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Ange de la Nuit (l’) T.3 : Au-delà des Ombres
Brent Weeks
Bragelonne, roman traduit de l’anglais (Etats-Unis), fantasy décoiffante et dramatique, 544 pages, novembre 2009, 25€

Il y avait un léger mieux à la fin du tome précédent, « Le Choix des Ombres ». Le Roi-dieu de Khalidor était mort, et la plupart des héros étaient encore en vie bien qu’en piteux état. Brent Weeks poursuit alors dans le récit des douloureuses circonvolutions du destin : Kylar et Vi sont désormais (et fatalement) liés, Logan n’est qu’à un meurtre de (re)devenir roi de Cénaria et Dorian risque de marcher sur les traces de son père en revenant à Khalidor pour y chercher sa future épouse qu’il a vu en rêve prophétique : Jénine.
Mais le coup de grâce viendra du Loup. Après le dernier sacrifice de Kylar, le Gardien des Mystères lui révèle le prix de son immortalité...



Brent Weeks parvient à chaque fois à nous surprendre. Il malmenait déjà pas mal ses héros, aussi une fois la menace du Dieu-roi écartée, on était en droit d’espérer un 3e volume plus politique et moins sanglant.
La politique est bien là. En effet, Térah Graesin est devenue reine de Cénaria, grâce (ou à cause) du sens de l’honneur et du sacrifice de Logan. On s’en doute, ce n’est pas pour plaire à Kylar, qui a sorti son ami du Trou pour le remettre à sa juste place, sur le trône qui est sien. Un avis partagé par Mamma K, qui souhaite mettre fin au Sa’kagué, ainsi que le projetait le défunt Jarl.
Mais il y a plus urgent, les Sa’ceurais de Lantano Garuwashi, le meilleur guerrier du continent, sont aux portes de la ville, et tous les voisins attendent de voir qui va commencer à étriper l’autre avant de venir planter un poignard dans le dos du vainqueur.

Un grain de sable pour provoquer le pire


Et au milieu de tout cela, comme toujours, Kylar, l’Ange de la nuit, capable de renverser le cours des évènements, parfois sans s’en rendre compte. En attirant des troupes dans le bois d’Ezra, zone aussi mystérieuse que mortelle, où le mage fou vivrait reclus, affrontant un énigmatique Chasseur qui tue quiconque pénètre sur ses terres, avec une prédilection pour qui possède le Don. Manque de chance, à la demande du Loup, Kylar a jeté Curoch, l’arme légendaire du Haut Roi Jorkin Alkestes, dans la forêt, tout ça pour récupérer sa main amputée par Garoth Ursuul...

Un rire grinçant pour dédramatiser


L’humour noir de certaines situations est bienvenu dans cette histoire où chaque pas pour éviter un piège semble conduire dans un autre. Brent Weeks joue avec le destin et la fatalité, et le lecteur partage l’ignorance de Kylar sur certains faits, notamment l’histoire légendaire du royaume, de Jorkin et ses compagnons... et du prix de l’immortalité conférée par le ka’kari noir.
Chaque résurrection lui coûte la vie d’un être cher, et le jeune homme se maudit de ses morts inutiles des mois précédents. Aussi, alors qu’il vient de se sacrifier pour rendre incontestable le pouvoir de son ami Logan, vous vous doutez bien que le prix sera cette fois au-dessus de ses moyens...
Mais là encore, l’auteur fait durer le suspense, nous laisse à peine le temps d’envisager le pire tandis que le drame se tisse sous nos yeux, et il va encore plus loin. Lorsque la Mort est écrite, elle peut être partout, dans une mauvaise chute... ou dans le choix d’aller au-devant et de mourir pour une cause... Si vous avez un cœur, vous haïrez l’auteur, tout en applaudissant à deux mains, les larmes aux yeux.

Du sang plein les yeux !!!


Les scènes de batailles, notamment l’ultime combat du Bien contre le Mal qui dure jusqu’à l’avant-dernier chapitre, sont comme toujours époustouflantes, et on retrouvera l’inspiration des héros de mangas shonen, super-guerriers capables à eux seuls de renverser le cours de l’Histoire. Ils ont affaire à forte partie, Neph Dada aligne les vürdmeisters par centaines. Mais tout comme ses héros rois ou capitaines, Brent Weeks ne néglige pas les hommes, et cet attachement à leur forces et leurs faiblesses fait tout l’intérêt de cette grande saga de fantasy.

