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Chair et Tendre
Amelith Deslandes
Éditions La Madolière, Myriades, recueil (France), horreur, 210 pages, janvier 2010, 17€

Douze nouvelles au sommaire de Chair et Tendre. Douze occasions de plonger dans l’horreur.
Une odeur de charogne dans l’appartement d’un homme apparemment dérangé. Un autre perdu dans un dédale déroutant. Une maison dont on ne sort qu’estropié avec de la chance. Une ville à la géographie changeante et à l’hôpital pratiquant des greffes d’animaux mythiques. Des tueurs en série assassinés. Une Venise aux deux visages…
Voilà en vrac quelques images glanées au fil de textes qui collent à la peau et en font monter la chair de poule.



Né en 1977, Amelith Deslandes est un auteur assez secret. Il réside en Côte d’Or, après un passage au Québec. Son nom figure aux sommaires de nombreux fanzines et revues : Borderline, Codex Atlanticus, Solaris, Le Boudoir des Gorgones…
Son premier recueil de nouvelles, « Les Loges Funèbres », a été publié en 2006 chez Nuit d’Avril, une maison d’édition aujourd’hui disparue.

La préface de Jacques Fuentealba trouve bien des échos avec mon expérience personnelle. Ma découverte de cet auteur suit le même chemin et le premier texte lu, “Borderline traffic” dans le Borderline 00, m’a causé un réel choc. On peut regretter qu’il soit aujourd’hui introuvable, car juste diffusé à cinquante exemplaires.
Il va de soi que « Chair et Tendre » ne pouvait qu’attirer ma curiosité.

Certaines idées de départ génèrent des situations hors du commun, débouchant sur des histoires étonnantes et terrifiantes. On fera bien sûr le parallèle avec les romans “brussoliens” parus chez Fleuve Noir Anticipation et Présence du Futur. Dans « Chair et Tendre », l’influence de Serge Brussolo paraît plus marquante qu’auparavant.
Il y a aussi un peu de Daniel Walther et de ses recueils parus chez Néo (notamment « Requiem pour Demain »), avec des concepts que l’on retrouve au fil des nouvelles (dans le cas présent, on peut citer les greffes mythiques) et créant une certaine unité.

Même si des noms nous viennent à l’esprit, Amelith Deslandes possède sa propre voix. Il dispose d’une imagination débordante, sachant suggérer l’horreur des situations, qu’il ne juge pas mais expose, et la tension ressentie par les protagonistes.

« Chair et Tendre » semble marquer une évolution du style d’Amelith Deslandes. Par moments, il se plaît à écrire des phrases très courtes, avec de fréquents passages à la ligne. Dans certains cas, cette séquence peut se répéter sur une page et même plus. Parfois il use aussi à profusion des virgules pour ralentir encore davantage le rythme du récit. La lecture est alors heurtée, comme pour suggérer le danger rôdant partout.
Auparavant il n’était pas coutumier du fait, et on aimera ou pas ce changement. Le lecteur ne pourra pas lui reprocher d’avoir une écriture stéréotypée et de ne pas innover.

Amelith Deslandes excelle avant tout dans la littérature d’horreur. Son pouvoir d’évocation sait nous faire frissonner, car on ne pourra s’empêcher de s’identifier au personnage.
Imaginez une maison-labyrinthe avec des lames de guillotines suspendues au plafond et bougeant au moindre souffle d’air (“La maison-tranchoir”), et vous comprendrez l’horreur de la situation.
De tels exemples sont nombreux. Certains thèmes reviennent régulièrement, comme s’ils hantaient l’imaginaire de l’auteur : le labyrinthe, les greffes mythiques, la mode…

Parfois, il se plaît à multiplier les trames narratives en suivant plusieurs personnes ou nous assène des passages encyclopédiques sur les dangers de Mère Nature. Si cela renforce souvent le propos, cela le dilue à quelques reprises aussi et il est facile de ne plus trop savoir où l’auteur désire nous amener. Une façon de nous donner le tournis et de suggérer le thème du dédale en nous y plongeant.

Le talent d’Amelith Deslandes est indéniable. Une fois pris dans ses mailles, on y revient pour avoir notre dose d’angoisse. La terreur, l’horreur ne se cantonnent pas aux seuls auteurs anglo-saxons, ce que l’on pourrait nous laisser croire. L’exemple d’Amelith Deslandes est frappant et, pour moi, il joue dans la cour des grands.

Juste quelques mots sur l’édition avant de conclure. Le choix de laisser une page blanche après une nouvelle se terminant sur la page de gauche est surprenant et discutable. De plus, il aurait été bon d’indiquer les textes déjà publiés sur un autre support (ex : “Maudit soit le jour” paru dans Borderline 4). Deux remarques qui ne doivent surtout pas masquer la qualité de l’ensemble.

Amelith Deslandes est un auteur à suivre, car il possède un énorme potentiel. Si les gros éditeurs s’y intéressaient, il ferait mal et en étonnerait plus d’un.
Toutefois l’auteur semble avoir une prédilection pour la forme courte, ce qui rebute sûrement les décideurs. Heureusement que de petites structures n’hésitent pas à lui ouvrir leurs portes.

En attendant, lisez « Chair et Tendre ». Vous ne pourrez pas dire qu’on ne vous a pas prévenus !

« Chair et Tendre » est disponible directement chez l’éditeur.


Amelith Deslandes : déviant dans l’âme
Février 2010
Une interview Yozone


Titre : Chair et Tendre
Auteur : Amelith Deslandes
Couverture : Zariel
Éditeur : Éditions La Madolière
Collection : Myriades
Site Internet : Recueil (site éditeur), Blog du recueil
Pages : 210
Format (en cm) : 14 x 21
Dépôt légal : janvier 2010
ISBN : 978-2-917454-04-6
Prix : 17 €



François Schnebelen
16 février 2010


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Illustration de Zariel



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