette même que ce ne soit pas le cas.

C’est un recueil finalement très intéressant que nous présentent les Éditions Icare. La grande majorité des nouvelles a été très bien choisie, le format idéal pour de très belles découvertes pour certains. Les illustrations sont soignées, tant pour chaque nouvelle qu’en couverture. Sans aucun doute, nous aurons droit à une deuxième édition de ce qui est, au départ, un concours d’écriture fort bien mené.


Titre : De la Chair à L’Acier
Origine : Appel à textes « Plumes en herbe » du site Forgesonges
Anthologiste : Frédéric Hubleur (Forgesonges)
Auteurs : Hans Delrue, Sébastien Ruche, Natalia Aparicio Vuille, Christophe Nicolier, Luani, Jean Baret, Kenelm Bechon-Pearson, Nicolas Soffray, Nicholas Eustache, Jean-Luc Saikaly
Couverture : Rémy Le Capon
Éditeur : Éditions Icare
Site Internet : fiche du roman
Pages : 240
Format (en cm) : 15,6 x 23,3 x 1,6
Dépôt légal : février 2010
ISBN : 978-2-917475-16-4
Prix : 17,50 €



Emmanuelle Mounier
1er mai 2010


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