L’amour, la plus grande force en ce monde


Sans trop entrer dans les détails, l’auteur concentre le drame autour de deux triangles amoureux. Logan, miraculeusement sorti du Trou, remonte sur son trône tandis que Dorian, abandonnant son don de prophétie, est rentré à Khaliras pour accomplir sa dernière vision : sauver la femme de sa vie, captive du harem de feu son père. Comme on s’en doutait depuis la fin du tome précédent, il s’agit de Jénine, la reine de Logan tuée sous ses yeux et guérie peu après par le fourbe Neph Dada. La révélation de la survie de chacun sera repoussée par les protagonistes qui savent, jusqu’à l’instant décisif... ou pas.
L’autre trio est bien entendu composé de Kylar, Elène et Vi. Vi qui aime Kylar. Elène qui aime Kylar, mais peine à accepter ce qu’il est, et se refuse à lui. Kylar amoureux fou d’Elène mais physiquement attiré par les courbes de Vi. Et depuis le petit incident des anneaux nuptiaux, Kylar et Vi partagent leurs pensées...
Par un tour du destin plutôt que de passe-passe, l’auteur parvient à dénouer l’écheveau. Mais la résolution logique (Elène est condamnée, Vi va consoler l’ange malheureux) n’est pas forcément un chemin sans embûches, et Brent Weeks s’en donne à cœur joie pour notre plus grand plaisir.

Mon coup de cœur (ou de foudre) fantasy de cette année


Comme les deux premiers volumes, « Au-delà des Ombres » se dévore. Difficile de lui trouver des défauts. Ses excès se justifient tous, de façon incompréhensible, par le souci de rationnel de l’auteur. Dans la tourmente de la guerre, ses héros restent des hommes et des femmes, avec leurs lacunes et leurs faiblesses. Kylar, tout Ange de la Nuit ultra-puissant qu’il est, reste un jeune adulte à qui on empêche de vivre dans le bonheur, soumis aux tentations de la chair tandis que son amour est il ne sait où, tiraillé par son sens de l’honneur et de l’amitié, et par-dessus tout, un garçon impulsif capable du meilleur comme du pire.
J’attendais beaucoup de la couverture de Frédéric Perrin, je ne suis pas déçu, malgré l’abandon des effets de flou et de coulure des illustrations précédentes.
La traduction est quasi impeccable, et le texte est fidèle jusque dans la continuité des coquilles relevées (neuf absences d’élision sur « de un », quatre fautes aveuglantes, dix coquilles).

Texte - 2.8 ko

Certains éléments m’ont surpris (des personnages qui se connaissent sans s’être jamais rencontrés...), mais difficile de vérifier sur 1500 pages... et c’est de peu d’importance au final.

Pour clore cette critique, saluons le talent de l’auteur qui parvient à déguiser son épilogue pour ne pas nous laisser en plan, de manière plus subtile que l’ultime paragraphe d’un roman de David Gemmell. Ce dernier peut d’ailleurs reposer en paix, la relève est plus qu’assurée avec Brent Weeks. Manque plus que Bragelonne le mette un peu plus en avant, car il mérite une diffusion à la « Légende ».


Titre : Au-delà des Ombres (Behind the Shadows, 2008)
Série : L’ange de la nuit, tome 3 (The Night Angel Trilogy, book 3)
Auteur : Brent Weeks
Traduction : Olivier Debernard
Couverture : Frédéric Perrin
Éditeur : Bragelonne
Site Internet : fiche de l’auteur puisque pas encore de page sur le roman, le site de l’auteur
Pages : 544
Format (en cm) : 15,3 x 23,8 x 4,2
Dépôt légal : novembre 2009
ISBN : 978-2-35294-352-5
Prix : 25 €



Volumes précédents :

- La Voie des Ombres (T1)
- Le Choix des Ombres (T2)


Nicolas Soffray
11 décembre 2009


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